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mardi 25 août 2020

3/3 De l'alchimie à la peinture

A
la fin du Moyen âge, les oeuvres d'art que ce soit peinture ou sculpture, commencent à être signées par leurs créateurs. Certaines sont l'oeuvre d'hommes qui connaissaient fort bien la symbolique des alchimiste. C'est le cas d'un artiste comme Jérome Bosch, le plus étrange des peintres primitifs Flamands, dans ses oeuvres majeures on trouve volontiers l'oeuf philosophique, ou la fontaine de Jouvence. Il arrive même au Maître de représenter des appareils, comme par exemple: sur le panneau central " du jardin des délices ", un matras élevé dont le col surgit d'un croissant de lune

On a pu aussi établir l'appartenance de Jérôme Bosch à une société secrète gnostique, celle des frères du Libre Esprit. Comme le remarque J Van Lennep (Art et Alchimie 1966), avec J Bosch, c'est tout le dessous du moyen âge qui se vide. Du fond de ses régions souterraines remonte un peuple de monstres et de damnés

Il a été mis en évidence qu'à Bois le Duc, cité natale de l'artiste, existait une confrérie qui chaque année jouait un mystère (pièce de théâtre), dans lequel le paradis et l'enfer étaient symbolisés par des décors, traditionnelement employés dans ces spectacles religieux de plein air - qui se retrouvent beaucoup dans les oeuvres de J Blosch

Cependant l'oeuvre de cet artiste ne doit s'expliquer ni par une réaction à son entourage social, qui nous est connu, ni par une obscession plus profonde que la normale, même de son temps, pour les terreurs de l'enfer !!!











E
n fait ses peintures sont des oeuvres à clefs, qui loin de ne suivre que le rythme des obsessions 
imaginatives de l'artiste, ont un sens très précis et d'une inflexible rigueur. Est ce l'intention édifiante d'un artiste d'évoquer les supplices infernaux ????, ou l'idée de faire réfléchir les mauvais fidèles ??????

Cela ne semble pas être le cas, car l'étude attentive des toiles les plus célébres de l'artiste nous montre que par delà l'orthodoxie religieuse courante, et sans s'opposer à elle, le peintre traduisait tout un monde intérieur directement lié à l'alchimie. 

Le cadre infernal, les terreurs et les supplices, les monstres et les tourbillons de flammes, sont autant de composantes qui ne prennent leur vraie signification qu'en contrepoint de symboles et de motifs hermétiques

On remarquera tout d'abord l'importance du couple chez J Bosch, l'un de ses motifs de prédilection est celui des amants, qui même au milieu des pires terreurs infernales, se caressent en étant tout entier à leur joie partagée. Parfois ils sont représentés à l'intérieur de sphères, de bulles translucides, ou se baignant, ce qui tenterait à renforcer le symbolisme de protection !










S
ur le volet droit de son "Jugement dernier", le maître a juxtaposé une sphère rouge, couleur de la pierre philosophale dans sa phase terminale, qui est celle de la transmutation en or. Toujours dans la même oeuvre, trône un creuset alchimique et au fond du paysage un énorme matras ( récipient sphèrique ou ovoïde à long col )

Sur le panneau central de sa tentation de Saint Antoine, l'artiste a peint un édifice ovoïde couronné par une cheminée crachant de la fumée, en fait il s'agit d'un athanor (fourneau alchimique)

Très fréquents dans les oeuvres du maître nous trouvons les oeufs, grands ou petits, qui s'ouvrent pour laisser voir diverses scènes. Autres motifs symboliques chers au Maître: les Vaisseaux, qui se rencontrent aussi bien ancrés dans des régions infernales, que voguant dans le ciel ou sur les eaux. Les alchimistes parlaient volontiers de navigation hermétique

PS: les rapports noués entre l'alchimie et les arts ne doivent pas omettre les oeuvres littéraires sucitées au moyen âge. Nous savons que la seconde partie du Roman de la Rose en offrait un exemplaire célèbre (voir article précédent M de V

mardi 4 août 2020

2/3) La persécution des Alchimistes

On ne peut manquer d'objecter sur les cas forts réels de la persécution de deux grands alchimistes médiévaux qui firent bel et bien l'objet de condamnations fermes prononcées par un tribunal ecclésiastique, et ce pour des motifs théologiques !!

Le premier de ces deux adeptes, le médecin Arnauld de Villeneuve 1240-1311, qui fut même Recteur de l'Université de Montpellier ( insigne honneur), fut envoyé envoyé par le roi Jacques II de Catalogne en ambassade auprès du roi de fer, Philippe IV le Bel. C'est au cours de cette mission diplomatique que notre médecin aura des ennuis avec les autorités ecclésiastiques de la Sorbonne, faculté de théologie Parisienne !, celle ci ordonnera que ses écrits soient brulés en place publique de la main du bourreau

Le motif de ces ennuis n'étaient pas basés sur l'alchimie mais sur l'accusation de pratiques magiques, ainsi que sur l'exposé d'opinions philosophiques qu l'église jugeait hérétiques et dangereuses pour le peuple. Il dut à sa haute protection par le Pape Clément V de ne pas être plus sérieusement inquiété !

Mais après la mort du médecin, et surtout celle de son protecteur, en 1314, il passera fort peu de temps pour qu'un tribunal inquisitorial vienne confirmer à titre posthume le rejet de quinze propositions qui avaient été condamnées à Paris en 1309, par la faculté de théologie de la Sorbonne

Le second sera le malheureux Roger Bacon 1214-1294, surnommé docteur Mirabilis, qui des siècles avant Jules Vernes décrivait des voitures sans chevaux, des avions et des sous marins dans son oeuvre. Il va connaître les pires ennuis, et notre frère Roger passera quatorze années de prisons dans la cellule d'un Monastère !!

Mais ni l'un, ni l'autre de nos deux adeptes de l'alchimie ne se posaient en ennemis déclarés de l'église, ou en incroyants, bien au contraire !!!!. Pourquoi donc furent ils inquiétés ????, tout simplement parce que les tribunaux de l'inquisition craignaient qu'ils fassent usage de moyens touchant à la magie noire, La sorcellerie était l'obsession majeure à cette époque








Dans le cas ou l'accusé était convaincu de magie noire il encourait le dernier  supplice, s'il était reconnu comme s'étant efforcé sciemment, par moyens diaboliques, de parvenir au but de ses recherches il risquait la mort dans bien des tourments. C'est sans doute ce qui fit- bien à tort précisons le- accuser nos deux personnages

De plus certaines hardiesses de pensées, ou de théories fumeuses pour l'époque pouvaient scandaliser !!. Le général des Franciscains condamnera le frère Roger Bacon pour avoir enseigné " des nouveautés suspectes ", il faut dire que le frère Roger était un esprit singulièrement prophétique, car un siècle avant Léonard de Vinci, il parlait déjà de machines volantes, de voitures sans chevaux et de sous marins explorant les fonds marins

Il serait arbitraire de nier de tels faits, mais outre qu'il faudrait tenir compte d'un arrière plan politique insoupçonné lors de tels procés !, leur existence ne constituait que des faits isolés par rapport au grand nombre d'alchimistes, qui au moyen âge, n'étaient jamais inquiétés en quoi que ce soit par les autorités ecclésiastiques !!!

Si nous voulons, par exemple, puiser dans les merveilleuses recherches du frère Roger, parlons de celles concernant l'optique. Il nous faut reconnaître que contrairement à ce que pourrait supposer la majorité des gens de notre époque, les savants du moyen âge avaient, en ce domaine, des connaissances très précises








C'est pourquoi dès le XIII siècle, les alchimistes pouvaient - et pas seulement frère Roger - disposer de miroirs perfectionnés. Mais de même que pour les transformations observables de minéraux, la limite n'était pas tranchée entre les observations positives et ce que nous autres, dans notre époque moderne placerions aussitôt dans le domaine de l'oculte

On peut en juger d'après un passage du Roman de la Rose écrit par l'un des deux auteurs de l'oeuvre, l'adepte Jean de Meung....Il dit je cite: les miroirs ont encore maintes curieuses propriétés; ils font paraître si éloignées et si petites des choses grandes et grosses placées tout près, qu'on les distingue à peine en y mettant beaucoup d'attention, seraient elles les plus grandes montagnes qui sont entre la France et la Cerdagne.

D'autres miroirs montrent les dimensions exactes des choses qu'on y regarde, d'autres encore sont ardents et brûlent les choses que l'on met en face si l'on sait bien y faire converger les rayons du soleil qui les frappent 


PS: informations puisées sur le livre de la vie quotidienne des alchimistes de Serge Hutin M de V