Membres

samedi 6 mai 2017

Quelques Laboratores Ruraux au XIV siècle


Dans un précédent article nous avons parlé des arts mécaniques et de ces artisans des cités, mais la grande majorité des hommes et des femmes du moyen âge vivent dans des villages en milieu rural.

Ils pratiquent l'agriculture et l'élevage, quelques Artisans n'en sont pas moins présents pour répondre à leurs besoins quotidiens.

A l'époque la distinction entre paysan et artisan n'est pas aussi nette que de nos jours. Nombre de villageois s'adonnent à des travaux de transformation de la matière première pour leur propre compte.

Mais les véritables artisans sont ceux qui en font l'essentiel de leur activité, vendant leurs produits en ville, voire même dans d'autres régions





Le Meunier, il utilise la force de l'eau ou du vent, mais destiné tout d'abord à broyer le grain et les olives, le moulin se perfectionne et ses utilisations se diversifient, ses marteaux de pierres ou de métal le transforment en moulin à fouler pour le tissu, ou travailler le papier. Le moulin à vent est une innovation médiévale, peut être originaire d'Orient qui s'implante en Normandie et en Bretagne.

Dans les villages le meunier a mauvaise réputation, les paysans sont obligés de lui apporter leurs grains et de payer en échange une redevance au seigneur. Celle ci est payée en nature, sous la forme d'une part de la farine ( qui peut monter jusqu'au quart de la quantité de grain moulu ). La rapacité du meunier, souvent surnommé bonnet par les paysans (fonction de son costume), engendre l'hostilité des villageois envers lui.


Le forgeron, appelé Fèvre dans le nord et Fabre dans le sud, il façonne les outils indispensables à la vie agricole, socs de charrues, faux et faucilles, pelles, et bien sur il ferre les chevaux des nobles du lieu, comme ceux des paysans. Grace à l'essor économique, à partir de 1150, l'Europe voit se multiplier ces professionnels du métal. Ils oeuvrent dans une forge en forme de calotte de terre réfractaire, s'élevant au dessus d'une console ou brûle le charbon de bois fourni par les forestiers charbonniers.

On avive le foyer par des soufflets latéraux manoeuvrés à la main, et au centre de l'atelier trône l'enclume. Il ne travaille jamais seul, il lui faut l'aide d'au moins deux à trois ouvriers, apprentis ou valets. C'est un personnage local jouissant d'un grand prestige au sein de sa communauté, que l'on consulte volontiers pour un avis, qui a droit de parole devant le seigneur local. Il est bien souvent même le porte parole des ruraux devant les puissants et les nantis.

Charbonniers et Mineurs, le charbon ignoré de l'antiquité est connu au Moyen âge, il s'agit au départ de morceaux de houille ramassés sur les plages du nord de l'Angleterre et appelé pour cette raison charbon de mer. L'extraction de la houille ou charbon de terre est attestée dans ce pays depuis le X siècle, mais aussi dans les Pyrénées.


Ces mines sont le plus souvent exploitées à ciel ouvert, la houille néanmoins demeure très rare, l'essentiel du combustible reste le charbon de bois, nos charbonniers fournissent donc tout le monde, les foyers du village, le forgeron, le domaine seigneurial de l'endroit, voir même la cité la plus proche.

En exemple prenons la mine de plomb argentifère de Brandes, son activité va favoriser le développement d'une agglomération minière à 1800 mètres d'altitude, du XII au XIV siècle, pendant cette période le Denier en argent reste une référence stable de l'occident médiéval.

La production argentifère de cette mine va considérablement changer le paysage économique du Dauphiné, mais seulement sur deux siècles,elles furent abandonnées au profit de filons plus généreux. des documents fiscaux du XV siècle, nous permettent de suivre les habitants, qui après l'arrêt des mines, se reconvertissent dans l'élevage et l'agriculture.

Mais il existe un autre corps de métier très demandeur en charbon de bois, moins en vue que le forgeron et le meunier ce sont les potiers et les tuiliers. Ceux ci sont pourtant plus nombreux dans les villages du moyen âge.



Aux premiers siècles médiévaux la terre est modelée, moulée et cuite sur une aire ouverte et sans four.

Ces derniers se répandent à l'époque carolingienne ou la production se fait plus importante.

Le XIII siècle voit l'apparition de villages spécialisés dans la poterie. Il faut dire que dans les foyers toutes les cuissons se font dans des pots en terre, à fond plat, à fond arrondis ou conique, et dans des matériaux plus ou moins poreux en fonction de la cuisson et du met que l'on prépare, les cuisinières de l'époque combinait le gout d'un plat avec le pot ayant (par exemple) servi à cuire du lard, le pot alors servait d'exhausteur de gout. Lorsque ce pot avait perdu ce gout, il était cassé et on en achetait un autre.



Les potiers et tuiliers s'installent bien souvent en bordure de forêt, afin de disposer du charbon de bois, combustible incontournable et nécessaire à la cuisson de la terre.

Chez les ruraux il n'y a bien que le vannier qui n'a pas besoin de bois de chauffe, ce métier qui existe depuis la nuit des temps, fourni aussi bien les foyers que l'agriculture, la pêche et j'en passe.

Nommés encore manneliers ou mandeliers, ils sont des incontournables de la vie de tous les jours, on a même retrouvé des poteries qui avaient été moulées dans de la vannerie, qui brûlée ensuite, laissait apparaître le dessin sur le pot.

Il nous reste un artisan qui à notre avis est le plus gros consommateur de charbon de Bois, c'est un travail très spécifique et grand consommateur d'énergie, le travail du verre.



Le terme de verrier a deux sens, il désigne aussi bien le fabricant de verre, que l'artiste qui crée et peint les vitraux. Si ce dernier travaille en ville, le premier est nécessairement installé en campagne près d'une forêt ou de charbonniers, ce qui vous me direz revient au même.

L'usage du verre se répand au XIV et XV siècle, des plaques de verre remplacent au fenêtres des nobles et des nantis, les panneaux de parchemin, de papier huilé ou les panneaux en corne. Les dames désormais se contemplent dans des miroirs, et  les savants aux yeux usés par la lecture à la chandelle portent des lunettes de vue.

Dès 1320, le verre désigne les vases à boire, notre verrier utilise le sable siliceux et les cendres de bois de hêtre pour produire son verre.




Les progrès techniques comme la canne à souffler, ou la coloration avant cuisson, par immersion dans un mélange de poudre minérale accompagne l'essor de la verrerie à la fin du Moyen âge.


Si toutes les régions disposent de centres de fabrication, certaines sont plus réputées que d'autres, la Normandie et la Lorraine viennent en tête.

Quand à Venise elle est considérée comme le premier centre de la verrerie de luxe, bientôt concurrencé par la Bohême au XIV siècle M de V


La grande peste 1347/1348

Cette épidémie de Peste noire 1347/48 va se répandre dans toute l'Europe, elle arrive d'Asie centrale, elle se propage par l'entremise d'une puce. Celle ci a un vecteur le rat noir, lui même apporté dans les cales des navires Italiens revenant à leur port d'attache. (image de la peste à Nimes)

Pour Evreux plus d'un tiers de la population va disparaître, on dut se résoudre à agrandir le cimetière, car on ne pouvait plus enfouir les corps des paroissiens si ce n'est les uns sur les autres! et avant qu'ils ne tournent en pourriture, laquelle chose était abominable à voir. Ils devront même, comme le dit André Plaisse, consacrer d'autres terres en cimetières pour les moribonds de la peste et de la guerre.






Cette épidémie fera plusieurs apparitions dévastatrices au XIV siècle, 1360/61, 1366/68, 1374/75. Nulle agglomération qu'elle soit de France, d'Angleterre ou d'Allemagne ne sera épargnée par cette saignée démographique. Pour Albion ce sera catastrophique, de six millions d'âmes en 1328, la population à la fin de ce siècle tombera à deux millions d'habitants. Les gens son désemparés et la médecine ne peut rien ils n'ont pas le savoir pour endiguer un tel fléau.

 Même plus tard au XVI siècle les seules médications fournies par les docteurs en Médecine seront: l'utilisation de linges imbibés de vinaigre pour protéger les voies respiratoires, des fumigations pour assainir l'air et de mâcher des clous de girofle afin d'assainir la bouche !! ( autant dire rien)






Au plus fort de la peste meurent à Paris, environ 800 personnes par jours. Les citadins des grandes villes verront dans cette hécatombe l'expression du courroux divin. Pour conjurer ce sort commun ils vont instaurer des rites de pénitence collectives, c'est à partir de cette période que l'on voit apparaître les processions de Flagellants.

Mais il faut un coupable à la terreur de cette population, de bonnes âmes vont se charger d'accuser les Juifs, leurs prêtant des rites monstrueux, l'empoisonnement des puits et des fontaines (et j'en passe), La peste favorisera l'explosion d'un Antisémitisme latent, avivant les différents religieux et bien sur les intérêts économiques. On les pris, les massacra, ou on les brûla, après avoir confisqué tous leurs biens évidement.






Faute de pouvoir disposer de meilleurs instruments de mesure, on peut donc estimer qu'au XIV siècle, selon l'heur et le malheur des temps, la population d'Evreux passe de 5000 à 3000 habitants. Rappelons: c'était l'époque ou Paris n'avait que 61 000 feux et ou les " bonnes villes " les plus célèbres du royaume étaient des bourgades de 8000 à 15 000 habitants, sauf Rouen qui eut peut être jusqu'à 40 000 âmes.

Lesquels chiffres doivent être interprétés avec beaucoup de prudence car, dans les villes le niveau population pouvait subir dans un laps de temps très bref, des variations énormes dues autant à la mobilité qu'à l'ampleur des mortalités

La peste étonne ces hommes du XIV siècle, et pour cause, elle avait disparue depuis l'an 767. On subit d'autres épidémies, Lèpre, Rougeole, Variole, Paludisme ou Ergotisme, mais un équilibre arrive toujours à s'établir entre ces maladies et les hommes. La peste est donc totalement inconnue quand elle réapparaît.







  Ce qui a conduit certains médecins à en donner des descriptions cliniques fort utiles, à défaut de pouvoir la soigner. Guy de Chauliac, médecin du Pape en Avignon décrit cette pathologie dans son livre ( BNF sa grande chirurgie en 1363)

Ladite mortalité commença en Avignon en janvier 1348 et dura l'espace de sept mois. Elle fut de deux sortes: la première dura deux mois, avec fièvres continue et crachements de sang; et on en mourait en trois jours, la seconde fut le reste du temps, aussi avec fièvres continue, abcès et charbons aux parties externes, principalement aux aisselles et aux aines: et on en mourait dans les cinq jours

Et fut de si grande contagion, spécialement celle qui était avec des crachements de sang - que non seulement en séjournant ensemble, mais aussi en se regardant, l'un la prenait de l'autre, et en si grand nombre que les gens mouraient sans serviteurs et étaient ensevelis sans prêtre. Le père ne visitait pas le fils, ni le fils son père: la charité était morte et l'espérance abattue







PS: On peut trouver des détails hilarants, même sur des sujets aussi sérieux, jugez plutôt. La chasse aux nuisibles était importante, dans la lutte pour la salubrité publique,on ne savait pas bien sur au moyen âge que le rat était le vecteur de la peste, mais le chasseur de rat ! existait et de la nature superstitieuse des gens de cette époque naissent des pratiques pour s'en débarrasser, certaines orthodoxes comme des chats dressés ou des furets, ou d'autres moins orthodoxes!!.

Ils ont pour ce faire recours à des éléments religieux, tel que l'eau bénite par exemple, ou d'introduire de l'ail dans le rectum du rat, de le recoudre et de le laisser partir. L'animal était censé retourner parmi ses congénères, et leurs raconter ses mésaventures, ce qui devait les décourager de venir nous côtoyer à nouveau, mais cette dernière me semble fort peu pratique à exécuter.... " MDR " M de V






Nota: infos BNF, les masques de cuirs des médecins nommés becs de canards étaient conçus pour recevoir à l'intérieur une éponge mouillée au vinaigre, les médecins pensaient que celle ci  protégeait de la peste, en fait c'est la cape et le masque de cuir qui les protégeaient des piqûres des puces porteuses de la maladie !!!, deuxième info, on trouvait les " En graisseurs ", on raconte à Grenoble, qu'il existait des personnes mal intentionnées, qui allaient récupérer le pus sur des bubons de pesteux morts, pour le déposer sur les portes, poignées et serrures des portes de leurs ennemis, ceci afin de les éliminer de la surface de la terre . Lorsqu'ils étaient pris en flagrant délit on les tuait sur place, sinon c'était le bûcher pour ces malfaisants !!!







                                                             Guerre Famine et Pestilence !!!