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lundi 29 juillet 2019

La triste fin d'Enguerrand de Marigny

Les infortunes de Marigny sont navrantes, mais instructives, lors de son procès il ne fut même pas défendu et sera voué à la mort la plus ignominieuse. Nous y voyons un homme d'état d'une probité incontestable pour l'époque, livré aux aveugles rancunes de la foule, mais nous y verrons aussi les fautes d'un roi retomber, après sa mort, sur un ministre innocent !!

L'auteur de cette étude nous offre l'un des plus mémorables exemples des vicissitudes auxquelles sont soumis les hommes d'état. Il nous permet de vérifier, s'il en était besoin, cette vérité première " nolite confidere in principibus ", ne vous fiez pas aux princes !!

Enguerrand naquit en Normandie vers 1265. Sa famille est de petite noblesse, mais de noblesse ancienne longtemps connue sous le nom de Le Portier, il n'ont pris le nom de Marigny qu'au commencement du XIII siècle, à la suite de l'union de Hugo Le Portier seigneur de Rosay, avec Mahaut de Marigny.

Notre personnage fut d'abord écuyer dans la Mesnie du Sire de Bouville, pour être attaché plus tard à la Maison de la Reine de France. Jeanne de Navarre, épouse de Philippe IV le Bel, va marier Enguerrand avec sa filleule Jeanne de Saint Martin.

Ce fut ainsi qu'il entra à la cour du roi de fer, le monarque lui trouvait beaucoup d'esprit, de sagesse et d'habileté. Il va lui donner en 1298 la garde du château royal d'Issoudun, et le gratifier d'une rente sur son trésor. Voila l'origine de sa formidable ascension et de sa fortune !










Bientôt son crédit à la cour ne connut plus de bornes, et en quelques années il fut fait chevalier, Comte de Longueville, Chambellan du Roi, surintendant des finances et capitaine du Louvres !!!!

Mais pour donner une idée plus précise, contons un fait important qui marque au mieux la faveur qu'avait notre Enguerrand en cour !!. Cela se passe au début du XIV siècle, deux nobles familles normandes sont à couteaux tirés, Les Harcourt et les Tancarville. Ils étaient en procès au sujet d'un moulin, situé près de l'antique cité de Villebonne, les vassaux de la maison d'Harcourt ayant pris le moulin de vive force une petite guerre privée avait éclaté entre nos deux grandes maisons féodales !!

Vint un jour ou nos deux grands féodaux se rencontrent, le sire d'Harcourt, sans provocation préalable, tira son épée pour en frapper son rival, crevant un oeil au passage du sire de Tancarville !!!. Marigny était un ami de Tancarville, et va donc prendre fait et cause pour celui ci...!!!, tandis que le Comte Charles de Valois, ce paon bouffi d'orgueil, cet hypothètique roi de Constantinople, prend parti pour le seigneur d'Harcourt et tente de le justifier. Charles de Valois est cependant le frère du roi de fer !!.











Malgré son insistance et le fait qu'il siégeait au conseil privé, le roi Philippe IV se prononcera contre son frère et appuiera la requête de Marigny. Un combat solennel en champ clos aura lieu entre les deux grands féodaux, à la suite duquel ils vont se réconcilier

Cette affaire montre clairement comment l'influence de Marigny avait effacé, le frère du roi. Mais dès lors le Comte de Valois, brouillon notoire et fauteur de troubles était exaspéré par son échec, il va désormais tout faire pour salir Marigny, répandant mille et une calomnies contre ce dernier. Il sera un des principaux acteurs de sa chute !!!

Peu de temps après en 1306, le favori du roi  fut chargé de présider la cour de l'échiquier de Normandie se tenant à Rouen, imaginez le ressenti parmi les grands personnages de ce Duché, tel un Comte de Saint Pol, un ecclésiastique comme l'évêque de Narbonne, ou n'importe quel grand feudataire du royaume possédant des terres en Normandie!!!. Ils aspiraient tous à ce genre de position, et la déconvenue, pour eux, d'assister à la session sous la présidence de Marigny, va créer bien des haines cuites et recuites à l'encontre du Chambellan du roi !!!

Cependant le nain se dit que si à cette époque, comme le bon vin, les titres, les fonctions et les honneurs montaient vite à la tête, je pense qu'il en est toujours de même dans notre XXI siècle, or donc ne jetons pas trop vite la pierre à nos grands ancêtres !!











Si la première composante fut les ennemis qu'il se fit en servant son roi, la seconde fut celle des actes de Philippe IV le bel lui même !!. le monarque va créer des contributions, sommes à verser qui pesaient lourdement sur les seigneurs propriétaires terriens, sur les corporations de métiers d'artisans et de commerçants. Puis les Juifs furent rançonnés, les marchands étrangers aussi, et enfin les monnaies du royaume furent rognées et par le fait gravement altérées !!

Enguerrand eut le tord de prendre part à ces désastreuses mesures, et surtout de préparer la plupart des ordonnances royales du roi de fer, mais avait il vraiment le loisir de faire autrement ?????. Philippe IV avait une idée hégémonique du pouvoir qui était renforcée par ses juristes tel Pierre Flote, Nogaret ou Plaisians.

Dans le même temps notre homme amassait les honneurs, titres et terres, sa fortune était immense et le roi le comblait. Durant les années allant de 1308 à 1313, le roi donne des rentes, des droits d'usage, puis des droits de chasse, d'affouage, mais aussi des seigneuries, des près et des forêts.

Il eut cependant le malheur d'oublier sa modeste origine et d'humilier les plus grands personnages de la cour !!. Un manuscrit du Roman de Renart dit: " tant se fioit en son argent, qu'il ne prisoit nulle gent "









Le voila donc au fait de sa gloire en 1314, lorsque Philippe IV tomba gravement malade et à son chevet siégeait Enguerrand élevé au rang de premier ministre, Pierre Flote était passé et Nogaret aussi, il se demandait devant son roi moribond ce qu'il allait devenir de lui ?, il allait être servi !!

L'avènement de Louis X le Hutin, roi brouillon et colérique, entièrement sous la coupe de son oncle Charles de Valois, fut le signal d'une violente réaction contre les serviteurs du feu roi en général et de Marigny en particulier !!!!. Ce fut la curée, la haine du Valois, les rancunes du petit peuple, des artisans des commerçants, du Comte de Saint Pol ou du Chevalier de Pecquigny furent un formidable levier !!

Louis X n'avait pas les épaules, ni le courage de résister à la meute qui hurlait aux chausses de Marigny et il le fit donc arrêter. La suite est navrante, emprisonné dans la grosse tour du Louvres, il sera ensuite transféré au Temple, exposé à la vindicte populaire criant " au gibet au gibet ".

Vint alors un simulacre de procès et pas de défense, on ne lui donna même pas le droit de défendre sa cause les armes à la main contre ses détracteurs, pourtant tout accusé noble ou roturier pouvait invoquer ce droit, ce jugement de Dieu en champ clos, il faut dire que cette grosse baudruche de Valois faisait tout pour arriver à ses fins










Louis X le Hutin hésita plusieurs semaines, mais il fut condamné à être pendu aux fourches patibulaire de Montfaucon, cet édifice de maçonnerie que Marigny avait lui même fait ériger !!

Ce fut donc la que se terminera l'ascension d'Enguerrand de Marigny, par une pendaison, et même après sa mort le Valois continuera de le poursuivre de sa haine !!






PS: documentation BNF sur une étude historique de AP Simian, je vous engage à lire ce document de 40 pages qui fourmille d'informations. M de V


NOTA: Vous avez sûrement remarqué mon manque de courtoisie envers le Comte Charles de Valois, ce mangeur de charrettes ferrées, ce batteur d'estrade !!!, car il engendrera le premier roi Valois? Philippe VI, qui était comme son père, lent à comprendre et encore plus à concevoir ( comme disait Jehan Froissart), et le fils de celui ci, Jean II le bon ( que ce titre de le bon ne saurait réhabiliter !!!), un benêt notoire ayant les mêmes traits de caractère que son grand père, je persiste et je signe M de V

mercredi 24 juillet 2019

N°325) Guillaume Tirel dit Taillevent

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Le Traité de Taillevent est le plus ancien écrit culinaire Français en langue vernaculaire. Il fut plusieurs fois réimprimé depuis la fin du XV siècle, et l'on peu s'étonner du succès de l'ouvrage car il contient tant de phrases tronquées et de fautes, que jamais cuisinier, fut il le plus habile, n'aura pu mettre en pratique et avec profit les recettes de ce traité !!

On connait trois manuscrits anciens de cet ouvrage, sans compter celui mentionné dans l'inventaire du Duc de Berry. L'un se trouve à la BNF, c'est le plus ancien, le nom de l'auteur se lit sur le manuscrit et il porte la mention suivante, prouvant de manière irréfutable son existence avant 1392. Je cite: "c'est viandier fu acheté a Paris par moy, Pierre Buffaut l'an mil ccc IIII xx XII au prix de VI S Par "...lire en l'an 1392 au prix de six Sols Parisis. Il est donc incontestable que ce traité de Taillevent fut écrit au XIV siècle, on suppose à la demande de Charles V, ce monarque étant à l'origine de la Bibliothèque nationale

Mais qui estoit Taillevent son auteur ???. L'intitulé du viandier donne à Guillaume Tirel la qualité de Maistre Queux du Roy notre Sire.....oui mais lequel ???. C'est dans une pièce d'archive de 1326, nommée " Officiers des maisons de Roys, Reynes, enfants de France et Princes de sang " relative au couronnement de la Reine Jeanne d'Evreux, épouse de Charles IV le Bel (surnommé l'oison), et dernier Capétien direct, que nous voyons figurer pour la première fois le nom de Taillevent









Le futur auteur du plus ancien écrit gastronomique y est cité parmi les enfants de cuisine qui sont: Jeanin le camus, Guillaume de Recloses, Taillevent et Galerne. Nous pouvons donc envisager qu'à cette époque il avait entre 10 et 12 ans environ. Puis pendant vingt ans, de 1326 à 1346, nous perdons sa trace, il n'est plus question de lui dans aucune des différentes ordonnances compulsées ??

Ce n'est donc qu'en 1346 qu'il réapparaît au service de Philippe VI de Valois (surnommé le Roy trouvé, par les Anglois). D'enfant de cuisine de Jeanne d'Evreux nous le retrouvons Queux de Bouche du premier roi Valois !!!

En 1349, Philippe VI permet " a son amé queux de bouche Guillaume Tirel dit Taillevent et à sa femme Jeanne ", de fonder une chapelle pour leur salut et celui des leurs, avec une rente de 24 Livres sur la maison dite " Larchière ", que le couple possédait à Saint Germain en Laye§

Il y est noté également que ce don estoit fait à Guillaume Tirel en considération des bons et agréables services que le roi avoit reçu de lui. Cette chapelle familiale fut fondée au prieuré de Notre Dame d'Hennemont, se trouvant proche de Saint Germain en Laye, par Taillevent, il devait à peu de temps de la y fixer sa sépulture.

Sa femme Jeanne s'est éteinte en 1363 et il est probable que ce fut à cette époque que Tirel mis à exécution son projet. Notre grand cuisinier va ultérieurement se remarier, il trouvera chaussure à son pied en la personne de Isabeau le Chandelier

Plus tard, on ne sait pas vraiment à quelle date, Tirel fera faire une superbe pierre tombale, ou on le trouvera représenté après sa mort, les mains jointes, armé de toutes pièces entre ses deux épouses. On suppose la encore, que ce travail fut réalisé de son vivant, puisqu'il a été retrouvé des esquisses de cette dalle ???

Essayons de décrire son gisant par rapport aux esquisses, puisque c'est à peu prêt la seule chose qu'il nous reste !!!. Nos excellents révolutionnaires étant passés par la, la dalle fut brisée en de nombreux morceaux et les visages martelés. J'ai toujours exécré cette manie de nos bons Français de tout vandaliser !!










Sa tête est coiffée d'un bassinet à camail, sur le corps une cotte de maille protégeant bras et descendant à mi cuisses, par dessus il porte une cotte (visiblement de cuir), puisqu'on la voit garnie de clous, et les jambes armées de toutes pièces. Il porte en ceinture masse d'armes et dague côté gauche, et à droite se trouve son épée à laquelle est suspendu son écu à ses armes.

Nous ne connaissons pas la couleur de ses armes, mais le fascé est chargé de trois chaudrons accompagné de six roses, trois au chef  et trois en pointe deux et un. C'est tout ce que je peu en dire car je n'ai jamais trouvé un armorial ou il fut représenté en couleurs ????

Jusqu'à preuve du contraire je ne pense pas que notre Queux de Bouche ai guerroyé ???? du moins je n'en ai trouvé aucune trace, mais des découvertes sont faites tous les ans dans les archives, qui sait ????











Quatre pièces toutes datées de 1355 et en bas desquelles on trouve apposé le sceau au armes de Taillevent, nous montre que notre queux de bouche est au service du Dauphin Charles, Duc de Normandie (fils de Jean II le bon), dans la première il a le titre d'escuyer de l'hostel de monseigneur le Dauphin.

Dans une ordonnance de novembre 1360, et relative aux officiers de la maison du Dauphin (désormais Régent), il est mentionné un Tailleventer, en qualité de Queux de bouche, il y est dit qu'il aura les mêmes émoluments que l'écuyer de cuisine, lequel aura le même traitement que l'échanson

En 1361 le Dauphin donne à Taillevent son queux de bouche, cent francs Or (monnaie qui fut frappée pour payer la rançon de son père, ce benêt de Jean II le Bon), ce don est fait afin qu'il achète une maison en la ville de Paris, afin que Guillaume soit plus proche de lui pour mieux le servir

De 1361 à 1368, nous n'obtenons aucun renseignement sur Tirel, mais durant cette période Jean II le Bon est retourné en captivité en Albion, et pour y mourir !!. Le Dauphin va devenir Charles V le Sage. Taillevent continue d'exercer dans la maison du roi











En janvier 1369 le roi lui fait payer une somme assez importante, et une quittance de février nous apprend qu'il cumuloit les fonctions de queux de bouche et de sergent d'armes ???

Un mandement de 1370, nous apprend que Taillevent prêtoit au roy, pendant six semaines la somme de 67 francs Or, il sera remboursé par Nicolas Tricart, receveur des Aides, ainsi que le prouve une quittance revêtue du sceau portant les trois chaudrons et les six roses. En 1373 il est premier queux du roy et ce jusqu'en 1377

On le retrouve en 1381, ou il est écuyer de cuisine, il figure en tête de liste sur une Ordonnance, avant les queux de cuisine du roy Charles VI le Fou (pour notre malheur), la suite nous laisse à penser qu'à partir de 1388, Guillaume Tirel, devenu vieux avait résigné ses fonctions pour jouir d'un repos bien gagné




PS: documentation BNF pour les puristes reportez vous sur le livre en ligne de Jêrome Pichon et Georges Vicaire  M de V

lundi 22 juillet 2019

Ustensils et bonnes manières de table au XV siècle

Pour réunir les convives on sonnait du cor ou autrement dit " on cornait l'eau ", c'était bien sur privilège de gentilshommes comme le dit Jehan Froissart, ce que faisait donc notre hôte le Seigneur de Craon. Cette sonnerie indiquait aux convives qu'ils devaient se laver les mains, la chose était indispensable !!!

Chez les gentilshommes un page ou un serviteur voir un écuyer selon le rang, ou la maison, présentait la serviette, l'aiguière et le bassin. On se servait d'eau aromatisée à la sauge, la camomille, le romarin, l'écorce d'orange, mais les eaux de roses et d'iris étaient en grande faveur.

Mains lavées on se présentait à table, on faisait siéger les hôtes selon leurs rangs plus ou moins prêt du chef de table, lieu ou se trouve le seigneur du lieu.

Puis un Chapelain ou un enfant récitait le " benidicité ", ensuite seront placées les salières, les cousteaux, cuillers sur la table, viendra en second le pain qui sera suivi par les viandes préparées de diverses manières. A l'entre mets arriveront les menestrieux avec leurs instruments et leurs tours afin d'esbaudir l'assistance

Ensuite on renouvelle vins et viandes, puis à la fin on apporte le dessert ou le fruit, ce qui n'était pas d'usage partout (comme nous l'avons vu dans l'article précédent). Quand le dîner est accompli on se lave à nouveau les mains et l'on rend grâce à Dieu et à son hôte !!

On remarque que les assiettes étaient peu connues au XV siècle et que pour les mets solides l'on servait toujours sur des tranchoirs. Ces épais morceaux de pain bis, qui imprégnés de sauces, finissaient selon le rang des maisons, dans les estomacs des convives, des serviteurs, voir des animaux de compagnie. Pour les mets liquides on les buvaient dans des écuelles, ou même à plusieurs dans le même récipient à l'aide du cuiller !!









La fourche à manger reste un objet de luxe en or ou en argent avec un manche, par exemple Charles V le Sage en possédait neuf, son fils Charles VI le fou trois, nous n'en trouvons pas trace dans l'inventaire du seigneur de Craon, elle est inconnue aussi de la riche bourgeoisie. Du reste bien souvent celle ci ne servait qu'à manger les fruits !

Or donc au XV siècle du Roi au manant tous mettaient la main au plat, tous mangeaient avec leurs doigts, après que les viandes furent tranchées sommairement, soit par un écuyer ou un serviteur selon le rang auquel vous apparteniez. Les gens raffinés ne devaient prendre les morceaux qu'avec trois doigts. Il était interdit par l'usage de prendre ses viandes à deux mains et de ronger les os avec les dents, ou de déscharner avec les ongles, mais on pouvait proprement les racler et amasser la chair avec le couteau.

Nous ne devons pas pour autant en conclure qu'il y avait abondance de cousteaux sur la table de votre hôte, selon G de Calviac on se servait de trois ou quatre couteaux en fontion du nombre d'invités, et sans faire de difficulté de le prendre, de le demander ou le passer à quiconque en avait besoin

Il n'était pas convenable de lécher ses doigts ou de les essuyer sur son pourpoint, on utilisait pour ce faire la nappe ou les serviettes qu'un serviteur passait aux convives. On en changeait fort souvent pendant le repas et l'on était soumis à l'impérieuse nécessité de se laver les mains avant et après la moindre collation









Nous avons parlé des assiettes ou écuelles, des cuillers, cousteaux et fourches à manger, traitons maintenant la question des verres. Nos aïeux avaient également réduit le service de table à sa plus simple expression, et si l'on se rapporte aux seuls inventaires, sources de précieux renseignements , nous serions en droit de croire que les vases à boire étaient innombrables !!

En 1309 la maison du roi achète en une seule fois à Thiébaut, orfèvre de son état, 34 hanaps, puis en 1316 en fait faire 61. Charles V le Sage, selon un inventaire fait après sa mort possédait 14 hanaps d'or et 177 d'argent, mais ces récipeients servaient ils vraiment à boire ????? rien n'est moins sur.

Sur trois gravures sur bois du XV siècle représentant divers festins, servis à des rois, ou des grands seigneurs (puisque les plats étaient couverts), on constate au mieux, et ce dans les trois cas, que le hanap est partagé par deux ou trois convives. Vous pouvez d'ailleurs le constater vous même lors de vos recherche sur les enluminures

Quand aux Pots, brocs, flacons et bouteilles de cuir ou d'argent, ils se trouvaient sur les buffets que des serviteurs allaient prendre pour servir à boire, et ils y allaient souvent car si nos pères avaient de robustes appétits, c'étaient également de rudes buveurs, même si le vin de cette époque était moins fort à leur époque !!!! Les récipients en verre étaient fort rares et particulièrement onéreux









Un certain cérémonial était d'usage pour ce qui concerne la boisson et l'utilisation du hanap, car lorsque l'on boit à plusieurs dans un verre commun, le savoir vivre exige quelques recommandations: d'abord de vider sa bouche avant de boire, de l'essuyer, ainsi que le bord du hanap avant de s'abreuver, si ce dernier n'est pas trop lourd le tenir à trois doigts comme pour les victuailles, Puis il faut le vider entièrement afin qu'il puisse ensuite servir à son plus proche voisin de table.

Quand on buvait à la santé de quelqu'un on utilisait le terme " pléger " et l'on plégeait fort souvent dans la joie comme dans la peine ou la douleur !! je ne voudrait pas me répéter mais nos aïeux étaient de rudes buveurs et buveuses, car n'oublions pas nos nobles Dames !!!!!









PS: en trois article votre nain copiste a essayé d'exposer la vie les us et coutumes d'un grand seigneur du XV siècle, ce en vous fournissant des renseignements sur divers points de son existence, mais comme l'auteur j'ai laissé de côté tout ce qui se rapporte à la vie publique du seigneur de Craon. Les documents utilisés sont consultable sur la BNF


Pour information veillez à votre ligne pour ne pas finir comme le personnage de cette enluminure à caractère humoristique que je vous baille à titre d'exemple en bas de page de cet article et le nain vous plége tous en levant son hanap M de










dimanche 21 juillet 2019

Quelques recherches sur le repas au XV siècle

L'inventaire que nous avons donné dans l'article précédent au sujet de la cuisine, semble bien sommaire pour un cuisinier de notre époque !! Par malheur le Duc de la Tremoille ne nous a fourni aucun menu de ses ancêtres (voir article, intérieur d'un grand seigneur au XV siècle).

Essayons de combler cette lacune, et pour ce faire utilisons les données de A L Franklin, fournissant de précieux renseignements sur la vie domestique, empruntons donc gaillardement à cet auteur ce qui a rapport à l'époque qui nous occupe, c'est à dire le XV siècle !!

Toutes les cuisines étaient semblables, elles ne différaient que par le nombre d'ustensiles et de cheminées. Ainsi dans une cuisine royale, elles ne renfermeront que plus de poêles, poêlons, chaudières et chaudrons que celle de Georges de la Tremoille, si ce n'est 4 grills, 2 lèchefrites, passoires et autres mortiers

Les viandes et le poisson étaient rôtis ou bouillis, l'art du Queue de Bouche ne se manifestait que par la variété de ses sauces. Et quelles sauces !!!!!, l'amour des épices et leurs mélanges incroyables étaient poussés aux dernières limites

Mais fournissons un exemple afin de marquer les esprits en ce qui concerne les quantités en stock dans les différentes maisons










Prenons la liste de l'inventaire de la maison de Jeanne d'Evreux après sa mort, elle est significative !!. Trois balles d'amandes, 6 livres de poivre noir, 23 livres de gingembre, 13 livres de cannelle, 5 livres de graines de paradis (grande cardamome), 3 livres de girofles, 1 livre de safran, 1 livre de poivre long (beaucoup plus onéreux), 1 quarteyron de macis (coque de la muscade), 1 quarteyron de fleur de cannelle, 3 quarteyrons d'espies (fleur de la grande lavande), 5 livres de sucre commun et 20 livres de sucre fin, énorme !!! Pour info le quarteyron représentait 26 livres au poids !!!!

Parmi toutes ces épices si chères et si rares, donc si précieuses, venant de contrées reculées de l'Orient, de Ceylan, des Moluques, dont à l'époque on ignorait jusqu'au nom !!!, on ne voit pas figurer un condiment spécifique à la France, et qui se trouve être l'orgueil de la gastronomie Française actuelle ????, nous voulons parler de la Truffe, et cependant elle était déjà appréciée. Ceci fut une découverte parmi tant d'autres de Siméon Luce

Car si l'on en croit d'aucuns notre truffe n'aurait été connue qu'à la fin du XVI siècle !!!. Or en dépouillant les registres de la comptabilité de jean Duc de Berry, frère de notre monarque Charles V le Sage, il trouva de nombreuse pièces prouvant que le Duc savait apprécier ce savoureux tubercule !!. La truffe aura même un détracteur réputé en la personne du poète Eustache Deschamps (voir article), qui attaque avec acrimonie le précieux tubercule !!









Puis un Tirrel dit Taillevent, l'auteur du Viandier, qui nous donne quelques recettes !, voyons celle de son brouet d'Allemagne : prenez oeufs frits dans l'huile, puis prenez amandes que vous pelez et pilez, ensuite émincez des oignons que vous ferez frire. Prenez les ensemble et faites chauffer dans un bouillon de viandes. Pendant ce temps broyez ensemble gingembre, cannelle, girofle et un peu de safran en mortier, puis le mouiller de verjus.

Il vous faut ensuite mettre votre préparation d'épices dans votre bouillon, celui ci doit être liant et pas trop jaune. Vous me direz qu'à lire comme cela, il semble simple de réaliser cette recette ????...mais à déguster !!!!!!!!

Le Ménagier de Paris nous fourni lui d'utiles indications sur les moeurs du commencement du XV siècle, il nous dresse un menu de dîner à quatre services. Nous n'en donnerons pas la longue énumération, mais remarquons seulement l'abondance des rôtis, des poissons, et des pâtés !!!, l'absence pratiquement systématique de légumes et de fruits, sans compter la rareté des plats de desserts

Nous signalerons cependant quelques plats étranges comme le Brouet d'Allemagne dont nous avons parlé plus haut, de l'arbaloustre qui nous est totalement inconnue ???, la rosée de lapereaux et d'oiselets, le lait lardé (mélange d'oeufs de lard et de lait frits ensemble) Mais rien que pour le plaisir des papilles donnons la recette d'un met très recherché à cette époque, je veux parler du Chapon à la Doline !!










Après avoir fait cuire le chapon ( qui selon certaines sources était préalablement bouilli avant d'être rôti), faisons griller du pain blanc, que nous tremperons ensuite dans un vin fort et vermeil, puis prenons oignons que nous ferons frire dans du saindoux, nous passerons ensuite le tout à l'étamine (passoire). Ajoutons les incontournables épices chères à nos grands ancêtres, cannelle, muscade, clous de girofle, sucre et un peu de sel. Après avoir porté à ébullition notre mixture nous la verserons sur notre chapon

Je vous passe les queues de sanglier, le blanc manger, et tous les rôtis de chairs de venaison et pâtés de boeuf, puis les poissons, pâtés de poissons, tourtes et autre rissolles de brêmes ou de saumon, lamproies, tanches, plies et anguilles !!!!

Ce que mangeaient nos pères nous ne pouvons vraiment le concevoir, mais il semble que les anémiés devaient être à cette époque fort rares (du moins pour une certaine catégorie de la population). Il fallait manger pour satisfaire son appétit en premier lieu (il semble qu'il n'était pas mince), mais il fallait aussi manger en quantité parce que le savoir vivre l'exigeait !!!

J'en veux pour preuve la curieuse raison que donne l'auteur de ce fort long poème du " Castoiement ", sorte d'instruction que donne le père à son fils, le titre entier en est " Li castoiement que li pères ensaigne a son fils "








Dans le texte le fils demande à son père " quand je suis à table chez un hôte, dois je manger peu ou beaucoup ?? "...et le vieil homme de répondre "mange le plus que tu pourras, car si tu est chez un ami il en sera ravi, et si tu est chez un ennemi il en sera déconfit !!!!! "



PS: comme d'habitude la documentation provient de la BNF, et je ne remercierait jamais assez ces gens de mettre en ligne cette documentation M de V

jeudi 18 juillet 2019

Un intérieur de grand Seigneur au XV siècle

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Le Baron de Watteville nous dit : Dans ces temps reculés nous ne les voyons que bardés de fer, casques en tête, brandissant leur épée, il faut un effort d'imagination, moi le premier, pour nous rappeler qu'ils n'étaient pas sans cesse flamberge en main, et qu'ils vivaient eux aussi une vie ordinaire, dormant, buvant et mangeant comme nous, et si ce n'est mieux du moins plus que nous. Voyons à travers les propos de l'auteur les détails de cette existence intime !!!

Il prend pour exemple un grand serviteur du roi Louis XI, il se nommait Georges de la Trémoille, c'était le second fils de cet autre Georges de la Tremoille qui fut premier ministre de Charles VII. C'est à dire un cadet de famille et non pas l'héritier direct du nom et des armes de la maison

Cependant ce cadet, serviteur du royaume occupa de hautes fonctions, sans pour autant mener la vie princière d'un aîné de grande maison. Il va devenir Sire de Craon, Comte de Ligny et sera successivement gouverneur de Touraine, puis de Champagne, et de Brie, du Barrois, et après la mort du Téméraire gouverneur des deux Bourgognes

L'auteur prend sources sur deux documents, le Chartrier de Thouars, et les archives d'un serviteur de Louis XI, tous deux sont dus au Duc Louis de la Tremoille, qui puisa dans les archives de sa maison, nous nous bornerons à commenter celles qui peuvent nous donner un aperçu du train de maison d'un grand seigneur au XV siècle









Ce fut au château de Liney que notre personnage mourra en 1481, l'inventaire de ses biens dressé en septembre de la même année va nous faire connaître l'importance du château et la façon dont il était meublé. De cette demeure seigneuriale il ne reste aucun vestige, il était pour l'époque de moyenne grandeur, comprenant tout de même outre la chapelle 14 ou 15 pièces, chambres, salles et cuisine.

Sur toutes ces pièces six seulement étaient des pièces à feu dont les deux grosses à chenets de la cuisine, pour les cinq restantes, trois se trouvaient dans le logement privé du sire de Craon. Cette sorte de suite seigneuriale était succinctement meublée, car le luxe de cette époque se constituait surtout dans la somptuosité des vêtements, des armes et des bijoux. Quand aux meubles on se bornait au strict nécessaire

Le logement du maître de maison se composait comme suit, une première chambre avec un lit de duvet, une table, un banc, un buffet et une couchette, car il était d'usage de faire coucher dans la chambre un serviteur de confiance, cette pièce était visiblement réservée pour les hôtes de qualité, le superflu était représenté par six belles pièces de tapisseries ouvrées sur les murs et au sol et d'un ciel de lit garni de rideaux verts, puis bien sur les deux landiers pour la cheminée (chenets en fer forgé)

Passons maintenant à la chambre du maître des lieux, qui dans une certaine mesure était plus simple encore, se composant des mêmes éléments que la précédente, tapisseries comprises, mais n'avait pas de buffet








Ce meuble était remplacé par la troisième pièce de sa suite seigneuriale, elle aussi équipée de cheminée. C'était la garde robe ou l'on conservait vêtements et pièces de tissus, elle n'avait pas de tapisserie, mais deux grandes tables à tréteaux pour couper et coudre les vêtements confectionnés au château, et deux chaires percées (les deux seules de la demeure)

L'armement général du domaine, en sachant que chaque homme d'armes, du sergent en passant par l'écuyer ou l'archer était propriétaire de ses armes, se composait comme suit : six arbalètes à arcs d'acier, entreposées dans la garde robe du seigneur, puis trois arbalestres à cranequin, une serpentine (petit canon à charges creuses), et 17 haquebouthes, arme nouvelle venant d'Allemagne, qu'ils nommaient Hack busse, d'ou notre mot ensuite d'arquebuse.

Cet armement se trouvait dans la salle basse ou mangeaient les gentilshommes, le château de Liney au fond de sa province n'a rien qui puisse rappeler les magnificences princières ou royales.

Si l'ameublement de monseigneur de Craon, Comte de Ligny est aussi simple, je vous laisse juger de celui des pièces ou logeaient les gentilshommes, la soldatesque et le personnel de sa maison !!!









Mais passons à la cuisine en commençant par la batterie qui se composait comme suit: trois grandes poêles d'airain, une chaudière à quatre anses, un grand chaudron, deux grands et deux petits pots en cuivre munis de pieds, sept broches de fer à rostir, deux rostisseuses, huit grands et huit petits plats en étain, vingt écuelles en étain, et bien sur deux gros chenets pour une imposante cheminée. On peu constater l'absence d'argenterie dans la vaisselle qui était pourtant un des grands luxe de cette époque !!

Mais ou le luxe et la magnificence apparaît ce sont dans les dépenses somptuaires chez le Tailleur !!, d'octobre 1467 à avril 1470, nous trouvons pour le sire de Craon 12 pourpoints de Damas ou de Satin, noirs, gris, violets ou cramoisi. Puis des jacquettes de satin, sorte de pourpoint que l'on portait sous la robe ou sous l'armure, suivent dix robes de velours violet, cramoisi, gris ou noir et presque toute doublées de Taffetas ou de Satin.

On trouve également deux Hoquetons (vêtement plus militaire que civil, puis deux cornettes (camail à capuchon), pouvant couvrir une grande partie du visage. Presque toujours le seigneur fourni l'étoffe et le tailleur ne fait payer que la façon et son déplacement. Il faut ajouter que l'usage voulait que deux fois l'an en février et en octobre, les gentilshommes, la soldatesque et les gens de maison, fussent habillés par leur seigneur. Le tailleur fournissait donc vêtements de velours, de satin ou de futaine, les premiers étant réservés aux officiers, et aux hommes d'armes de la maison





PS: pour les puristes je vous enjoint d'aller sur le site de la BNF afin de lire ce document d'une quarantaine de pages afin d'en retirer plus de renseignements M de V