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mercredi 14 juin 2017

N°70) Philippe IV le Bel - Le Roi de Fer 1268/1314

Philippe IV le Bel monte sur le trône du royaume de France à l'âge de 17 ans, à la mort de son père Philippe III le Hardi le 5 octobre 1285.


En cette fin de siècle le royaume de France apparaît alors au sommet de sa puissance, il est le plus peuplé de la chrétienté entre 14 et 16 millions d'âmes, ce qui correspond au tiers de la population latine. Au début de son règne le pays connait une grande prospérité économique, extension maximum de défrichements, et les foires de Champagne sont à leur apogée.


Le pouvoir monarchique de Philippe IV entouré de ses conseillers instruits en droit " les légistes " tels que Flote, Nogaret, Plaisians, fait de ce gouvernement le premier état moderne et centralisé d'Europe.






Pourtant ce décor optimiste, comme une peinture vieillie se craquelle, les nombreuses dévaluations de la monnaie, le déclin des foires de Champagne de nos pieds poudreux, qui sont concurrencées des le début du XIV siècle par le commerce maritime direct des Italiens, puis l'énorme montée en puissance de la ligue Hanséatique. Avec juste après sa mort la grande famine de 1315 à 1317.

Il échoue à établir des impôts directs, et sera impuissant à établir une administration efficace, épine dorsale de tout gouvernement.







mort à la bataille de Courtrai en 1302
mort à Courtrai en 1302
Une série de procès et de scandales politiques et privés entourent la personne de ce roi d'un halo troublant. Le procès de l'Evêque de Troyes Guichard, accusé d'avoir fait mourir la Reine par sorcellerie.

Le procès de l'Evêque de Pamiers Bernard Saisset, qui bien que mérité va aggraver les relations du roi avec la papauté et Boniface VIII.

Le procès très controversé des chevaliers de l'ordre des Templiers, qui furent éradiqués par des moyens iniques     ( voir article sur la fin de l'ordre du temple ) .

Puis bien sur l'emprisonnement des brus du Roi de Fer et l'exécution particulièrement raffinée des frères Philippe et Gauthier d'Aulnay, les amants de marguerite et Blanche de Bourgogne, les épouses de Louis le Hutin et de Charles son frère








Ce roi reste une énigme, fut il l'instigateur de la politique française moderne de cette période du bas moyen âge, ou un simple instrument dans les mains de ses conseillers? si l'on suit les chroniqueurs de ce temps, hostiles aux aspects fiscaux et monétaires de cette politique, ils font de Philippe IV le Bel un souverain mal conseillé.

Mais c'est une idée reçue de la littérature historique ou tous les souverains sont mal conseillés!!, car en creusant on entrevoit un monarque qui n'a plus rien à voir avec ce moyen âge féodal classique, que son frère le pompeux Charles Comte de Valois nommait le  " bon temps " leitmotiv de cette époque qui était de déplorer les détériorations survenues depuis le temps de Saint louis

On pressent avec ce roi d'un nouveau type, une autre époque qui s'annonce, avec cette modernité, qui est le signe avant coureur de ce que seront les avancées sociales et technologiques du XIV siècle.








Roi pieux et réputé tel malgré ses démêlés avec le pape, ce que nul ne tenait à cette époque comme un signe d'impiété, ce roi vouait une grande vénération à son grand père Louis IX, dont il obtient la canonisation par le pape Boniface VIII avant leur querelle.

Pour ce qui est de trancher dans les rapports entre ce roi et ses conseillers, reportons nous au procès de Bernard Saisset , lorsqu'il fut dit que    " le roi ferait mieux de siéger au conseil plutôt que de chasser, laissant par la même ses conseillers commettre des injustices! "




C'est Guillaume de Nogaret qui laisse transparaître la vérité, disant du roi en 1310 " il craignait toujours de mal se comporter envers dieu et envers les hommes s'il n'avait pas pris de sages décisions après en avoir délibéré avec son conseil ". En cela il suffit de relire les mémoires de Joinville sur la vie de Saint Louis pour comprendre que Philippe IV était comme son grand père épris de justice. Comme le dit J Favier, " la politique du roi fut la politique de ses conseillers! ce qui demeure c'est le discernement avec lequel il les choisit, l'esprit novateur avec lequel il les imposa et la constance avec laquelle il les soutint "







Suivant la coutume de ses prédécesseurs il constitua des apanages en faveur de son frères, Charles de Valois " le brouillon ", de son demi frère Louis d'Evreux " le sage " et de ses deux autres fils Philippe Comte de Poitiers " fin politique " et Charles Comte de la marche " l'Oison ou le benêt ".

Le problème le plus difficile était celui des finances, Philippe ne pouvait plus gouverner avec les seules ressources du domaine royal, même avec les taxations sur les Vassaux (domaniales), sur les Paysans (taille), sur le Clergé (décimes), ou des villes (subsides), il tentera sans succès d'établir une imposition  directe régulière.







 les confiscations de biens au détriment de groupes considérés étrangers vont continuer, ces spoliations de biens s'accompagnent d'expulsions collectives.

 Ce fut le cas des Juifs, 100 000 environ au cours de l'année 1306, mais aussi les Lombards, 1277, 1291, 1311, ces marchands Italiens  jouaient cependant un rôle important dans le grand commerce, jusque dans les finances royales, exemple les frères Biccio et Musciato Guidi de Franzesi, Banquier et conseillers du roi en matière monétaire.






Parmi l'éventail de moyens utilisables dans le domaine de la finance, le roi et ses conseillers recoururent à plusieurs reprises à des altérations de la monnaie 1295, 1296, 1303, 1305. Ces mesures de déflations dommageables pour tous étaient plus gravement ressenties par le petit peuple.

Les difficultés financières vont obliger le roi à convoquer des assemblées de délégués de la nation, afin de le soutenir en paroles et en subsides, il est le premier à convoquer ensemble les représentants des trois ordres, noblesse, clergé et bourgeoisie urbaine (premières assemblées nationales 1302 1314).

Par ces consultations dépendantes du bon vouloir royal et par de vaste campagnes d'opinion, par l'action étendue des agents royaux, le roi et ses conseillers contribuèrent à la création d'une opinion publique nationale.

Une des causes de l'échec du gouvernement de Philippe IV le bel en matières d'impôts, fut l'impuissance de son administration à en fixer l'assiette. étant incapable de connaitre le nombre et la richesse des gens peuplant le pays, renseignements indispensables à la gestion du royaume. Les gens capables qui possédaient  ces compétences préfèrent, de loin,  les carrières privées, bien plus lucratives que le service du roi !! Il ne faut pas pour autant forcer le trait, l'administration était en pleine réformation.







Baillis, sénéchaux et leurs agents sont de plus en plus nombreux, choisis en dehors de la région qu'ils administrent et assignés à résidence dans leurs circonscriptions, la laïcisation des conseillers royaux s'accélère, les gardes des sceaux sont des laïcs, le conseil secret est composé de Juristes.

Quelques nobles sont proches du roi, le connétable Gaucher de Châtillon et surtout Enguerrand de Marigny, issu de petite noblesse du Vexin Normand, à la fin du règne de Philippe IV dirigea les finances aussi bien que les affaires extérieures.







Avec le pape Boniface VIII 1295 1309 les relations étaient tendues mais viables, elles avaient des hauts et des bas, mais elles se maintenaient, mais les sollicitations financières du roi de France de plus en plus pressantes faites à l'église de France se heurtaient aux mêmes sollicitations de la part des finances pontificales.

La rigidité des juristes du conseil du roi et les maladresses du pape et de la curie du Vatican vont amener une crise grave, (voir article attentat d'Anagni et Nogaret)









Le 13 octobre 1307 il fait arrêter tous les Templiers de France, pour des motifs qui ne sont pas clairs, et les hypothèses sont légion (voir article sur la fin de l'ordre du temple)

Il dut harceler le pape Clément V pour obtenir la suppression de l'ordre dans toute la chrétienté, ce pape qu'il avait fait lui même et qu'il avait installé en Avignon.


Ce sera d'ailleurs peut être sa plus grande victoire, le pape à portée des pressions et des influences Françaises.

Comme le dit J LE GOFF, cette situation allait se prolonger sur trois quart de siècle, valoir un surcroît de puissance à la France, mais au fil du temps s'en va préparant le grand Schisme qui se révélera être une victoire à la Pyrrhus.

Ce règne est aussi la première manifestation d'une évolution politique l'expression de la raison d'état.