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mercredi 2 septembre 2020

N°360) J-Fournier La fin de l'épopée (dite) Cathare

C'est au moment ou prit fin la vaine tentative de Peire Authié (Pierre Autier),pour assurer la survie du catharisme et ou dans le même temps s'achevait la triste épopée de Bélibaste (dernier bon homme ou "Parfait", cathare occitan connu), brûlé vif en 1321 à Villerouge Termenès, que la machine inquisitoriale allait se mettre en place

Ce fut à l'initiative d'une personnalité d'exception de l'époque médiévale, le nouvel évêque de Pamiers Jacques Fournier. Ce dernier est né d'une famille modeste à Saverdun vers 1280, son oncle maternel, Amaud Novelli, un Bénédictin, le fit entrer dans son ordre et lui fit suivre des études de Théologie à Paris

Cet oncle s'était fait remarquer pour ses qualités intellectuelles et morales, il fut élu Abbé de l'Abbaye de Fontfroide en 1297. Mais lorsque Bertrand de Goth, en 1305, fut élu Pape, par l'entremise de Philippe IV le Bel, sous le nom de Clément V, notre nouveau Pape s'empresse de donner une majorité Française au Sacré Collège et va s'installer en Avignon, en 1309

Amaud Novelli quitte Fontfroide pour Avignon ou le Pape le nomme vice Chancelier de la Curie et Cardinal de Saint Prisque en 1310. Il va faire en sorte que son neveu lui succéde à l'Abbatiat de Fontfroide, Jacques Fournier assumera cette charge pendant six ans. 

Notre Abbé, Maître en Théologie sera nommé évêque de Pamiers en mars 1317, quelques mois avant la mort de son oncle, il était bien loin de se douter qu'il serait élu Pape 17 ans plus tard en lieu et place de Jean XXII (Jacques Duèze), remarquable théologien et canoniste

Notre évêque considérait qu'il devait avant tout porter ses efforts à l'ntérieur de son diocèse, sur l'éradication de l'hérésie, homme de décision il mit rapidement en place un tribunal qui siègera 370 journées sur une période de six ans allant de 1318 à 1325, installé à Pamiers mais parcourant aussi les villages du diocèse et entendant de nombreux témoins

Il instruisit ainsi pas moins de 98 procès. Notre évêque était assisté de Gaillard de Pomiès délégué par l'inquisition de Carcassonne, avec une dizaine d'assesseurs, de notaires et de scribes, qui rédigèrent les comptes rendus d'audience, un énorme rouleau compresseur judiciaire de l'époque qui fulminait l'excommunication à tout va !!!!







Cet ecclésiastique de haute stature au visage rougeaud, à la voie sonore, était un fouineur implacable (voir article sur Montaillou), Jacques Fournier fera preuve d'un incroyable zèle, 418 prévenus et 160 témoins comparurent à Pamiers et dans d'autres localités de son diocèse. 

C'était en majorité de petites gens, convoqués par l'intermédiaire des curés de paroisses, arrêtés et convoyés par les Bayles des châteaux environnants en général à la suite de dénonciations

Les intéressés étaient interrogés et traqués jusqu'au tréfonds de leurs souvenirs et des secrets de leurs consciences. La détention préventive se faisait dans des conditions très rudes. la menace de l'excommunication finissait par avoir raison de ces malheureux acculés à relater des faits remontant à plusieurs années en arrière

En exemple: une certaine Béatrice de Planissoles fut conduite à évoquer un fait survenu dans le courant d'un mois d'août ...26 ans avant sa mise en détention !!!. Nous sommes à la toute fin de l'épopée Cathare ou il est pratiquement acquis qu'il n'y avait plus recours à la torture avant les procès, l'inquisition était parfaitement rôdée. 

Un moine inquisiteur comme Bernardo Gui (Guidoni), avait écrit le manuel de l'inquisition "le livre des sentences" , il constitue la mémoire de ces événements

Les fautes de moindre importance se traduisaient par l'obligation d'effectuer un ou plusieurs pélerinages vers différents lieux de culte tel que Rome, saint Jaques de Compostelle, Canterbury ou Cologne. Le passage d'outre mer vers la terre sainte était réservé aux puissants, seuls capables de dépenser autant de pécunes pour un tel voyage !!!!

Il faut bien avouer que ceux la s'en tiraient à bon compte, et à tout prendre il valait mieux partir et se faire oublier le temps d'un pélerinage, plutôt que de rester à portée des griffes de la sainte inquisition !!!. Pour les fautes plus graves les punitions étaient privatives de liberté voir mortelles







Les autres sanctions se divisaient comme suit: d'abord "le murus largus", grande cellule ou l'on enfermait plusieurs prisonniers qui bénéficiaient de possibilités de promenades périodiques intra muros, puis "le murus strictissimus", une cellule pour deux ou l'on était enchainé au mur, il va sans dire que dans les deux cas le confort était précaire !!!

Puis on trouvait le port de signes d'infamie (voir article), plus particulièrement réservé à ceux qui bénéficiaient d'une remise de peine du "murus largus", ou du "murus strictissimus", le plus souvent des croix cousues sur les vêtements devant et derrière, mais qui devaient être réparées lorsqu'elles étaient usées !!!

En cette fin d'épopée cathare se pratiquait toujours la confiscation de biens, il n'y a pas de petits profits !!!, ainsi que la destruction des maisons ou avaient vécu des hérétiques. Il y eut aussi en cette fin d'époque, mais en moins grand nombre, des gens livrés au bras séculier avec peine de mort par les flammes, bûcher que l'église laissait à la justice civile le soin d'allumer

Dans les années 1320 il y eut encore 5 condamnations à la crémation, nous allions vers les derniers bûchers cathares, ces victimes avaient soit refusé d'abjurer, ou de demander le pardon, ces derniers croyants portaient sans doute en eux une foi aussi inébranlable que celle de leurs prédécesseurs 




PS: Jacques Fournier s'éteint en avril 1342 après avoir passé 7 ans sur le trône de Saint Pierre. Bien qu'il fut considéré par beaucoup comme moins virulent que les autres inquisiteurs, il ne semble pas que ceux qui ont échappé aux mailles de ses filets puissent être plein de mansuétude à son sujet ?? .....M de V