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dimanche 17 mars 2019

Batailles, Bannières, Pennons et Compagnie

Lorsqu'ils entreprennent de raconter les grandes batailles du XIV siècle les Chroniqueurs avaient l'habitude de présenter d'abord un aperçu général des armées qui allaient s'affronter.

Ils en indiquaient " l'Ordonnance ", pour reprendre leur expression, cette évocation était faite avec d'autant plus de soin et de précision, qu'elle était de première importance selon la conception que l'on se faisait de l'histoire à cette époque

Elles sont écrites d'abord pour la noblesse, car ces chroniques et annales devaient signaler la présence et le comportement au combat des principaux seigneurs et porteurs de blasons. Pour composer ce tableau les chroniqueurs se renseignaient auprès des témoins et des acteurs de la bataille, mais surtout auprès de ces personnes que l'on appelait Poursuivants, Hérauts et Rois d'armes, qui bien souvent furent eux même des historiens

Un manuscrit du XV siècle, sorte de manuel à l'usage des Hérauts d'armes, précise par exemple, je cite: Que si l'on vient à combastre, li héraults doivent cognoître les gonfanons des ennemis, afin de les signaler à leurs chefs, chevaliers, ou tel autre noble homme leur en faisant la demande. Ou il est dit aussi, qu'ilz devaient noter également, ceux que l'on faisait chevalier en ce jour de bataille, les mestre en mémoire et en être thesmoings !!









Toujours selon ce manuel, " les hérauts doibvent estre au plus près qu'ilz pevent, pour voir s'assembler et combastre les plus vaillans, tant d'une part que de l'autre, bien prendre garde aux blasons, et quand s'en vient la desconfiture,ilz doibvent regarder lesquels s'enfuient et en avoir mémoire. Puis quand la besoigne est faite, ilz doibvent compter et identifier les morts, du moins ceux de qualité "

Au travers de tout le XIV siècle, et même après, les récits montrent les effectifs de chaque armées répartis en grandes unités de cavalerie, appelées "Batailles ", elles étaient en nombre relativement restreint. Si l'on prend l'exemple de Poitiers en 1356, les Anglo-Gascons du Prince noir en comporte trois, en face, les Français en comptent 3, voir 4 si l'on tient considère que la formation de cavaliers groupés sous le commandement du Connétable et des deux Maréchaux comme une bataille

Ce n'est que vers la fin du XIV que l'on trouve plus fréquemment ajouté au dispositif de nos trois batailles deux ailes composées tantôt de cavaliers, d'archers ou d'arbalétriers. La présence de ces ailes plus complexe, mais aussi plus mobile. Bien sur quand on sait s'en servir !!! ce qui ne fut le cas ni de Philippe VI, ni de son fils ce benêt de Jean II le Bon

Pour ces deux rois une seule technique comptait la charge suivie de la mêlée, ces deux monarques avaient la tête farcie de romans de chevalerie, et comme le dit Froissart " ils étaient durs à ôter d'une idée, et avaient du mal à concevoir !!!!










On peut donc se poser la question, à savoir si ces batailles étaient constituées dès le début de la campagne ??? ou si elles sont l'oeuvre d'une mise en place au moment de la rencontre avec l'ennemi ???. On sait que la tactique de l'époque consistait le plus souvent en une série d'affrontements successifs, et non pas comme au XVI siècle par une charge simultanée !!

Il faut également tenir compte du fait que pour Crécy, comme pour Poitiers, l'ost Français ne poursuivait pas l'armée de Raid de Edouard III, puis du Prince Noir en armure pendant des lieues et des lieues !!!! On s'équipait puis on formait les batailles une fois en face de l'ennemi, ceux qui ont portés une armure me comprendront !!!!

Cependant si nous reprenons l'ost de 1346, pour Crécy, on trouve une dizaine de batailles !!!! du côté Français ayant combattu les unes après les autres en une succession de 15 à 16 charges chaotiques !!!. Vous allez me dire que j'insiste, mais il est fort probable que ce soit le résultat de l'incapacité de Philippe VI, pris par le temps de concevoir le regroupement des imposantes forces dont il disposait en trois grosses unités. En eut il même la volonté ???, car il désirait juste charger et se battre

Il faut porter à son crédit que le roi n'étaient pas le seul à avoir cette vision arthurienne, diront nous, du combat !!. Malheureusement les Anglais eux n'avaient pas du tout la même optique













Revenons bien plutôt à a bataille de Courtrai en 1302, un chroniqueur Flamand, Van Welthem, décrit avec précision la liste des 10 corps de cavalerie française en précisant les effectifs. Or nous savons par ailleurs que la chevalerie de Philippe IV le Bel, sous les ordres du Comte d'Artois, combattirent en trois batailles seulement, il semble donc que le comte ai formé 3 grosses batailles avant le combat

A l'intérieur de chaque bataille les combattants se rassemblaient autour de bannières et Pennons, dont le dénombrement était un moyen pour les chroniqueurs d'évaluer les effectifs. A Poitiers, la bataille du Duc d'Orléans aurait comporté 36 bannières et 200 Pennons.

Pour vous fournir une idée de la mentalité au XIV siècle, lors de la bataille de Cocherel, Arnaud de Cervoles, dit l'Archiprêtre, ne voulant pas se battre contre certains chevaliers de l'armée Anglo-Navarraise de jean III de Grailly, va se retirer mais laissera sa bannière et ses gens combattre dans l'armée de Bertrand Du Guesclin !!. Il est sur qu'à notre époque cette réaction semblerait pour le moins cavalière ??

Par contre il est certain que ce genre de comportement n'avait pas cours dans les armées Anglaises, il n'était pas concevable qu'un Chandos, qu'un Calverley ou un autre chevalier d'Albion qu'il soit routier ou non, utilise ce genre de comportement, qui reste typiquement Français !!!









Bannières et Pennons sont donc les drapeaux que l'on déployaient avant la bataille, et le fait même de les déployer était considéré en " droit d'armes ", comme le symbole de la déclaration de guerre ouverte !!!

En exemple, dans un procès au sujet d'une rançon, qui opposait devant le parlement de Paris, le Français Jean de Melun à l'Anglais Henri Poinffroit, ce dernier argumentera afin de prouver qu'il avait fait prisonnier jean de Melun en tant de guerre et non au cours d'une trêve, le fait que le Français " chevauchoit avec sa compaignie à pennons désployés ce qui estoit vraye signe de guerre entre gens d'armes "

S'il existe des bannières, nous trouvons des Bannerets pour les détenir !! On trouve dans les textes des définitions assez tardives et théoriques de ce qu'il faut entendre pas Chevalier Banneret, votre Nain copiste vous en offre une. Quant ung chevalier a longuement servy et suyvy les guerres, qu'il a terres,et qu'il puisse avoir de ses terres quantité de gentilshommes pour accompagner sa Bannière, il peut licitement lever bannière. Car nul homme ne doit porter bannière en bataille s'il n'a cinquante hommes d'armes avec archers et arbalétriers qui lui appartiennent. S'il les a il doit à la première bataille apporter un Pennon d'armes au Connétable et aux Maréchaux et requérir qu'il soit Banneret. Si ilz lui octroient, il doit appeler les hérauts d'armes pour témoignage, ceux ci doivent couper les queues du pennon, il pourra alors le porter et le lever avecques les autres bannières au dessoubz des Barons





PS: documentation BNF, pour les traductions je me suis appuyé sur un texte de Philippe Contamine ..M de V