Membres

samedi 7 mars 2020

N°350) Le Juriste Guillaume de Plaisians

Les Juristes du Bas Moyen âge sont à l'origine du droit politique moderne, et l'on nous rebat sans cesse les oreilles avec Guillaume de Nogaret, mais quid de Guillaume de Plaisians ???, son bras droit dans les grandes affaires du royaume du roi de Fer

De ce Guillaume originaire du village dont il porte le nom, qui se hissera au rang de Chevalier et deviendra Seigneur de Vézenobre et de Vinsobres (Gard). On sait qu'il étudia le Droit à la fameuse Université de Montpellier, réputée pour son école de droit et de médecine, nous avons connaissance du fait que Guillaume de Nogaret y enseignait le droit

Plaisians y deviendra "legum doctor", ou si vous préférez docteur en droit. A partir de 1298 il est en poste à Beaucaire, comme juge mage, poste qu'avait occupé avant lui Guillaume de Nogaret

Plaisians occupe encore ce poste en février 1303, en ce début de XIV siècle, ou il fut convoqué par Philippe IV le Bel pour la réunion du Parlement de Juin 1303, c'est la première marche de son ascension au gouvernement des affaires, il va devenir l'un des fameux Légistes membre du conseil du roi de fer (nous dirions ministre à notre époque), mais voila beaucoup de coïncidences et cela pose questions ??









Est il mandé par le roi, ou sur demande de Nogaret ?, ce dernier devant aller à Anagni pour une confrontation avec le Pape Boniface VIII (voir article N°54 l'attentat d'Anagni et G de Nogaret)

Nogaret avait échoué à convaincre le parlement et le roi pendant la cession, en mars 1303, de prendre des sanctions contre Boniface VIII, est ce pour avoir un appui pendant son absence qu'il fait venir Plaisians, le Juge Mage de Beaucaire à Paris ???

Cela semble logique, car notre homme apparaît associé très souvent aux actes de Nogaret, principal conseiller du roi depuis la mort de Pierre Flote (Garde du Sceau privé), on le trouve impliqué dans nombre de dossiers (documents de G de Nogaret et de G de Plaisians, au trésor des Chartes, Ch V Langlois, notices et extraits des manuscrits de la BNF)

Il apparaît également dans la longue lutte du monarque contre le Temple, dans divers actes, au côté de son ancien professeur de droit, lutte commencée avant eux par Pierre Flote ( du moins jusqu'à la mort de ce dernier à la bataille de Courtrai), mais aussi de Aycelin évêque de Narbonne, Philippe de Villepreux, et plus tard Enguerrand de Marigny. Plaisians décédera avant le procès final du temple en 1314 (voir article N°52 la fin de l'ordre du Temple)









S'il est entré dans les coutumes de les qualifier d'âmes damnées du Roi de Fer, ils étaient avant tout des juristes d'exception à leur époque, les meilleurs avocats de la cause de Philippe le Bel (voir article N°70 Philippe IV le roi de Fer). Ils vont oeuvrer avec méthode, inventivité et acharnement dans l'intérêt de leur maître, contre celui de la religion

Benoit XI avait succédé à Boniface VIII, une ambassade fut envoyée à Rome, en février 1304, auprès du Saint Père, elle se composait de Béraud de Mercoeur, Pierre de Belleperche, Guillaume de Plaisians et Guillaume de Nogaret, dans le but de recevoir la levée de l'excommunication du roi de fer, lancée par Boniface, mais aussi pour féliciter Benoit pour son élévation au trône de Saint Pierre

L'ambassade fut un succès, le roi reçoit l'absolution, ainsi que trois de nos Ambassadeurs !!!....Nogaret étant exclus de cette mesure, on pense que Benoit a des doutes quand à l'implication de Nogaret sur la fin de vie de son prédécesseur

Cette relation entre Nogaret et Plaisians ne peut s'expliquer que part des relations antérieures et l'on peu supposer que Plaisians étant en Montpellier dès 1292, connu Nogaret, celui ci fut peu être son professeur, que ce dernier l'apprécia. On sait que des liens très forts, professeur élève, se tissaient à cette époque










Or donc plus tard quand Nogaret acquit la confiance du roi de Fer, aurait il avancé puis protégé la carrière de cet ancien élève ?. Plaisians fut toujours le second de Nogaret, même dans la mort, car bien plus jeune que son mentor il le suivi que de quelques semaine dans la tombe

Dès 1307 Guillaume de Plaisians est Seigneur de Vezenobres, cette bourgade comprenait environ 340 feux en 1295, il va contribuer à l'agrandissement de son fief en demandant la permission d'y établir un marché hebdomadaire et Vezenobres eut son marché tous les lundi. Guillaume, époux de Sibile eut trois filles, il meurt en novembre 1313






PS: voila remis en selle un oublié de l'histoire, à la façon de votre copiste le nain M de V

vendredi 6 mars 2020

Cagots médecins au bas Moyen âge 2/2

On ne trouve guère de Cagots médecins qu'au XIV et XV siècles, c'est à dire la toute fin du moyen âge. Selon le docteur Fay, je cite: nous n'en connaissons que quatre cités dans des documents écrits ou des actes notariés, en 1374, Maître Pierre, Crestia (cagot), de Lac, qui fut appelé pour soigner des plaies, Puis en 1384 un certain Berduc de Cazenave, promet devant notaire de payer à Johan Chestia (cagot), de Meritein, 23 florins d'or pour cure de plaie de tête

Au XV siècle en 1434, Maître Berdot médecin Chrestia (cagot), d'Oloron, accepte un arrangement pour le paiement d'honoraires que lui doivent deux habitants d'Aramitz, et en 1472 c'est encore un médecin cagot qui reçut de Jean de Mailhoc la cabane de Cauterets. On suppose bien sur qu'ils ne furent pas que quatre sur toute la France ???

Force est donc d'admettre que les Cagots devaient être en assez bonne santé pour assurer l'exercice de la médecine. Le droit pour eux d'exercer s'explique par la condition libre ou ils vivaient et le peu de surveillance dont on les entourait, sans compter l'incompétence notoire de nos pédants crottés de médecins issus des Facultés. Cependant on ne leur eût pas laisser cette licence au XI et XII siècles, et encore moins plus tard au XVI siècle

Lire article N°55 la médecine et la chirurgie, N°310 formation du médecin au bas moyen âge, N°56 le métier d'Apothicaire, N°156 lèpres et léproseries, N°157 les épidémies, le feu sacré, la Suète, la peste








Au sujet des cagots médecins, M Sanzot a dit avec justesse que s'il y avait en France des écoles de médecine, que ce soit en Montpellier, ou en Paris, on n'y aurait pas reçu les Cagots !!!, et qu'il est plus probable qu'ils aient appris leur art en Espagne ou l'on trouvait des médecins Juifs et Arabes ???

Cette seconde observation de M Sanzot serait justifiée, si elle était prouvée !!. Nos cagots avaient ils appris leur art dans quelque Université étrangère ????, ou n'étaient ils pas plutôt de ces médecins non officiels qui abondaient au XIV et XV siècle, et contre lesquels fut publié plus d'une ordonnance !!!

De même que dans les léproseries, certains lépreux faisaient office de médecin, peut être en était il de même chez nos cagots ???. On peu d'ailleurs se poser la question; serait ce la, l'origine de cette croyance populaire qui faisait d'eux des Sorciers ????

Or on sait qu'en Poitou, les Devins étaient uniquement recrutés parmi les Charpentiers et les Bûcherons, et ces métiers étaient précisément les seuls qu'exerçaient les Cagots, puisqu'ils ne travaillaient que le bois

Est il loisible de croire que cette réputation de sorcellerie attachée aux familles de bûcherons puisse marquer la persistance d'une coutume, celle de cagots médecins ou sorciers ????









Divers petits faits relevés par F Michel tendraient à confirmer cette opinion, exemple: Quand on mettait le pain à l'envers sur la table, dans certains villages il est dit que les Cagots avaient le droit d'entrer et de prendre le pain, de même que l'on raconte qu'un cagot avait le droit de prendre la charge que portait une bête de somme, si celle ci n'était pas bien empaquetée ou tombait, ce sont bien la des droits assez semblables à ceux des sorciers ???

Par contre si l'on reconnait cette assimilation, certaines personnes dont Mazure (histoire du Béarn et du Pays Basque), en tirent des conclusions erronées, à savoir que ce serait à cause de la sorcellerie qu'il fallait imputer la proscription des Cagots, notre homme les accusait de Ladrerie et d'oeuvres noires !!!

A Perquie (landes), on croyait même que caresses ou regards de Cagots communiquaient de graves maladies ainsi que des infirmités incurables aux enfants !!. Une chanson de Mugron (Landes), prouve clairement que l'on croyait les Cagots sorciers !!

                                " Gagot, gabot, gabère"
                                            "Couan a bis ta may sorcière"
                                                       "Et toun pay loup garous"




PS: histoire de la lèpre en France, lépreux et Cagots du Sud Ouest du Docteur H M Fay..documentation BNF....M de V

mercredi 4 mars 2020

Les Cagots du X au XV siècles 1/2

Dès le XIV siècle les médecins qui se sont occupés des Cagots les représentèrent comme des malades. Bien que peu nombreux sont ces vieux cliniciens ayant consacrés à ces malheureux quelques lignes, on doit cependant reconnaître la concordance parfaite des idées qu'ils expriment au sujet des Cagots.

Si à leur témoignage on joint les nombreux documents qui sont réunis dans les travaux du Docteur H M Fay, dont je vous livre un passage dans cet article, il apparaît clairement que nos Cagots furent de tout temps considérés comme des Lépreux

Guy de Chauliac (1383), dans son traité " de grande Chirurgie ", traité VI, doctrine I, chapitre II de Ladrerie, classe les malades soupçonnés de Ladrerie en quatre groupes: 1° ceux qui n'ont rien, et qu'il convient de doter de lettres de certificat, afin de pouvoir les présenter auprès d'un représentant ecclésiastique dont dépendent les Lépreux

2° ceux qui n'ont que des signes équivoques atténués, qu'il convient de mettre en observation, afin on suppose de voir l'évolution de cette maladie de lèpre ?










3° ceux qui ont beaucoup de signes équivoques et peu d'univoques (opposé à ambigu), ce sont nos Cagots, on leur enjoint de vivre à l'écart et de ne point se mêler au public, 4° les Ladres confirmés, qui doivent entrer en Ladrerie, et la catégorie était, si l'on veut, la "petite Lèpre", ou lèpre Blanche, par opposition à la " grande lèpre rouge".

Notre docte praticien du bas moyen âge était mieux placé que tout autre, car vivant à Montpellier sur les confins d'une région ou ces malheureux pullulaient assez librement à son époque. C'est en s'inspirant des idées de Guy de Chauliac que notre Auteur entreprend l'étude médicale des Cagots, en premier lieu, selon les médecins d'autrefois, puis ensuite avec une approche moderne, je ne vous donnerait dans cet article que l'approche médiévale, qui reste le but de ce Blog

Au XIV siècle, à Bayonne, l'autorité eut maille à partir avec des gens que des règlements de 1315 et 1319 appellent "arcabotz" et "ischaureilhatz", qui se trouvaient sans profession et qu'il fallait chasser de la ville, il semble qu'il s'agissait de Cagots, le mot arcabotz dérivant de "caffot", et ischaureilhat ou ésaurillé, se rapporte à la résorption du lobule de l'oreille, et au ratatinement de cet organe tout entier, signe évident de lèpre à l'époque.

En 1320 les lépreux furent accusés avec les Juifs d'avoir de concert empoisonné les sources, les Cagots eurent eux aussi à souffrir de représailles. Il faut attendre 1383, date d'achévement du traité de grande chirurgie, pour apprendre quelque chose en matière de " Cagoterie "










Guy de Chauliac nous dit dans son ouvrage que cette maladie est caractérisée par la présence de plusieurs signes équivoques et peu d'univoques de lèpre. la symptomatologie de la lèpre est donc celle de la catégorie, ou seul l'aspect clinique du malade, le groupement des signes, qui sont tous inconstants, a de l'importance pour le diagnostic

Ce qu'écrivait Guy de Chauliac était le fruit de l'observation, c'est par lui que nous apprenons à connaître la lèpre légère des Cagots qui ne les empêchait pas de vivre en famille, de travailler, et d'avoir droit à un minimum de considération, mais qui nécessitait cependant un certain isolement

C'est à partir de cette fin de XIV siècle que l'on va commencer à dire, en parlant des Cagots, qu'ils sont atteint "d'une espèce de Lèpre", inutile de préciser qu'on la disait fort contagieuse !!!

Une lettre de Charles VI le Fou, datée de 1407, nous montre à merveille ce que l'on en pensait en ce début de XV siècle, ce document est adressé aux Sénéchaux de Toulouse, Carcassonne, Beaucaire, Rouergue, Bigorre et Quercy, ainsi qu'au gouverneur de la province

Je vais à la mesure de mes moyens vous donner un aperçu lisible de cette lettre, mais sans vous en garantir la transcription exacte, le nain n'étant pas diplômé es langues anciennes, je m'en excuse, mais vous voila prévenus !!!









Ou il est dit: que les Capitouls de Toulouse et les principaux du Duchié de Guyenne, lui ont fait exposer que dans lezdites sénéchaussées et duchié, y avoient plusieurs personnes malades d'une maladie, laquelle est une espèce de lèpre ou meselerie, et les entachés d'icelle maladie, sont appelés en d'aucune contrées Capots, et en d'autres contrées Casots, et sont acoustumés de ces lieux de toute ancieneté, et doivent porter certaine enseigne pour estre connus des saines personnes (lire article 194, les signes d'infamie au M-A)

Aussi doivent ils demourer et vivre séparement, afin que les sains ne soyent entachés et corrompus. Nous mandons et enjoignons que dorénavant lesditz Capots ou Casots ou malades de la dite maladie, ne soient si osés ni si hardis, qu'ils aillent et viennent, sans pouvoir être repérés aucunement parmi les saines personnes, qu'ils portent désormais la dite enseigne d'anciéneté acoustumée, et de manière que chacun puisse la voir !!

A quelques année de la , le Dauphin Louis (futur Louis XI), se trouvant à Toulouse, nomma en 1439 des commissaires afin de visiter des personnes, hommes, femmes et enfants qui s'étaient répandus dans la ville de Toulouse " qui estoient entachiés d'une très horrible et griève maladie, nommée maladie de lèpre ou capoterie ", afin qu'ils ne se mêlent aux habitants






PS: je ne vous donne ici qu'un aperçu de l'immense travail du Docteur Fay, son livre faisant plus de 800 pages, je ne saurai trop vous conseiller de le consulter sur le site de la BNF, dont une fois de plus je salue le travail qui nous permet d'avoir accès à ces documents M de V

dimanche 1 mars 2020

Pierre de la Broce, favori de Philippe III le Hardi

On s'interroge encore beaucoup, à cause du vide de documents Historiques de cette période, sur la nature du pouvoir qu'exerçait ce favori auprès de Philippe III le Hardi, les chroniques sont unanimes pour dire que ce roi ne faisait rien sans l'avis de Pierre de la Broce, et les nombreux actes de donation de ce monarque envers ce dernier, sont autant de témoignages de la faveur dont il jouissait, mais au contraire des autres conseillers royaux on ignore totalement en quoi consistait son influence ???

Sous le fils de ce monarque, on trouve dans l'entourage du roi de Fer des personnes influentes tel un Pierre Flote, un Guillaume de Nogaret et Enguerrand de Marigny, qui détiendront chacun à leur tour des responsabilités tant financières que politiques, et ils possédaient des positions dominantes au conseil du roi, la compétence politique de ces hommes n'a jamais été mise en doute !!

Rien de tel pour Pierre de la Broce Seigneur de Langeais !!!. Le seul témoignage exploitable attestant d'un pouvoir de commandement, à son sujet, a trait aux machines de guerre qui furent conduites à Toulouse, sur son ordre, en prévision de la campagne contre le Comte de Foix en 1272. Notre homme apparaît avec le titre de Chambellan à la fin de la décennie 1260, Saint Louis (louis IX), meurt à Tunis, son fils prend alors le commandement de l'armée, quitte la Tunisie pour rentrer en France, via la Sicile et l'Italie

Rien ne nous dit qu'il ai combattu lors de la croisade et en Tunisie, on ne le cite nul part, il semble n'avoir aucune compétence dans le domaine militaire ????









C'est d'abord comme Barbier Chirurgien que Pierre de la Broce c'était immiscé dans l'entourage de Saint Louis, on sait que ce monarque était de santé fragile, et certaines chroniques insisteront lourdement sur la basse extraction de Pierre, allant même jusqu'à dire qu'il n'aurait été qu' un simple barbier ???

Après réexamen, attentif, par des historiens, des sources, on peut affirmer qu'il a eudans l'entourage de Saint Louis, un rôle de mire et de chirurgien. Il ne semble cependant issu d'aucune école de médecine, aucune chronique n'en fait état, donc il n'était pas médecin, ce qui n'est pas un mal quand on connait les compétences peu flatteuses de cette corporation à l'époque !!!

Cependant même si son ascension fut exceptionnelle, Pierre, n'était pas entièrement un roturier, sa mère était de petite noblesse de chevalerie, un de ses oncle était chevalier, et son père le fut du moins à la fin de sa vie, mais il faut bien avouer que dès 1270 il occupait une position très au dessus de son rang dans la hiérarchie de l'hôtel royal ??, et ne semble pourtant n'avoir porté d'autre titre que Chambellan du roi.

On peut retracer ainsi, et sans trop s'avancer, les premiers temps de la carrière de Pierre. Issu d'une famille approchant la noblesse, il entre assez tôt dans l'hôtel du roi, au plus tard en 1255, peut être en raison de capacités peu communes de guérisseur, comme Mire, ou plutôt comme Barbier Chirurgien, nous marchons sur des oeufs en faisant des hypothèses plausibles, mais comme je dis toujours, le Moyen âge est une cathédrale vieille de mille ans, pavée d'hypothèses plausibles !!










Promu Chambellan du roi, au plus tard en 1266, il jouit dans les dernières années du règne de Saint Louis, d'une situation confortable à la cour, avec une probable spécialisation dans les affaires financières, comme le laisserait penser ses liens privilégiés avec un Pierre Michel et un Pierre Barbe

Par la suite son rôle semble avoir été de diriger l'administration royale sous Philippe III le hardi, mais rien ne laisse supposer qu'il ai joué un rôle dans la définition de la politique royale, et comme nous l'avons déjà mentionné plus haut il ne semblait avoir aucune compétences militaires, donc ce n'est ni par ses prouesses guerrières, ni par son esprit politique que Pierre de la Broce devint le tout puissant favori du roi ??? la question reste posée !!!


Nota: Pierre de la Broce ( ou de la Brosse), finira pendu comme un manant au gibet de Montfaucon en 1278



PS: Le trésor des Chartes ne possède pas de registres ou les actes du gouvernement royal aient été consignés de 1270 à 1285, alors que nous possédons les registres officiels antérieurs à cette période, concernant le roi Saint Louis, et postérieurs à celle ci, concernant le roi Philippe IV le Bel. En outre les archives administratives et judiciaires du règne ont été gravement mutilées par un incendie qui détruisit le greffe du parlement au XVIII siècle  M de V


jeudi 27 février 2020

Le service militaire sous Philippe III le Hardi

Pour le règne de ce monarque , fort peu documenté, le Chartrier de Pierre de la Broce Seigneur de langeais et incontournable, ses documents confisqués avec ses biens et ses domaines ont été versés au trésor des Chartes, après la chute de ce favori du roi Philippe III (1270-1285), ce Pierre de la Broce reste le premier "favori" de l'histoire de France

Une partie des documents de ce chartrier (huit actes en particulier, on retenu l'attention de Xavier Hélary, historien médiéviste et spécialiste de la guerre au moyen âge, votre copiste le nain se propose donc de vous livrer quelques extraits de son travail, donnant un éclairage sur le mécanisme de réunion de l'Ost Royal sous ce monarque, et les rapports existants entre un Seigneur et ses Vassaux au regard du service militaire en cette fin de XIII siècle

La question du service militaire à cette période est dès plus complexe et dès plus mal connues. Ce dossier d'actes permet d'y voir plus clair









Schématiquement , l'ost royal pouvait être constitué de deux manières. Un certain nombre de chevaliers et autres combattants étaient retenus aux gages du roi, au sein de son hôtel, ce que l'on pourrait nommer " la maison militaire du roi ". le compte qui récapitule les dépenses liées à la croisade d'Aragon de 1285, distinguait nettement les chevaliers qui estoient de l'ostel, de ceux qui n'estoient point de l'ostel !!

Par ailleurs ses vassaux directs devaient obéir à la convocation que le roi en tant que Seigneur Suzerain leur adressait, et lui fournir le service auquel ils étaient tenus, dans des formes infiniment variables en fonction des personnages et des lieux ou ils se trouvaient, mais le plus souvent pour une durée de 40 jours gratuitement !

Beaucoup de vassaux du roi étaient de simples Chevaliers, et ils servaient avec juste une ou deux personnes dans leur suite, bien souvent un écuyer et un " garçon ", celui ci étant le plus souvent chargé de s'occuper des chevaux et du matériel. Dans ce cas précis le recrutement était assez simple puisque c'était l'entourage habituel du chevalier qui était sollicité

En revanche pour les vassaux plus importants, ceux du premier rang, Ducs, Comtes, et hauts Barons, mais aussi les seigneurs qui jouissaient d'une certaine considération étaient accompagnés d'une suite bien plus importante








Pour l'expédition de Philippe III contre le Comte de Foix, en 1272, le contingent du Duc de Bourgogne était composé de 11 bannerets, 43 chevaliers et donc plusieurs dizaines d'écuyers et hommes d'armes attachés à ces fers vêtus, dont les documents conservés n'ont pas gardé la trace.

Mais on sait par exemple que le Comte de Rodez vint avec 7 Bannerets, 26 Chevaliers, et 97 écuyers et hommes d'armes !!, ce qui laisse à penser selon Xavier Hélary, que la proportion de non chevaliers dans la cavalerie lourde de l'ost était assez forte, et qu'en tout cas elle est nettement sous évaluée par les sources ???

Il y a tout lieu de penser que les contingents étaient constitués sur le modèle de l'Ost Royal, chaque Seigneur, comme le roi, pouvait à son niveau, recourir à la semonce de ses propres vassaux et à la retenue de combattants figurant dans son entourage, ou recrutés pour l'occasion

On peut évoquer la constitution, par l'évêque de Beauvais, à l'occasion de l'Ost de Sauveterre en 1276, que le roi avait réuni contre la Castille, de l'envoi par cet ecclésiastique de 10 Chevaliers. Selon les documents ces dix Chevaliers semblent ne pas être forcement ses vassaux, ou du moins ce n'était par pour cela qu'ils allaient combattre...ce qui nous amène à la deuxième manière d'être à l'Ost Royal








Ce prélat avait conclu avec trois d'entre eux une convention, au terme de laquelle ils étaient tenus, moyennant pécunes de l'évêque, de servir en son nom dans l'armée royale avec sept autres chevaliers dont le recrutement était laissé à leur discrétion. Ce système de contrat même s'il fut fréquent n'avait pas supplanté le service du par les vassaux à leurs suzerains, car sous le règne de Philippe IV le Bel, plusieurs documents attestent de cette obligation, il semble plutôt que les deux systèmes jusque dans les premiers temps de la guerre de cent ans coexistèrent

Les sanctions existaient aussi, par exemple, en novembre 1298, un vassal de Charles de Valois nommé Fouquet, perdit son fief pour défaut de service, et au printemps 1302, après " les matines de Bruges ", Jean Seigneur du Luzarches rejoignit l'Ost réuni par le Comte d'Artois, le seigneur de Luzarches tenait plusieurs fiefs, dont le roi avait transféré l'hommage lige à Pierre de Chambly, et pour lesquels Jean devait en temps de guerre le service de trois Chevaliers, il va donc suivre le Seigneur de Chambly à l'armée de Flandre et aura la chance de survivre à cette fameuse bataille de Courtrai ou les Flamands ne firent pas de prisonniers !!

Cependant il va tomber malade et obtenir des maréchaux de France, l'autorisation de se retirer tout en laissant ses trois chevaliers à l'Ost. Ce qui n'empêcha pas Chambly de confisquer ses terres pendant 3 ans, sous le prétexte qu'il s'était retiré sans congé. Après transaction Jean du céder à son suzerain des terres produisant un revenu de 50 livres l'an



PS: voir également l'article 276, le Ban et l'arrière Ban au Moyen âge M de V

mercredi 26 février 2020

N°345) Edouard III et les Castillans, à la bataille de Winchelsea 1350

En ce temps là il y avait grande rancune entre le roy d'Albion et les Espagnols, par le fait de certaines mauvaises actions de pillage et piraterie que les Castillans avoient faits sur mer, pour le compte des Français, à la couronne d'Angleterre. Or donc il advint en cet an de grâce 1350, que les Espagnols étoient venus en Flandre, avec un grand nombre de nefs pour faire provisions de marchandises, ils arrivèrent en la ville de l'écluse qui étoit un avant port de Bruges se trouvant à l'embouchure de la Swin (aujourd'hui ensablée)

En ce lieu ils furent informés qu'ils ne pourroient retourner chez eux sans croiser sur leur route les Anglais, ce qui ne brouilla point leurs mérangeoises, car ils ne firent pas grand cas de cette information. Ils se pourvoyèrent donc à loisirs en laines, tissus et toiles, étant entendu qu'ils s'attendraient les uns les autres afin de repartir en convoi une fois leurs emplettes de marchandises terminées à leur convenance

Edouard III qui les avoient en grande haine, apprenant qu'ils ravitaillaient grandement en Flandre, décida de les accueillir bellement sur leur chemin de retour, il se mit à la mer avec plus de 45 nefs, et force gens d'armes, chevaliers, écuyers et grande foison de hauts seigneurs et barons. Les vaisseaux Anglais vont se tenir trois jours à l'ancre en mer entre Douvres et Calais en embuscade

Quand nos Castillans eurent chargés leurs nefs de toutes marchandises à ramener en leur pays, voyant qu'ils avaient le vent pour eux levèrent l'ancre et mirent à la voile. Ils étaient  au nombre de 40 grosses nefs, fort hautes sur l'eau et fort belles que c'étoit plaisir à voir. Ils étoient bien 10 000 hommes au total, si l'on compte les mercenaires à gages qu'ils avaient enrôlés en Flandres !!!!









Ainsi naviguant, nos Castillans cingloient plein vent en direction de Calais. pendant ce temps le roy Edouard attendant en mer avec sa flotte et ses hommes bien ordonnés, étoit en tête avec son vaisseau comme il se doit, notre monarque vêtu d'un pourpoint de velours noir, et sur la tête également noir, un chapeau en poils de castor qui lui seyait à merveille. Il étoit de fort belle humeur faisant jouer sur sa nef par des menestrels une danse d'Allemaigne, que messire John Chandos (voir article 82), qui se trouvait aussi sur ce bâtiment, avoit rapporté nouvellement

La sentinelle qui étoit au château du mat principal de la nef royale signala nos Espagnols, ajoutant même " Dieu me soit en aide, j'en vois tant que je ne puis les compter ". Le roy fit sonner les trompettes afin de prévenir et rassembler ses vaisseaux. Il étoit déjà tard, au environ de l'heure de vêpres, Edouard III fit apporter du vin, en but avec ses chevaliers puis se mis casque en tête

Les Castillans qui approchaient dirigés par Don Carlos de la Cerda, ayant le vent pour eux auraient fort bien pu les éviter et s'en aller à leur barbe et à leur nez !!!, mais soit par orgueil ou pour l'honneur ils ne voulurent passer sans combattre

Edouard ordonna à son marinier de s'avancer contre la nef Castillane qui venoit en tête, le choc fut terrible et semblable à une tempête pour ceux qui étoient à bord, la nef du roy fut si ébranlée qu'elle faisoit eau de toutes parts !!. Ils s'accrochèrent à un autre gros vaisseau venant de l'autre bord avec force crocs de fer et chaines, alors commença une rude bataille pour le roy et ses autres navires

Les Espagnols avaient des vaisseaux plus grands et plus hauts sur l'eau, de sorte qu'ils avoient un avantage pour tirer, lancer des pierres et de lourds barreaux de fer qui faisoient grand dommage aux Anglois

Edouard III et ses hommes se hâtaient fort de conquérir le vaisseau auquel ils étoient accrochés, car le leur étoit en train de couler bas faisant eau de toutes parts. Ils se comportèrent si bien que la nef Castillane fut prise et ceux qui étoient dessus mis hors bord !!!, et avec ce nouveau vaisseau se portèrent contre l'ennemi suivant. Les tirs des Castillans étoient moins rapides car ils n'avaient que des arbalétriers, mais ces fortes arbalètes faisoient beaucoup de mal aux Anglois









Or donc failli périr noyé aussi le Prince Edouard de Woodstock (voir article 63), avec sa nef, qui conquit un vaisseau Espagnol, et y monta prestement avec tous ses gens au moment ou son navire coulait bas !!, ainsi partout combattaient barons et chevaliers d'Albion et Espagnols du pays de Castille sur les autre nefs de cette grande emprise navale !!

Jéhan Froissart  (voir article 6 et 96), nous dit je cite: Je ne puis vous parler de tous, ni dire celui qui fit bien et celui la fit mieux, mais il y eut ce jour rude et forte bataille, les Espagnols donnèrent fort à faire au roi d'Angleterre. toutefois la journée resta aux Anglais, les Castillans perdirent 14 nefs ce jour, le reste passant outre et poursuivi sa route

Edouard III fit sonner retraite et ils s'en retournèrent en Angleterre, ils prirent terre à Ryde et Winchelsea peu après le jour tombé. Le roi ses enfant et sa suite prirent des chevaux dans la ville et chevauchèrent vers le manoir ou se trouvoit la Reine Philippa de Hainaut qui n'étoit qu'à deux lieues de là





Nota: 1) Jéhan Froissart était le secrétaire particulier de Philippa de Hainaut, reine d'Angleterre

2) La France n'avait plus de marine depuis sa destruction à la bataille de l'écluse par Edouard III







PS: chronique de Froissart livre I à IV édition de 1881, cette bataille navale ne fournira aucun avantage stratégique à l'un ou l'autre camp dans cette guerre de cent ans, mais ce fut une rude bataille qui fut oubliée, votre copiste le nain voulait rendre hommage aux belligérants quel que soit leur camp M de V

mardi 25 février 2020

La mort de J Artevelde (1345) selon J Froissart

En ce temps la régnoit en grande prospérité et puissance dans ce pays de Flandre, un Bourgeois nommé Jacques van Artevelde, il étoit au mieux dans les affaires du Roi d'Angleterre. Il promettait au monarque, Edouard III, qu'il le feroit Seigneur et Héritier des Flandres et en revêtiroit son fils, Edouard de Woodstock Prince de Galles, faisant de ce Comté un Duché !!!

De cette vision du Bourgeois, d'Albion, Edouard III à l'écluse étoit venu, vers la Saint Jean Baptiste de l'an de grâce 1345, avec grand foison de Barons et de Chevalerie, et il avoit amené avec lui son fils le prince de Galles, en raison des bonnes promesses du bourgeois

Il y eut donc plusieurs entrevues entre le roi, Artevelde, et les conseils envoyés par les différentes villes des Flandres. Mais lors du dernier parlement qui s'étoit tenu à l'écluse sur le vaisseau du roi, qui se nommoit " Catherine ", et qui étoit si gros, si grand, que c'étoit merveille à regarder

Or donc les conseils d'un commun accord avoient répondu qu'ils ne pouvaient déshériter le Comte Louis leur naturel seigneur, ni le fils de ce dernier, au profit du fils du roi d'Angleterre, quand bien même ils verroient avec plaisir le profit et l'avancement d'une telle situation.Voila bien une réponse qui n'entrait pas dans les visions du monarque et de notre Bourgeois de Gand, Jacques ou Jacob van Artevelde !!!










Ils ajoutèrent qu'il falloit pour ce faire, que toutes les communes des Flandres s'y accordassent pleinement, et que chacun d'eux alloit s'en retourner dans sa ville afin d'en parler partout aux hommes de leurs cités. Il fut dit au roi qu'ils reviendroient dans un mois, en même nombre, pour répondre à la demande du monarque et si bien à point que le roi en serait content

Edouard III et Artevelde eussent voulu que les choses allassent plus vite, mais nenni, les choses avoient été dites dans les formes et avec courtoisie. Ainsi se sépara le Parlement de l'écluse et les conseillers des bonnes villes de Flandre. Or Artevelde resta quelques temps près du roi, lui assurant qu'en faisant la tournée des villes ils arriveroient à leur but, mais la chose ne put se faire !!!

Car il eut bien grand tord de demeurer en arrière, et ne point revenir à Gand en même temps que les conseillers envoyés à ce parlement par cette fière cité !!. Quand ils furent de retour en la ville nos conseillers firent assembler grands et petits en la place du marché, et la rapportèrent dans quelle situation ils avoient été et ce que réclamait le roi Edouard III par l'entremise de Jacques van Artevelde

Or commencèrent à murmurer toutes sortes de gens contre notre bourgeois, et plus le temps passoit, pire c'étoit !!!, cette requête leur puait au nez, ils ne comprenaient pas une telle déloyauté d'un bourgeois de leur cité !!!!








Comment déshériter, le Comte Louis, leur Seigneur naturel ??, ou son fils, pour donner l'héritage à un étranger, quand bien même fut il roi d'Angleterre, et que la prospérité du commerce des Tisserands des Flandres passait par les laines Angloises !!!....et tous quittèrent la place du marché, forts mécontents et les mérangeoises échauffées, en grande haine de jacques van Artevelde !!!

Voyez comment les choses adviennent, dit Jéhan Froissart, car s'il fut allé tout premièrement à Gand, avant que d'aller à Ypres et Bruges exposer les affaires d'Edouard d'Angleterre !!!!, il aurait tant dit et tant fait, qu'il aurait pu les convaincre, mais il se fiait trop à sa prospérité et à sa grandeur, mais à Gand plus le temps passait plus les esprits s'échauffaient

Le jour ou notre bourgeois à Gand entra, vers l'heure de midi, ceux de la ville savaient bien qu'il étoit de retour et s'étoient assemblés dans la rue qu'il devoit emprunter pour rejoindre l'hôtel qui étoit son foyer !!, dès qu'ils le virent la populace se mit à gronder et à se mettre trois têtes sous un même chaperon  !!

Pendant qu'il chevauchait dans sa rue, Artevelde se rendoit bien compte que les gens en avoient contre lui, personne pour le saluer, ou ôter son chaperon, on lui montrait froidureuse épaule, bref on lui tournait le dos, chacun sur son chemin rentrant dans sa chacunière !!!, arrivé en son hôtel il demande à ses gens de barrer portes et fenêtres sur l'instant








Mais déjà toute la rue devant et derrière sa maison se remplissait de petites gens de métiers, son hôtel fut assailli des deux côtés et ses portes brisées par force, voyant l'assaut et comment il étoit pressé de toutes parts, il vint à une fenêtre donnant sur la rue et leur parla afin de calmer cette populace qui hurlait à ses chausses, peine perdue, ses paroles étoient comme semées au vent !!

Il essayoit alors de fuir par l'arrière de son hôtel dans une église qui jouxtait sa maison, mais il y avait bien la 400 personnes et tous cherchaient à le saisir, ainsi fut il pris et occis sans merci, celui qui donna le coup mortel étoit un Tisserand du nom de Thomas Denis, ainsi fini Jacques van Artevelde que des pauvres gens avaient élevé et que des méchants firent tomber






PS: tiré des chroniques de Jéhan Froissart Livre I chapitre XI, et bien sur quelques écarts de langage de votre copiste le nain M de V

vendredi 21 février 2020

l'émeute Normande la Harelle de Rouen en l'an 1382

Ce fut après la mort de Charles V le Sage que le peuple se soulevait pour se délivrer d'impôts écrasants dans cette France de la fin du XIV siècle, mais dans ce pays l'unité morale de la nation était bien moins avancée qu'en Albion, ou le peuple outragé par les taxes et les façons du régent, Jean de Gand, se révoltait, mettant à leur tête des hommes comme Wat Tyler, John Ball et Jack Straw, entraient dans Londres, assiégeait la Tour et faisait un grand massacre de gens dans la cité !!

En France les soulèvements restaient locaux, ils échouaient donc fatalement et n'en étaient que plus cruellement réprimés, non par la volonté de Charles VI le Fou, en ce qui concerne Rouen, mais par celle des oncles rapaces, les Ducs régents du jeune roi. Le pays souffrait trop et la conduite même des régents excusait le peuple, la cour dépensait inutilement en fêtes somptueuses et en folles expéditions les revenus des domaines !!, pourquoi alors devrait on leur donner à gaspiller les ressources de la nation ?

Ces "aides", ou impôts, levés par les régents atteignaient en premier lieu les gros Marchands Vinetiers de Rouen, et ils avaient plus que tout autre intérêt à ce qu'elles ne fussent pas perçues, ils vont donc travailler à entraver cette perception, sans pour autant se compromettre personnellement








Ce fut vraisemblablement le dimanche 23 février, en pleine cathédrale, que le curé, selon la coutume de l'époque avait lu l'ordonnance royale, et ce fut à la sortie de cet office divin, qu'un de ces marchands de vins, beau parleur, dut haranguer la foule des citadins. Il y avait la les claques dents, dignans, drapiers, et gens de pauvre étoffe, notre Bourgeois fit tout pour exciter la populace à la révolte, se gardant bien toutefois de l'y engager formellement

Sans doute notre bon gros marchand s'éclipsa après avoir laissé de quoi boire en quantité, car la chronique de Saint Denis stipule que les émeutiers étaient égarés par la boisson. Or donc on but sec et l'on tira les conclusions de la harangue du marchand

le lundi 24 février nos émeutiers, que la chronique de Pierre Cochon affuble du doux nom de " merdaille ", ces quelques 200 compagnons des métiers, qui travaillaient, comme on disait à l'époque, aux arts mécaniques, égarés par l'ivresse, déclarent que les impôts doivent être supprimés et crient Haro sur les collecteurs des dites taxes ainsi que sur le gouvernement qui les avaient ordonnées....c'était la Harelle qui commençait !!, cependant il manquait un chef à nos émeutiers avinés, afin de valider leurs actions








Ils décident de mettre à la tête de leur mouvement, le plus important Bourgeois de Rouen, Jean Legras, chef reconnu de la corporation des Drapiers, qui contre son grès ou non du se résigner à obéir à la moutonnière populace. Or donc malgré toute leur habileté les Bourgeois se trouvaient compromis, car le mouvement lancé par un marchand de vin qui c'était éclipsé, finissait par avoir à sa tête un marchand drapier !!!

On ferma les portes de la ville et l'on y monta la garde afin que personne ne put entrer ou sortir, pendant trois jours les portes restèrent closes et durant ces trois jours la " Rouvel ", cette grosse cloche de la commune ne cessa de sonner

A partir de ce moment Rouen allait devenir le théâtre de scènes ou la férocité le disputait à la bouffonnerie, car la foule avait compris que le temps était venu pour eux d'assouvir leurs rancunes, contre tous ceux qui par leurs fonctions suscitaient colère et envie !! On commença par meurtrir et tuer les officiers du roi qui percevaient les aides, puis la première colère satisfaite, on s'en prit aux bourgeois, rompirent hôtels et maisons des notables, portes fenêtres, huches et coffres, ravissant et pillant tout ce qui leur tombait sous la main








Dans cette première nuit nul ne fut à l'abri, marchands, prêtres, juifs, presteurs à usure qui se trouvaient en ville. Les bourgeois vont finir par s'armer pour protéger leurs biens et arrêter une certaine quantité de voleurs. Ceci ne mettait pas fin à l'émeute, mais tant que cette merdaille se choisissait d'autres victimes peu importait à nos bons bourgeois

Le lundi ils avaient aboli l'impôt, le mardi 25 février il fut décidé de supprimer ceux que prélevaient le clergé séculier et régulier, cette lumineuse idée avait encore été soufflée par nos Bourgeois. On alla donc détruire les lettres de rentes du chapitre des chanoines de Notre Dame, sur les revenus des halles et des moulins

Les Rouennais et surtout les bourgeois avaient un compte à régler avec l'Abbaye de Saint Ouen, leur Abbé avait montré une grande hostilité envers eux, il en avait même fait pendre un aux fourches de Bihorel, l'heure de la vengeance a sonné, et par l'entremise de la foule on fracasse leurs portes et on brûle toutes les chartes et documents de l'abbaye, voila donc nos bourgeois vengés !!

Pour reprendre le terme du chroniqueur Pierre Cochon, la merdaille avait une autre idée en tête, mais qui allait très au rebours de l'estomac de nos bons bourgeois








La foule avait décidé de s'en prendre à la petite garnison royale du château de Rouen afin de les chasser de la ville, nos finauds de Bourgeois refusèrent de participer à cette action. Ils avaient obtenus ce qu'ils voulaient, les impôts supprimés et les privilèges du clergé abolis. Ils vont laisser la foule se compromettre, se frottant d'avance les mains, d'avoir des coupables tout désignés quand il faudrait négocier avec le roi !!!

Nos émeutiers vont réussir à tuer le châtelain mais furent vivement repoussés par la troupe défendant le château, plusieurs assaillants furent tués et d'autres blessés, la révolte était bien finie, nos Bourgeois croyaient avoir cause gagnée

Ils désirèrent prendre langue avec le conseil royal au plus vite, histoire de sortir leurs marrons du feu sans trop se brûler. Ils furent gros jean comme devant, car il leur fut répondu, "dit le chroniqueur Pierre Cochon", que le roi et le régent iraient à Rouen, et d'ajouter dans son phrasé pittoresque Cauchois, que l'on saurait bien alors qui avait mangé le lard !!!!!!!!

La répression fut féroce et coûta fort cher à la ville, ses habitants et ses Bourgeois, car le régent désirait faire un exemple afin que paris et les autres villes votent les aides demandées par le conseil de régence


Nota: le nain ne saurait dire si la Milice Bourgeoise des Arbalétriers de Rouen, nommés "la Cinquantaine " (voir article 281), participèrent à la protection des Bourgeois lors de cette émeute ????


PS: documentation BNF comme il se doit ...M de V

mardi 18 février 2020

Naufrage de la Blanche Nef, en l'an de grâce 1120

Le 25 novembre 1120, un navire nommé la blanche nef, fait naufrage peu de temps après avoir quitté le port de Barfleur en Normandie, parmi les victimes (plusieurs centaines de personnes au bas mot), figurent les fils du roi Henri premier Beauclerc, surnommé ainsi parce qu'il avait fait des études. Ce qui est remarquable, voir fort rare pour l'époque, car bien peu de gens de haut lignage, ou de chevalerie en avaient fait autant

Henri premier Beauclerc est le fils cadet de Guillaume le Conquérant (voir article 87, de Rollon à Guillaume le Conquérant), il était devenu roi d'Albion en lieu et place de ses aînés, Guillaume le Roux et de son brouillon de frère Robert Courteheuse (courte cuisse)

Désespéré par la perte de Guillaume Adelin, son fils héritier, le roi va désigner pour lui succéder, sa fille Mathilde, épouse du Comte d'Anjou, Geoffroy le Bel (voir article 337, un seul trône pour deux cousins), il va s'ensuivre après la mort du monarque, deux décennies de guerres civiles

Mais que c'est il donc passé à Barfleur pour que cette nef fasse naufrage ???. En cette fin d'automne 1120, la cour du roi n'était pas pressée de retourner en Angleterre, car après seize années de manoeuvres patientes, de tractations et de négociations secrètes, le roi Henri premier Beauclerc était maître D'Albion, mais également de la Normandie !!. Vous pensez bien que la chose ne s'était pas faite toute seule, il avait bien fallu jouer des coudes, voir écraser ou bousculer quelques gêneurs !!!









On prétend même selon certaines sources, que le monarque aurait prêté la main à la disparition de ses frères, l'un ayant été hâtivement enterré sous la tour de Winchester, tandis que l'autre, Robert Courteheuse, était prisonnier à Devizes, d'ou il avait fort peu de chances de resurgir

La cour pouvait donc se permettre folâtrer un peu afin que le roi puisse profiter à loisir de sa victoire, l'ambiance était donc aux festivités. La flotte de navires à postes à Barfleur, se préparait à voguer vers Albion, emmenant en ses flancs matériels et personnels, le roi comptant être sur l'île à la fin du mois

Si Barfleur est aujourd'hui un charmant port de pêche coquet et accueillant, c'était au moyen âge le plus important port de Normandie, mais la navigation y était particulièrement difficile en raison de nombreux écueils, dont le célèbre "Quilleboeuf", baptisé ainsi par les Danois, précisons que ce dernier n'était visible qu"à marée Basse

Voila légèrement romancé, et après divers recoupements de sources, ce qui se serait passé. Au soir de ce funeste jour, le vaisseau royal et son monarque quittait lentement et avec prudence Barfleur, tandis que la Blanche Nef, ou se trouvait le Prince finissait son chargement, l'ambiance était à la fête à bord et l'on avait mis du vin en perce !!

Le breuvage monta vite à la tête de l'équipage, qui à chaque ballot qu'ils chargeaient passaient boire un godet !!!, il en allait de même pour le timonier maître du navire. Sous l'effet de la boisson ils devinrent arrogants et insultants envers quelques ecclésiastiques et Abbés encore à quai, ainsi que quelques femmes. En tout et pour tout une douzaine de personnes qui refusèrent d'embarquer, tellement l'état d'ébriété du timonier et de ses hommes était flagrant

Enfin ils levèrent l'ancre, se mirent à la rame puis à la voile, rapidement, dans l'intention manifeste de rattraper la nef royale, alors la Blanche Nef s'enfonça à vive allure dans la nuit noire, avec un équipage ayant trop tâté de la dive amphore !!!....pour aller s'éventrer à quelques encablures de Barfleur sur le Quilleboeuf



PS: voila en quelques mots comment un roi se retrouve sans héritier, seule lui reste Mathilde veuve de L'empereur d'Allemagne, à qui son père allait faire épouser Geoffroy d'Anjou M de V

jeudi 13 février 2020

Service de Dieu, service des Princes, au bas Moyen âge

L'opposition entre le service de Dieu et celui des Princes, ou si vous préférez celui d'un état, est loin de recouvrir l'opposition entre Clercs et Laïcs. Si dans les pays méditerranéens le personnel politique et administratif employé par les cités et les princes était déjà largement laïcisé au Bas Moyen âge, il n'en allait pas de même, et loin s'en faut, dans l'Europe du Nord !!

Nous trouverons deux raisons à cet état de faits : premièrement les Laïcs lettrés y étaient encore fort peu nombreux, et en second lieu, parce qu'il était commode pour le pouvoir séculier de faire appel à des Clercs dont l'église assurait la rémunération !!!!. Beaucoup de serviteurs de l'état étaient donc des ecclésiastiques, chanoines, évêques, abbés ou moines. Mais soulignons que l'église et en particulier son premier représentant, le Pape, ne paraissait pas s'opposer à cette situation !!, bien qu'elle aille à l'encontre d'anciennes interdictions canoniques, contre la pratique par des Clercs de disciplines profanes

Il semble même que du XIII au XV siècles, nos Papes aient volontiers octroyés des bénéfices ecclésiastiques à des Clercs déjà engagés aux services de différents princes et recommandés par eux. Bien sur on peut s'interroger sur les causes de cette générosité pontificale ???. L'église y voyait elle un moyen de garder une certaine influence sur les appareils d'états, ou sur ceux en train de se constituer ???. Quoi qu'il en soit on peut admettre qu'à l'évidence, l'aide ainsi octroyée, pour ainsi dire gratuitement par l'église envers un état était généreuse

Les services rendus par ces prélats étaient de plusieurs genre, il pouvait s'agir de services de nature domestique et personnel, gardant une connotation religieuse, tel que: confesseurs, chapelains, familiers, précepteurs et secrétaires de maisons, comme Jehan Froissart, secrétaire de Philippa de Hainaut, reine d'Angleterre (voir article). Ou au contraire de services relevant clairement de la sphère publique et laïque, tel que: officiers de justice, ou de finances, voir même ambassadeurs etc !!!!

La France et Albion sont les deux états ou les Clercs ont le plus longtemps tenu une place importante dans l'appareil monarchique, surtout au niveau central. En fait cette tradition de Clercs au services d'un Prince ou d'un état ne disparaîtra totalement qu'à la révolution











En Angleterre le Chancelier était presque toujours un prélat, le plus souvent l'archevêque de Canterbury, mais les services centraux de la monarchie, chancellerie, banc du roi, tribunal suprême et échiquier étaient peuplés de Clercs au moins jusqu'à la toute fin du XIV siècle

En France à l'époque du roi de fer (1285-1314), une enquête sur les personnels qui composent un milieu social, et portant sur le personnel des organes centraux du gouvernement, à la fois dans son hôtel et ses services administratifs, a montré que 273 des 1884 officiers recensés, soit 15%, étaient chanoines, à quoi il faut ajouter les évêques et les religieux non gradés du monde ecclésiastique

En fait ils représentaient plus de la moitié des notaires, secrétaires de la chancellerie, des maîtres des comptes des conseillers du parlement. Par la suite ces pourcentages baissèrent, mais lentement. Ajoutons que les chanoines utilisés par les princes de l'Europe du nord étaient principalement ceux qui possédaient des diplômes universitaires

En Italie en revanche le personnel des chancelleries, des administrations et des tribunaux a été très tôt laïcisé, c'est sans faire appel à l'église que dès 1224, Frédéric II va fonder à Naples le studium de rhétorique et de droit, qui devait former les officiers dont il avait besoin pour gouverner le royaume de Sicile

Au XIV et XV siècles les chancelleries et les tribunaux des villes italiennes sont essentiellement peuplés de secrétaires et de juges laïcs, issus soit de Bologne, ou des autres universités juridiques de la péninsule, les Clercs étaient presque systématiquement écartés des charges politiques et administratives

Même à Saint Pierre de Rome, dans l'état pontifical, on ne peut guère distinguer service de l'église et service de l'état, 19% seulement des chanoines se virent confier des charges publiques, dont 1% à peine de charges strictement laïques !!

Ce qui pourrait laisser penser que beaucoup de ces ecclésiastiques diplômés pouvaient s'expatrier dans les différents royaumes du nord de l'Europe afin d'offrir leurs services aux différents appareils gouvernementaux, mais la le nain ne fait qu'une supposition ????











L'administration centrale du royaume de France, si nous laissons de côté le conseil (organisme politique), l'hôtel du roi ( organisme domestique), ainsi que le commandement des armées, n'employait guère vers 1350 que 250 personne en tout et pour tout.

C'est à dire qu'en détaillant, accordons une centaine de personnes au parlement, puis une soixantaine à la chancellerie, et le reste dans divers services financiers et monétaires, ce chiffre n'augmentera pratiquement pas avant la fin de la guerre de cent seize ans

Il est vrai que la plupart de ces officiers, mis à part les gens des finances, chargés des aides et du trésor, méritaient fort à l'époque la qualification " d'hommes de savoir "

La quasi totalité des conseillers du parlement et des maîtres de comptes étaient licenciés ou docteurs en droit. Beaucoup de notaires et de secrétaires l'étaient aussi, ou du moins étaient ils maîtres ès arts !!

Ces personnes possédaient tous une solide culture à la fois juridique et rhétorique. De Gervais du Bus, virulent auteur du Roman de Fauvel (voir article), qui évoluait dans la sphère gouvernementale du roi de fer, vers 1314, aux premiers humanistes du temps de Charles VI le Fou, nombreux furent ces gens de chancellerie qui jouèrent un rôle important dans le développement de la littérature et de la pensée politique française






PS: cet article est tiré du livre de Jacques Verger, historien médiéviste spécialisé dans l'étude des Universités du Moyen âge " les gens de savoir en Europe à la fin du Moyen âge "...le nain n'a presque rien ajouté M de V