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vendredi 21 février 2020

l'émeute Normande la Harelle de Rouen en l'an 1382

Ce fut après la mort de Charles V le Sage que le peuple se soulevait pour se délivrer d'impôts écrasants dans cette France de la fin du XIV siècle, mais dans ce pays l'unité morale de la nation était bien moins avancée qu'en Albion, ou le peuple outragé par les taxes et les façons du régent, Jean de Gand, se révoltait, mettant à leur tête des hommes comme Wat Tyler, John Ball et Jack Straw, entraient dans Londres, assiégeait la Tour et faisait un grand massacre de gens dans la cité !!

En France les soulèvements restaient locaux, ils échouaient donc fatalement et n'en étaient que plus cruellement réprimés, non par la volonté de Charles VI le Fou, en ce qui concerne Rouen, mais par celle des oncles rapaces, les Ducs régents du jeune roi. Le pays souffrait trop et la conduite même des régents excusait le peuple, la cour dépensait inutilement en fêtes somptueuses et en folles expéditions les revenus des domaines !!, pourquoi alors devrait on leur donner à gaspiller les ressources de la nation ?

Ces "aides", ou impôts, levés par les régents atteignaient en premier lieu les gros Marchands Vinetiers de Rouen, et ils avaient plus que tout autre intérêt à ce qu'elles ne fussent pas perçues, ils vont donc travailler à entraver cette perception, sans pour autant se compromettre personnellement








Ce fut vraisemblablement le dimanche 23 février, en pleine cathédrale, que le curé, selon la coutume de l'époque avait lu l'ordonnance royale, et ce fut à la sortie de cet office divin, qu'un de ces marchands de vins, beau parleur, dut haranguer la foule des citadins. Il y avait la les claques dents, dignans, drapiers, et gens de pauvre étoffe, notre Bourgeois fit tout pour exciter la populace à la révolte, se gardant bien toutefois de l'y engager formellement

Sans doute notre bon gros marchand s'éclipsa après avoir laissé de quoi boire en quantité, car la chronique de Saint Denis stipule que les émeutiers étaient égarés par la boisson. Or donc on but sec et l'on tira les conclusions de la harangue du marchand

le lundi 24 février nos émeutiers, que la chronique de Pierre Cochon affuble du doux nom de " merdaille ", ces quelques 200 compagnons des métiers, qui travaillaient, comme on disait à l'époque, aux arts mécaniques, égarés par l'ivresse, déclarent que les impôts doivent être supprimés et crient Haro sur les collecteurs des dites taxes ainsi que sur le gouvernement qui les avaient ordonnées....c'était la Harelle qui commençait !!, cependant il manquait un chef à nos émeutiers avinés, afin de valider leurs actions








Ils décident de mettre à la tête de leur mouvement, le plus important Bourgeois de Rouen, Jean Legras, chef reconnu de la corporation des Drapiers, qui contre son grès ou non du se résigner à obéir à la moutonnière populace. Or donc malgré toute leur habileté les Bourgeois se trouvaient compromis, car le mouvement lancé par un marchand de vin qui c'était éclipsé, finissait par avoir à sa tête un marchand drapier !!!

On ferma les portes de la ville et l'on y monta la garde afin que personne ne put entrer ou sortir, pendant trois jours les portes restèrent closes et durant ces trois jours la " Rouvel ", cette grosse cloche de la commune ne cessa de sonner

A partir de ce moment Rouen allait devenir le théâtre de scènes ou la férocité le disputait à la bouffonnerie, car la foule avait compris que le temps était venu pour eux d'assouvir leurs rancunes, contre tous ceux qui par leurs fonctions suscitaient colère et envie !! On commença par meurtrir et tuer les officiers du roi qui percevaient les aides, puis la première colère satisfaite, on s'en prit aux bourgeois, rompirent hôtels et maisons des notables, portes fenêtres, huches et coffres, ravissant et pillant tout ce qui leur tombait sous la main








Dans cette première nuit nul ne fut à l'abri, marchands, prêtres, juifs, presteurs à usure qui se trouvaient en ville. Les bourgeois vont finir par s'armer pour protéger leurs biens et arrêter une certaine quantité de voleurs. Ceci ne mettait pas fin à l'émeute, mais tant que cette merdaille se choisissait d'autres victimes peu importait à nos bons bourgeois

Le lundi ils avaient aboli l'impôt, le mardi 25 février il fut décidé de supprimer ceux que prélevaient le clergé séculier et régulier, cette lumineuse idée avait encore été soufflée par nos Bourgeois. On alla donc détruire les lettres de rentes du chapitre des chanoines de Notre Dame, sur les revenus des halles et des moulins

Les Rouennais et surtout les bourgeois avaient un compte à régler avec l'Abbaye de Saint Ouen, leur Abbé avait montré une grande hostilité envers eux, il en avait même fait pendre un aux fourches de Bihorel, l'heure de la vengeance a sonné, et par l'entremise de la foule on fracasse leurs portes et on brûle toutes les chartes et documents de l'abbaye, voila donc nos bourgeois vengés !!

Pour reprendre le terme du chroniqueur Pierre Cochon, la merdaille avait une autre idée en tête, mais qui allait très au rebours de l'estomac de nos bons bourgeois








La foule avait décidé de s'en prendre à la petite garnison royale du château de Rouen afin de les chasser de la ville, nos finauds de Bourgeois refusèrent de participer à cette action. Ils avaient obtenus ce qu'ils voulaient, les impôts supprimés et les privilèges du clergé abolis. Ils vont laisser la foule se compromettre, se frottant d'avance les mains, d'avoir des coupables tout désignés quand il faudrait négocier avec le roi !!!

Nos émeutiers vont réussir à tuer le châtelain mais furent vivement repoussés par la troupe défendant le château, plusieurs assaillants furent tués et d'autres blessés, la révolte était bien finie, nos Bourgeois croyaient avoir cause gagnée

Ils désirèrent prendre langue avec le conseil royal au plus vite, histoire de sortir leurs marrons du feu sans trop se brûler. Ils furent gros jean comme devant, car il leur fut répondu, "dit le chroniqueur Pierre Cochon", que le roi et le régent iraient à Rouen, et d'ajouter dans son phrasé pittoresque Cauchois, que l'on saurait bien alors qui avait mangé le lard !!!!!!!!

La répression fut féroce et coûta fort cher à la ville, ses habitants et ses Bourgeois, car le régent désirait faire un exemple afin que paris et les autres villes votent les aides demandées par le conseil de régence


Nota: le nain ne saurait dire si la Milice Bourgeoise des Arbalétriers de Rouen, nommés "la Cinquantaine " (voir article 281), participèrent à la protection des Bourgeois lors de cette émeute ????


PS: documentation BNF comme il se doit ...M de V