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mardi 26 janvier 2021

Les Espèces de l'Escarcelle au bas Moyen âge


Le terme de " Monnaie ", au Moyen âge, ne désigne presque jamais une grandeur économique et rarement la pièce de monnaie par elle même. Il s'agit d'abord d'un droit et de son exercice lucratif !. Le terme de " Monnayage ", ou " Seigneuriage ", renvoie alors au bénéfice revenant au Prince émetteur

Le monnayage est d'abord une opération technique, ou l'on prend un lingot de métal précieux, d'Or, d'Argent, d'un poids définis, qui préparé par des ouvriers, sera divisé en plusieurs " Flans ". 

Ce Flan est posé ensuite entre deux matrices gravées en creux du nom de " coins monétaires ". L'officiant que l'on nomme " Monnoyer " va frapper quelques coups de marteau provocant une déformation mécanique du Flan pour devenir une pièce de monnaie

Cette pièce porte le Sceau ou la marque de l'autorité émettrice. A cette époque l'atelier monétaire est souvent apparenté à l'officine d'un Orfèvre, mais déjà aux XIII et XIV siècles les principaux " Hôstels des Monnaies " figurent parmi les plus grandes fabriques médiévales, réunissant plus d'une centaine de monnayeurs, lesquels sont regroupés en " Serments ", bénéficiant de larges privilèges fiscaux !!







L'autorité émettrice garantit le poids et la matière de la pièce, elle a surtout l'autorité nécessaire pour faire accepter ces pièces en paiement et à leur cours comme monnaie !. Le titre, le poids et le cours de la pièce émise étaient indiqués dans des livres de réglements monétaires

Le métal précieux était parfois fourni par le Prince sous forme de vaisselles, d'objet précieux ou de monnaies anciennes. Mais le plus souvent on achetait le métal auprès des " Changeurs ", qui recueillaient les monnaies anciennes ou étrangères qui n'avaient pas cours en France. 

Le tarif d'achat du métal était généralement inférieur à la valeur du même métal à l'émission. La différence couvrait les frais de fabrication et assurait un bénéfice à l'autorité émettrice !

Toute frappe ou refrappe de numéraire en circulation constituait donc une opération lucrative. Un profit supplémentaire pouvait être obtenu en pratiquant ce que l'on nommait à l'époque le " Rognage ", c'est à dire en abaissant le poids du Flan, on pouvait aussi émettre une valeur du cours plus élevée à partir d'une même quantité de métal. Ces mutations des conditions d'émission de la monnaie ont été largement pratiquées par les Monarques, les Princes et les Hauts Barons au Bas Moyen âge 








En France c'est à partir des XIII et XIV siècles que va s'imposer " la monnaie Royale ", face aux ayant droit de Seigneuriage, soit par le volume des émissions, soit par une politique d'empiétements constants de leurs prérogatives, qui à partir de Saint Louis ( Louis IX), s'appuie sur un réglement monétaire 

Seule vont subsister les ateliers de grandes Principautés comme l'Aquitaine, la Bretagne, ou ceux implantés en terre d'Empire. On trouvera tout de même de petites seigneuries se livrant à la contrefaçon, et des Princes plus puissants qui pratiqueront le jeu des imitations affaiblies, faisant de deux pièces de monnaie, trois d'un plus faible poids par exemple !

Les Théoriciens tel Nicole Oresme, dans son " de Moneta " en 1355, vont dénoncer les abus et le principe même de ces mutations de monnaies. La stabilisation interviendra en 1360 avec la création du " Franc Or ", monnaie frappée au départ pour payer la rançon de Jean II le Bon, elle sera suivie par " l'Ecu d'Or " en 1385. Pour ce qui est de la monnaie Argent elle va connaître une crise de 1415 à 1422 et subir le plus vertigineux affaiblissement de son Histoire

Nous sommes au début d'un nouveau siècle, une période tourmentée avec à la tête du pays de France un Roi fou, des Oncles rapaces et des Anglais qui ne le sont pas moins !!!




PS: Or donc nous sommes au XV siècle et de 1400 à 1410 on parle déjà de " famine monétaire ", puis arrive la guerre civile opposant Armagnacs et Bourguignons de 1407 à 1435, elle ne pouvait tomber plus mal. Les mutations monétaires furent nombreuses et que ce soit l'Anglois, l'Armagnac ou le Bourguignon tout le monde y mettra du sien mordious !!. On nommera cela une guerre monétaire, les stocks en argent sont au plus bas. A la toute fin du moyen âge on voit apparaître comme monnaie " le Blanc "en métal allié et ses monnaies divisionnaires noires et cuivreuses...Cet article est rédigé par rapport à un texte de Marc Bompaire directeur de recherche au CNRS ..M de V


mardi 19 janvier 2021

La Fourrure dans le monde Médiéval

Nous n'évoquerons point ici le sens restreint que l'on donne à ce terme dans notre monde moderne, représentant bien souvent dans notre imaginaire, des Dindes vêtues de visons, promenant avec ostentation de petits chiens à la tronche applatie à force de courrir après des autobus en stationnement (humour) !!

Au moyen âge ce terme de " Fourrure " ( Forratura, Fodra, Futter), désigne dans le mot comme dans le verbe, en premier lieu, une garniture extérieure !!, exemple:  une " Monnaie Fourrée " représente une pièce de vil métal que l'on a recouvert d'une pellicule de matière précieuse à l'extérieur, ou encore, une " Paix Fourrée " représente une sorte de trève perverse sous des aspects attrayants !! 

Par ailleurs dans le vêtement médiéval " La Fourrure " qui double intérieurement ou extérieurement un habit est bien souvent de drap pour l'intérieur et d'un tissu décoratif pour l'extérieur. Les peaux d'animaux surtout les fortes et lourdes, de cuir avec ou sans poils sont généralement portées seules

Les peaux plus minces donnant un cuir plus fin une fois privé de sa laine sont destinés généralement pour faire le parchemin. On emploie enfin de manière générale le terme " Peau " (Pelles, pelli, Skins), pour ce qui concerne, comme de nos jours le parchemin ou les gants

     (Pour le parchemin, jusqu'au jour ou l'on redécouvre le papier fait à base de chiffons de tissus) 





Le vocabulaire spécifique aux fourrures comprend plusieurs centaines de termes dans les langues de l'occident médiéval, suivant la qualité, la couleur, l'apprêt ou l'espèce. Si nous prenons comme exemple l'Agneau, qui fournissait et de loin, les peaux les plus nombreuses destinées à la fourrure, on constate une gamme de prix très étalée en fonction de la qualité et de la provenance. Les plus demandées étaient les peaux de Barbarie, parmi lesquelles les noirs "Bougie" de Béjaïa (Algérie), puis celles de Pampelune (Navarre), viennent ensuite les peaux de "Nysse" (Turquie), ou de Romanie (Roumanie)

En terme de valeurs, prenons en exemple la seule Gabelle de la cité état de Florence, qui à la fin du XIV siècle taxe 36 qualités d'Agneaux, identifiés par leur prix et leur origine géographique entre Majorque, Catalogne, Languedoc, Rome, Ecosse, Sardaigne. Rien qu'en Provence il est fait mention d'Aix, Avignon, Arles, Tarascon, Beaucaire, Orange, Carpentras etc...Bref tout l'Occident élève des moutons et commerce les peaux les plus fines de leurs Agneaux

La plus grande partie de la production Anglaise, qui est énorme, du à un élevage immodéré aux XIV et XV siècles, est exportée vers les cités de Bruges, et Gand, en Flandre






En ce qui concerne les animaux sauvages, que les peaux soient acquises et livrées par des paysans, des Trappeurs ou des Chasseurs, elles sont le plus souvent préparées puis utilisées par les nobles, de riches Bourgeois et Marchands, ou de gros propriétaires Terriens. La Faune fournissant des Pelleteries très fines et vendues fort chères, Renard, Fouine, Marte, Putois, Blaireau, Lièvre, Ecureuil, Genette, Chats sauvages, Loirs et Loups cervier (Lynx) etc... 

La forêt occidentale est fortement défrichée et humanisée aux XIV et XV siècles, mais si l'on gagne le Nord et l'Est, dans la Taïga ou la Toundra on obtient les espèces reines par leur rareté et leur finesse, leur prix est bien sur au niveau du prestige de les porter !!!. Prenons en exemple l'Ecureuil changeant (Vair) au dos gris bleuté, et au ventre Blanc (menu Vair), il est un des luxes de l'occident quand il provient de pays aux hivers plus rudes et plus longs, Romanie, Suéde, Finlande, Hongrie, Bulgarie etc ...

Cela dit sur les dix siècles de l'époque médiévale il y eut des variations qualitatives et Quantitatives, soit par phénomène de mode, raréfaction de certaines espèces ou difficulté d'approvisionnement. La consommation évolue en fonction des marchés de mieux en mieux organisés, luxe grandissant dans les cours royales, Princières et Ducales, chez les Seigneurs, les Clercs et les Bourgeois, ainsi qu'une certaine catégorie de Paysans riches






On peut d'ailleurs commencer à chiffrer l'ampleur de la consommation occidentale dans le courant du XIII siècle, par les foires de Champagne, mais surtout grâce aux premiers comptes de l'Hostellerie des maisons Royales qui ont été conservés. On constate que les dépenses de l'hostellerie de Saint Louis en fourrure dépasse souvent celles pour le Drap

Même chose chez les Angevins de Naples, ou le roi d'Angleterre qui consomme en trois ans 119300 écureuils, 3200 agneaux et 66 hermines !. Bon ne jettons pas la pierre hein !!!...on fait pas mieux maintenant voir pire !!!!! 

Dès le début du XIV siècle en épluchant les séries de chiffres de tels comptes d'Hostelleries, Royales, Papales, Grands seigneurs, riches Bourgeois et Marchands, nos historiens sont en mesure de cerner les modalités d'une consomationn dépendant des types de vêtements, de la nature des peaux, de leur prix, des milieux socioculturels qui les utilisent

Mais aussi de l'époque, de l'endroit, des modes, elles même influencées par les variations de la production, de l'industrie ou des courants commerciaux


PS: sur un texte de Robert Delort, historien médiéviste qui s'intéresse particulièrement aux relations entretenues par l'homme avec les animaux ....Heuuuu pas reluisant le bilan M de V


jeudi 7 janvier 2021

Le tissu de l'infamie au bas Moyen âge

Parlons de choses qui fâchent en ce début d'année !!. Il existait un élément vestimentaire qui excitait au plus haut point le populaire dans cette fin de moyen âge, je parle du tissu rayé !, qu'il soit en bandes horizontales, verticales ou voir même en diagonales, peu importe mordious !!, c'est en peu de mots l'étoffe du Diable

Nous allons pour notre édification nous appuyer sur l'excellent livre d'un historien médiéviste que l'on ne présente plus Michel Pastoureau (l'étoffe du diable). Notre histoire commence lors du retour malheureux de croisade du Roy Louis IX, dit Saint Louis 

Le monarque ramène dans ses bagages, en 1254, un certain nombre de religieux, des nouveaux venus en France, de l'ordre de Notre Dame du Carmel, en Palestine. C'est par eux que le scandale arrive, car ces frères en Christ portent tous un manteau rayé horreur !!!!!

Nos Carmes font partis des ordres mendiants comme les Dominicains et les Franciscains. On ne sait pas grand chose sur leur vêtement quand à la forme et la couleur, brune, fauve, grise ou noire ??, peu importe morbleu !!, le manteau était rayé de deux couleurs sacrilège !, engeance malfaisante !, mécréants démoniaques !!!!! 






Il faut savoir que dans la culture médiévale le manteau a valeur de symbole, voir d'une sorte d'investiture, que ce soit religieux, militaire ou corporatif dans les guildes de métiers, et que toute remise de celui ci est plus ou moins lié à un rite de passage, à l'entrée dans un ordre nouveau !!

Dès leur arrivée à Paris nos Carmes vont manger chaud !!, ils sont victimes de moqueries, d'injures par le populaire. On les montre du doigt, les tournant en dérision, les surnommant "Les Frères Barrés". Cette expression est franchement péjorative car elle désigne en ancien Français, non seulement les rayures, mais surtout les différentes marques de bâtardise !! (sens conservé en héraldique dans la science des blasons)

Paris n'a pas eut le monopole des quolibets, les Carmes nouvellement installés subirent partout la même chose, en Albion, Italie, de l'autre côté du Rhin, en Provence et vallée du Rhône. Parfois même le geste est joint à la parole avec violences physiques...Bref on casse du Carme partout en Europe !!!

Bon on peu pas dire que nous faisons mieux maintenant que ce soit au sujet du look vestimentaire des personnes nécessiteuses ou sur les questions de religion hein !!!!, faudrait voir à pas se voiler la face les gens !!!!! 






En 1260 le scandale atteint une telle ampleur que le pape Alexandre IV demande expressément à ces religieux du Carmel de porter un un manteau uni. mais ils vont refuser et cette polémique va durer un quart de siècle !!. Jusqu'à ce que Boniface VIII, en 1295, dans une Bulle promulguée à cet effet rappele solennellement l'interdiction absolue aux religieux de tous ordres de porter un vêtement rayé !

Dès avant l'an mille l'image occidentale a pris l'habitude de réserver un statut péjoratif à la rayure du vêtement. A partir du milieu du XIII siècle, la liste des personnages mauvais, donc considérés comme en dehors de la bonne société, et qui sont ainsi vêtus, s'allonge considérablement.

Aux traîtres affublés de rayures dans les miniatures de la Bible, s'ajoutent ceux des textes naratifs, tel un traître comme Ganelon dans la chanson de Roland, ainsi qu'une quantité non négligeable d'exclus et de réprouvés de toutes conditions 

Que ce soit sur l'image ou dans la rue sont ainsi souvent signalés, par un vêtement rayé, tous ceux qui se placent en dehors de l'ordre social, soit en raison d'une condamnation ( faussaires, parjures, criminels), soit en raison d'une infirmité ( Lépreux, Cagots, Simples d'esprit ou fous). Ajoutons aussi ceux qui exercent une activité inférieure ( Valets, servantes), ou un métier infamant ( Jongleurs, Prostituées, Bourreaux) 


Foutre Diantre !! le nain allait oublier d'adjoindre les rayures pour trois métiers dont on se méfie !!, voir même que ceux qui les pratiquent sont honnis !!. Je parle en premier lieu des Forgerons, qui bien que l'on ne puisse s'en passer, sont considérés plus ou moins comme sorciers par la populace !!

Puis c'est les Bouchers dont on a peur et qui sont considérés comme des sanguinaires...mais bon y faut bien manger hein, alors on leur prend quand même leurs viandes hein !!!. Pour finir par le plus mal aimé de tous le meunier et le Boulanger, considérés comme voleurs et affameurs de la populace, trichants sur le poid du pain et le volume des farines. On ne saurait terminer cet article sans évoquer ceux qui ne sont pas ou plus chrétiens (juifs, Musulmans et Hérétiques), tous transgressent l'ordre social du bien pensant médiéval

PS: finalement rien ne change tout se transforme !! le nain dit toujours celui qui ne connait pas son histoire n'a pas d'avenir ....ben oui forcement on reproduit les mêmes erreurs M de V