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dimanche 3 mars 2019

Les Brodeurs au Moyen âge

Venu du fin fond des âges l'art " de l'aiguille et du fil ", a été dès le haut moyen âge un travail hautement apprécié, et des témoignages écrits existent depuis le VII siècle

Des femmes de haut rang puis des spécialistes masculins et féminins l'ont illustré, vêtements ecclésiastiques ou aristocratiques, autels et manteaux, harnachements de destriers, oriflammes, murs d'églises, de châteaux, couvertures et contrepointes, ont acquis grâce à leurs ornementation brodée et leur beauté, un prestige qui rejaillissait sur les commanditaires de ces oeuvres

Les brodeurs n'ont laissés derrière eux que peu d'information sur leur métier et leur vie, car ils travaillaient en marge des autres artisans de la société médiévale. A Londres, les brodeurs se seraient regroupés pour former une guilde au XIV siècle, mais n'auraient été dotés d'une Charte qu'au XVI siècle (1561). A Paris par contre, les brodeurs ne formeront une guilde qu'au XV siècle (1471), mais à l'inverse de nos voisins d'outre Manche, ils étaient dotés de statuts à partir du XIII siècle (1292)

Les brodeurs les plus réputés au moyen âge, en Europe, étaient ceux de Londres, suivis de près par ceux de Paris








Les quelques 200 noms d'artisans Brodeurs cités dans les statuts parisiens révèlent l'étendue de la participation masculine, dans un art qui avait été considéré longtemps comme un domaine exclusivement féminin

Il y eut sans doute des dynasties familiales d'artisans brodeurs, qui tout en dirigeant leurs ateliers transmettaient le métier de génération en génération tout en formant des apprentis. Nous ne connaissons pas la taille de ces ateliers, qui devaient varier selon le lieu d'implantation, le volume des commandes et bien sur la réputation du brodeur

Certains comptaient probablement en plus du Maître des compagnons, des valets (ouvriers), et des apprentis à différents stades de leur formation. Puis d'autres ateliers, ne comptaient que le mari et la femme, avec un apprenti, qui bien souvent était leur propre enfant

C'est à partir des statuts de 1316, que nous trouvons ajouté au nom de l'artisan celui leur femme, comme formant une équipe, Jéhan d'Argenteil et sa femme, Jacques le broudeur et sa femme, Jéhan le Fournier et sa femme ou encore Nicolas de Losanne et sa femme. nous ignorons le genre d'ouvrages qu'ils exécutaient car c'était un milieu très fermé









Mais le nom d'Etienne Chevalier apparaît souvent dans les comptes royaux de la maison de France, par exemple, en 1328, notre artisan Brodeur acheta du mobilier, après le décès de Clémence de Hongrie, veuve de Louis X le Hutin !!

Il y avait entre autre, des rideaux de lits brodés en soie bleue, des housses de coussins avec des fleurs de lys et un couvre lit en soie à motifs de dauphins orné d'une bordure aux armes de Hongrie

Cette transaction nous révèle un autre aspect de la vie professionnelle des brodeurs de métier, le rachat de biens appartenant aux grands du royaume !!!

Les statuts des brodeurs exigeaient un apprentissage de huit ans, avant de devenir valet (ouvrier), puis compagnon, un des apprentissage les plus long de l'artisanat, en raison sans doute de la complexité du métier et des différentes techniques de broderies à maîtriser

Quand un brodeur avait effectué un an et un jour chez un maître en tant que compagnon, il pouvait s'établir à son compte s'il en avait les moyens bien sur








Il était fort courant d'interdire le travail de nuit dans les différents secteurs de l'artisanat, car il était problématique de travailler dans des endroits sombres à la lueurs de bougies, surtout dans un travail de précision comme la broderie

Cependant en 1316, à la demande des artisans brodeurs, le Prévôt de Paris lève l'interdiction du travail de nuit dans leurs nouveaux statuts. Mais à certaines conditions, premièrement l'urgence d'un délai de livraison, puis en cas de grosse commande et un contrôle supplémentaire de qualité pour voir si ce travail de nuit avait été bien réalisé

Les brodeurs chevronnés des grandes cités médiévales d'Europe, en particulier Londres et Paris, travaillaient pour les rois, les grands feudataires, tel que Princes, Ducs et hauts Barons, puis les grands dignitaires de l'église, Cardinaux, évêques chanoines et abbés mitrés.

Ces personnages étaient intransigeants en matière de délai de commande et de qualité du produit fini, il n'était pas bon pour le commerce de mécontenter les grands, car c'était un peu leur pub. Il suffisait qu'un artisan travaille pour tel Prince ou tel dignitaire de l'église pour que toute la haute bourgeoisie se rue chez lui....cela n'a pas changé à notre époque !!!



PS: documentation BNF et un texte de J Le Goff ...M de V