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jeudi 24 mai 2018

Vols, Traitrises et Pillages en Sarladais au XIV siècle

Sinistre personnage que ce Gilbert de Domme, descendant d'une des plus vieilles famille du Périgord, il était d'un tempérament vindicatif qui le portait à méconnaître ses devoirs de Sénéchal et son orgueil l'empêchait de faire amende honorable de ses multiples méfaits dans la région !

Doté d'une ambition dévorante, il sut mettre à profit toutes les occasions que la fortune lui offrait. Ce seigneur local prisait fort les chevauchées et le pillage, ne dédaignait pas non plus le métier de voleur de grand chemin ! Notre homme était plus guidé par la soif de rapines que par le goût du lucre, puisqu'il dissipa un riche patrimoine pour mourir dans la plus profonde misère.

Mais de tous ses défauts, il en est un qui ne peut être porté à son crédit, ce n'était pas un pleutre et il avait du courage à revendre, à tel point que le chroniqueur Jehan Froissart lui rend justice dans ses livres.

Selon les documents et les actes écrits, il est nommé Gilbert, Gilibert ou Gisbert de Domme, Seigneur de Vitrac, il est à l'origine de bien des méfaits en Périgord.

Gilbert était l'homme le plus redouté des Sarladais, celui qui pendant la guerre de cent ans leur fit le plus de mal, il désirait ardemment à la faveur de ce long conflit se tailler une principauté dans la région et ne reculait devant rien pour atteindre son but.








On le vit, au gré de ses intérêts et selon le hasard des circonstances ou le bénéfice espéré, rallier tantôt un parti Anglais, tantôt un parti Français, se retournant le lendemain contre ses alliés de la veille. Versatile il ne montre aucun respect pour la parole donnée, prêt à toutes les trahisons, de plus violent et sanguinaire.

Mais portons à son crédit qu'il était loin d'être le seul spécimen du genre à cette époque !!! Je me propose donc de vous conter un méfait de cet escalabreux personnage, ainsi que le déroulement de l'opération!


Plantons le décor: Il y avait un fort situé sur un roc qui surplombait à pic la Dordogne. Ce fort de Vitrac appartenait à Gilbert, mais il était commandé par Raynaud Donadei, membre d'une famille Sarladaise jusqu'alors très honorable et qui avait même donné un consul à la cité.

Mais le Raynaud avait oublié les traditions d'honnêteté de ses ancêtres, valeur qui pour lui équivalait au souvenir de ses premières chausses ! Il considérait la guerre comme une entreprise lucrative, transformant le fort en repaire de brigands ou Français et Anglais confondus venaient cacher le fruit de leurs rapines. Comme quoi qui se ressemblent s'assemblent, ils faisaient une belle paire, le Gilbert et lui !!!!








 Notre quidam avait deux parents, Bertrand et Sicard Donadei, qui se trouvaient être marchands dans la ville de Sarlat. Ces deux tristes sires étaient également ses complices, ils pratiquaient le recèle, se rendant tous les jours au fort de Vitrac et revenaient en ville pour écouler la marchandise volée !!! (décidément cette famille avait bien changé!!)

Cela donne des idées à Gilbert de Domme !, il connaissait bien sur les agissements de nos trois ruffians, et l'on peu même supposer qu'il prélevait sa part de ce marché lucratif. Il décide d'utiliser les deux marchands afin de se saisir par surprise de la ville de Sarlat. Nos deux compères intéressés au bénéfice s'apprêtent à trahir leur cité.

Puis il utilise Raynaud Donadei qui grâce à ses contacts va lui servir d'intermédiaire avec les capitaines Anglais des environs, un plan et une opération militaire vont être mis au point pour investir la ville.

Il fut convenu que par une nuit obscure de l'an 1358, ils dirigeraient leurs troupes par petits groupes, vers un point de rassemblement nommé Saint Nicolas, ou ils attendraient le signal de marcher sur la ville, puis de placer un petit groupe d'hommes à l'aplomb de la muraille de la ville, que nos deux marchands aideraient à entrer dans la cité à l'aide de cordes.








Nos deux traîtres devaient cette nuit la monter sur le mur de la ville, avertir les hommes cachés à l'extérieur dans l'ombre du mur d'enceinte, puis de les aider à monter, ensuite d'aller avec eux jusqu'à la porte de la grande Rigaudie, tuer les gardes et faire entrer les troupes qui attendaient à Saint Nicolas !!!

C'eut été un massacre, la ville surprise en pleine nuit était perdue et une épouvantable scène de meurtres de pillages et de viols aurait été perpétré !!!

Heureusement le piège fut découvert et les Donadei dénoncés aux Consuls de la ville, ils vont avouer leur crime après un interrogatoire rigoureux. De nos deux malfaisants un du moins, Bernard, eut de la chance car il mourut en prison, pour Sicard ça craint !!!!



Le deuxième est condamné par les Consuls à être noyé !, le 12 février 1359 il fut cousu vivant dans un sac et en présence des habitants venus assister au châtiment il fut jeté dans le ruisseau. Spectacle édifiant pour tous ceux qui auraient dans l'idée de trahir la ville !!, que de voir le Sicard en proie aux affres de l'agonie, poussant cris et gémissements et tentant par de violents soubresauts d'échapper à la mort. Gilbert de Domme ayant perdu cette occasion de prendre la cité se vengea sur la région M de V




Nota: Les Consuls de Sarlat vont même aller jusqu'à faire prêter serment de fidélité sur l'autel de l'église aux citoyens de la ville, qui juraient d'être loyaux et de lutter avec courage contre l'ennemi et de dénoncer aux Consuls tout officier ou citoyen traîtres à leur pays, ou s'ils s'apercevaient qu'une entente secrète existât entre eux et les Anglais !!!

Les Troubadours Aimeric de Sarlat et Elias Cairels

Une précision s'impose avant de commencer cet article sur des artistes médiévaux. Les Trouvères sont au nord, les Troubadours au sud, respectivement de langue d'Oil et langue d'Oc, ils sont Poètes, chanteurs auteurs et interprètes !!! 

Quand aux Menestrels, ce sont des musiciens, conteurs, jongleurs et acteurs de soties et de petites pièces de théâtre, ils colportent les oeuvres des Troubadours et des Trouvères, le nain en a ras le bol des gens qui confondent tout et n'importe quoi !!!!!!

Bien cela étant dit parlons du sud, la croisade des Albigeois, fut pour l'Aquitaine et le sud ouest en général, cause de décadence et de ruine, la civilisation auparavant y était brillante et les arts et les lettres y étaient cultivés avec le plus grand succès.







C'était le florissant pays des troubadours, des jongleurs et conteurs, bien sur il le resta après cette fâcheuse croisade, mais la liberté était perdue et sans liberté la source d'inspiration, si elle ne se tarie point du moins son débit en est amoindri !!! Les Troubadours étaient nombreux dans le sud ouest avant cette époque, parmi eux on distinguait au tout début du XIII siècle deux Sarladais, Elias Cairels et Aimeric de Sarlat

Aimeric à ses débuts exerçait la profession de menuisier, doté de finesse d'esprit, d'imagination, ce personnage spirituel et plein d'entrain possédait les qualités de l'humeur Gasconne et Périgourdine. Rien dans son atelier ne pouvait combler son appétit de voyages et d'aventures !!

Il pratiquait la musique et le chant avec un coeur d'artiste et une âme de poète, l'homme connaissait mille tours et une multitude de petits arts d'agrément. Il fini donc par être recherché dans sa ville, pour amuser par ses talents la bonne société Sarladaise. Cet artiste naissant ne tarda pas à se trouver à l'étroit, mal à l'aise dans son atelier de menuisier et prisonnier d'une ville et d'une société à l'horizon limité !! Bref l'esquif tirait sur ses amarres souhaitant prendre le large !!.

Il s'attache à la fortune d'un Troubadour de passage dans sa cité, en qualité de jongleur, tous les deux vont mener une vie errante et gaie, allant de fortes demeures en châteaux, Aimeric ponctuait de ses tours les oeuvres du Troubadour, puis il récitait ou chantait les poèmes de celui ci, en s'accompagnant d'une viole.







Notre homme amusait ainsi l'auditoire de son Troubadour, cette société de nantis languissant d'ennui dans leurs châteaux. Il jouait la comédie, disait des farces, faisait des tours de passe passe ou de gymnastique, jonglait avec des couteaux, des assiettes ou des balles de cuivre.

Or donc notre Aimeric était le Menestrel accompagnant un Troubadour, mais voila il voulait plus il désirait lui aussi briller

Car il n'était pas considéré à l'aune de ses talents, certaines catégories de personnes à l'esprit étroit le méprisait. Les sourires des Dames, compliments et bons mots des demoiselles et des seigneurs allaient au Troubadour, Aimeric était sensible à ce dédain !

Les blessures de l'amour propre vont faire éclore son génie, il devint poète et Troubadour à son tour, la gloire sera au rendez vous ! récoltant estime et célébrité et son nom est cité à côté d'un Bertrand de Born, d'un Giraud de Borneilh, de Bernard de Ventadour et d'Elias Cairels

Il entre désormais seul dans ce monde de la Poésie, de l'Amour Courtois et des légendes du cycle Arthurien, tant prisé par  la noblesse du moyen âge, qui offre gîte et protection aux Troubadours !








Elias Cairels est né lui aussi à Sarlat, il fut d'abord orfèvre, puis lui aussi jongleur avant de devenir Troubadour. Sa muse le mène de par le monde en quête d'aventures, mais aussi, nécessité faisant loi ! à la recherche de protecteurs.

Les Chansons et les poèmes sont peu efficaces comme protection, dans une époque ou la vie est précaire !! On peut fort bien chanter l'amour courtois le matin et se retrouver le soir avec deux pouces d'acier plantés dans le corps, au détour d'un chemin

Elias vit à la cour du Roi d'Aragon, Alphonse IX et à celle de Guillaume IV, Marquis de Montferrat

Un de ses biographes dira de lui je cite: Elias fut de Sarlat, Bourg du Périgord, il était ouvrier d'Or et d'Argent et dessinateur d'Armoiries !

Ce biographe ne devait que fort peu l'apprécier car il ajoute je cite : Il chantait mal, jouait mal de la viole et parlait plus mal encore !, mais il écrivait bien les paroles et les airs (tout est une histoire de goût hein !!!) Il termine en disant que Elias resta longtemps en Roumanie et que lorsqu'il s'en éloigna ce fut pour rentrer à Sarlat ou il mourut.









Elias était un esprit délicat, gracieux et léger, ses poésies brillent par le pittoresque le charme et l'émotion qu'il sut y insuffler

Son oeuvre est assez vaste composée de satyres, de poèmes chantés ou récités, mais c'est surtout ses chansons que l'on retient car elles furent très populaires au XIII siècle dans les milieux sociaux distingués.

PS: Il est regrettable, à mon avis, que la langue d'Oc ait tant vieilli, les Troubadours y ont tout perdu ! Nous n'avons conservé d'eux qu'un vague souvenir, comme une brume matinale que chasse bien vite les rayons du soleil, nostalgie me direz vous ?? vague à l'âme ??? je ne saurais le dire M de