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mardi 30 mai 2017

N°60) Albion la vie nomade suite 3

Le soir venu tous ces voyageurs quel que soient leurs condition, cherchaient un abri pour la nuit et qui tant que faire se peut offrait le gite et le couvert.

Fort souvent ils logent à l'abbaye ou au couvent le plus proche, l'hospitalité est un devoir chez les religieux. Pour s'en persuader il suffit de relire Froissart pour constater la fréquence de cet usage, tant pour les nobles, les marchands, les messagers et les pauvres.

On offrait aussi l'hospitalité dans les châteaux et les manoirs, les seigneurs avaient entre eux des liens de fraternités plus étroits que ceux qui existent de nos jours entre gens d'une même classe, au moyen âge on accueillait ses égaux non  par charité mais par politesse.

Or donc, connu ou pas le chevalier voyageant et surpris par la tombée du jours aux abords d'une demeure seigneuriale avait fort peu de chance de se voir refuser l'entrée. C'était en même temps pour ce seigneur en milieu rural, une heureuse diversion à la monotonie des jours.






Pour un marchand  ou un pauvre, il sera hébergé dans la salle commune, une fois les tables du repas retirées sur des paillasses posées sur la jonchée du sol il dormira, le chevalier logera à l'étage chez le seigneur. mais quel que soit la condition le gite et le couvert étaient offerts.

Les Auberges communes que l'on trouvaient sur les routes les plus fréquentées, ou aux carrefour de plusieurs chemins étaient faites pour la classe moyenne. Marchands, colporteurs, vendeurs d'indulgences, petits propriétaires ou soldats de passage.





On y trouvait des lits placés en une même pièce, en certain nombre selon la taille de l'auberge. Les provisions de bouches étaient vendues à part du prix de la nuit, on pouvait avant tout avoir du pain, des soupes roboratives, un peu de viande en poulets et chapons.

Au vu des documents de l'époque les lits pour la nuit n'étaient pas chers de 1 penny la nuit ou 1 penny pour deux nuits, selon la classe de l'auberge, mais il faut penser à sa chandelle l'aubergiste n'en fourni pas.






Il arrivait que des voyageurs amènent avec qu'eux leur nourriture, mais peu fréquent car c'était un supplément de charge, surtout pour ceux qui allaient à pied.

On peut se demander quel était le niveau d'hygiène dans ces auberges et ce devait être un souci pour le voyageur aussi, car il fallait partager sa couche. Il est fréquent que le client potentiel demande à l'aubergiste s'il y avait puces, poils ou vermines dans son auberge,

Et notre aubergiste de répondre invariablement, pour ne pas perdre sa pratique, qu'il se faisait fort de le bien loger !! Lui assurant bon souper, lit de paille fraîche et bonne Godale (bière) parfumée au genièvre, avec piment et clous de girofle. Cela devait donner des dialogues savoureux à entendre!!.





Il était fréquent en Albion que l'on boive sa bière en route, mais pas seulement dans les auberges que l'on croisait sur le chemin. Sur les routes fréquentées, le plus souvent aux carrefours, il y avait des maisons basses ou l'on vendait à boire, ce que l'on appellerait chez nous des gargotes !

En Albion c'est " Ale house ", visible de loin car la coutume voulait qu'elles soient reconnaissables à la longue perche qui fixée sur le mur partait à l'horizontale au dessus du chemin étendant à son bout sa touffe de feuillage, signalant le débit de boisson.






Ce qui posait polémique, car la mode voulait que ce soit a qui aurait la plus grosse (je parle de la perche bien sur), qui trop lourde arrachait la façade et pouvait tomber sur le voyageur malchanceux!! ou qui avait la plus longue, et alors ce pouvait être le pauvre cavalier qui par manque d'attention pouvait fort bien se retrouver cul par dessus tête sur le chemin.

Vous me direz que pour le coup, il avait besoin d'une bonne bière pour se remettre. Il existe des décrets royaux essayant de réglementer ce problème de perche des débits de boissons.

On pouvait y assister à des discussions sans fin, de larges rasades englouties, maintenaient un niveau hautement philosophique, qui se  terminait invariablement par des arguments frappants du genre bourres pifs et coups de pieds de par le cul !! Dans ces Tavernes on y voyait aussi le paysan, qui buvait et qui l'ivresse aidant se mettait à jouer, perdant le soir plus qu'il n'avait gagné dans sa journée !!






D'autres maisons isolées au bord des routes avaient des rapports constants avec les voyageurs. c'étaient celles des Ermites . En ce siècle ils ne cherchaient guère la solitude

Les vrais jeûnant, se mortifiant, et consumés par l'amour du divin étaient forts rares!! il nous reste donc à parler des autres ils étaient légion. Habitants des cottages construits aux endroits les plus fréquentés des grands chemins, mais suffisamment délabrés pour donner une crédibilité, ou au coin d'un pont  en piteux état qu'ils étaient sensés réparer en faisant oeuvre pieuse.

Ils vivaient de la charité des passants et des voyageurs qui donnaient volontiers un quart de penny, ils abritaient sous un habit respectable une vie qui ne l'était pas. Au fond de son cottage cet être malfaisant pouvait mener une vie assez douce comparée à celle des autres qui était si dure!!! La charité des passants était suffisante pour le faire vivre sans travail et sans contraintes.






Sous les yeux de l'ermite établi au bord des routes d'Angleterre qui se préparait par une vie sans trouble à l'éternité bienheureuse, coulait le flot des voyageurs,

Tous ces errants, ces nomades d'Albion, rongés par le soleil, rongés par les soucis, lui ne les voyait pas !!!







PS: combien de ces faux ermites, de ces faux prophètes entretenons nous dans notre siècle, voila une question qui devrait nous ramener à une certaine humilité je pense.  à bientôt pour la suite M de V

Albion la vie nomade suite 2

Les Princes et la noblesse: ils voyageaient à cheval, mais aussi en voitures, selon l'âge et la condition, certaines dames étaient à cheval, comme d'autres préféraient la voiture. Les plus belles " je parle des voitures, bien sur! "à quatre roues sur deux essieux, étaient sculptées vers le moyeu, tirées par trois ou quatre chevaux, on trouve, sur l'un d'eux un postillon monté et armé d'un fouet à plusieurs lanières.

De solides poutres peintes reposaient sur les essieux, soutenant le cadre,sur lequel s'élevait une voûte en forme de tunnel, l'ensemble comme les essieux était peint sculpté et cloué a souhait. L'ensemble était rustique, mais l'élégance des détails était du plus bel effet ( voir exemple article I )

Les bancs garnis de coussins brodés, ou le voyageur pouvait languir en position demi couché, avec de plus gros disposés aux quatre coins, on suppose pour amortir les cahots de la route. L'intérieur tendu d'éblouissantes tapisseries finissaient cette décoration ostentatoire. C'est dans ce genre de véhicules que languissaient les dames de la cour, adulée par les chevaliers en côte hardie, chevauchant à leurs côtés.




 Posséder une voiture pareille était un luxe!, que dans les grandes familles on se léguait par testament. Quand on sait pour vous donner un ordre de valeur, qu'un boeuf coûtait treize shillings et cinq pences de l'époque, ce type de véhicule représentait un troupeau de 1600 boeufs.

Il n'y avait pas d'endroit en Albion ou l'aspect du cortège royal ne fut connu, les voyages de la cour étant incessants, ils ne passaient pas plus d'un mois au même endroit.

Imaginez la taille du convoi sur ces chemins défoncés!!! d'autant que pour vous dérouter, j'ajoute, que la ou se rend le roi, tout l'appareil de justice le suit, mais également tout une faune d'individus peu recommandables, des gens de sacs et de cordes, qui suivent les princes et la cour afin de glaner ce qu'ils peuvent.




Volant  et assassinant au besoin!, cette engeance gravite autour du pouvoir depuis que le monde existe, ils ne contribuaient pas, loin s'en faut à rendre populaire  dans le pays le prochain passage du cortège royal.

Juges Shériffs et Baillis: En Angleterre la Justice est nomade, les magistrats de Londres se rendaient dans les Comtés, comme les shériffs et les baillis dans les bourgs de leurs districts, ils parcouraient en tout sens le pays pour redresser les tors.

Les tournées des shériffs et des baillis devaient avoir lieu deux fois l'an, à leur passage on convoquait les jurés, pour traiter les cas de vol, d'assassinat, d'incendie, de rapt, de sorcellerie, d'apostasie, vagabondage et bien sur les destruction de ponts et de chaussées.

De leurs côtés les juges errants passaient en revue dans les Comtés, les articles de la couronne. La fréquence de leur passage était de 4 fois l'an, et c'est en pleine cour comtale qu'ils siégeaient, car ils en avaient la présidence, pour les crimes et délits et surtout les infractions aux statuts de la couronne. En exemple: tel grand seigneur qui aurait emprisonné arbitrairement des voyageurs passant sur ses terres (ben voyons,.... comme ils sont taquins ces nobles!!!!!).




Moines, abbés et autres ecclésiastiques: lorsqu'ils sortaient de leur Abbaye, Monastère, ou même Cathédrale, ces gens d'église modifiaient volontiers leur apparence, il devenait difficile dès lors de les distinguer des gens de la noblesse. Bien sur, pas tous évidement, mais ceux qui occupaient des fonctions importantes au sein de leur ordre, ou du chapitre de leur cathédrale le pouvaient.

Chaucer donne une description amusante des habits du moine mondain, mais les conciles sont plus virulents et vont beaucoup plus loin que la satyre du poète. Celui de Londres en 1342 les fustigent leur reprochant de porter des vêtements dignes de chevaliers, à revers de fourrure ou de soie, portant ceintures de prix et bourses dorées.

Reprochant encore à ces ecclésiastiques, " ces fashion victimes ",d'avoir barbes longues et bagues aux doigts, portant au côté des couteaux semblables à des épées. En un mot commençant, tout le luxe des grands de ce monde, les défenses les plus sévères leurs sont faites pour l'avenir.




Mais les évêques n'étaient pas mieux, quelle large vie  menaient ces prélats..!!!, entretenant bon an  mal an une quarantaine de personne autour d'eux, tranchant fort de la noblesse dont ils étaient tous issus.

Ecuyers et fauconniers, pages et valets, clercs de sa chapelle, charretiers et gens d'écuries, cuisiniers et gâtes sauces, et bien sur des messagers.

Il faut dire qu'ils étaient forts riches, possédant beaux manoirs, entourés de grasses terres, et possédant de lucratifs moulins à grains, l'ensemble appartenant à l'évêché. Ce riche prélat quand il voyage se déplace comme le roi avec sa cour, ses chariots de bagages, des écuyers et les fauconniers, et ses gardes.

Il tenait son rang comme seigneur de l'église, propriétaire de vastes domaines, entouré de serviteurs et bien sur de ses familiers.




Tous ces personnages que nous avons cités plus haut, sont gens de condition, on peut dire la partie aristocratique dirigeante d'Albion, et cette partie de la société anglaise et pratiquement la seule à savoir lire et écrire, exception faite de la grande bourgeoisie dont était issu Chaucer.

Il faut donc à cette société dirigeante, des messagers et des courriers, familiers des routes d'Albion et grands connaisseurs des chemins de traverse.





Si les pauvres attendaient l'occasion d'un voyage, la visite d'un ami ou le passage d'un membre de la famille pour pratiquer l'échange oral d'informations, il n'en va pas de même pour les riches et les puissants.

Ces courriers ou messagers, qui avaient pour mission de porter partout en Albion et voir même dans toute l'Europe les lettres et missives, n'étaient pas gens ordinaires. Ils devaient être capables de faire face à toutes situations, avoir l'esprit d'initiative, savoir se défendre, et avoir une connaissance approfondie des chemins et de la géographie des lieux de destination.

Prenons le Roi Edouard III, il entretenait à titre fixe douze messagers ( fort bien payés au demeurant) qui le suivait partout, ils étaient prêts au départ à tout instant, de jour comme de nuit, afin de porter en tous lieux la correspondance royale.

Mais de ces missions il s'en trouvait de fort peu ragoûtantes, voir même répugnantes!!! Quand il chargeait quelqu'un de porter dans ses bonnes villes d'Angleterre, des quartiers de cadavres appartenant à un supplicié pour trahison. Dans ce cas ce n'était plus en tant que simple messager que se faisait cette livraison (passez moi l'expression !! ), il représentait la justice royale! il était accompagné d'une escorte portant bannière royale.





De tous les voyageurs le messager est le plus rapide, c'était avant tout un excellent cavalier, habile aux armes, et sachant se tirer d'embarras dans les auberge et sur les chemins.

De plus ils avaient le privilège de passer à travers champs, même parmi les blés!!, sans qu'on eut le droit de les arrêter et de leur prendre argent de leur bourse en guise d'amende ou de dédommagement.

Malheur à quiconque s'avisait de les arrêter, car pour peu que l'expéditeur fut puissant, les amendes pour retards causés à leurs messagers pouvaient atteindre des sommes colossales. Citons pour exemple ce benêt de Constable, qui eut l'idée saugrenue d'emprisonner le messager de la reine !!!!, l'amende pour mépris envers sa souveraine se montera à 10 000 livres Sterlings, mais il lui fallut donner 2000 de plus au messager à titre de dédommagement.

Petite prime: Edouard III, donne quarante Marcs de rente à vie, au Messager de Philippa de Hainaut, sa Reine, quand il vint lui annoncer officiellement, la naissance du Prince de Galles (le prince Noir)


PS: comme quoi rien ne change quand on s'attaque aux puissants!!!, suite bientôt M de V