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vendredi 25 août 2017

N°90) les meurtres du roi jean II dit le bon à Rouen


Il fut dit au Roy de France que le Roy de Navarre ainsi que le Comte d'Harcourt devoient faire entrer les Anglois en ce pays et avoient fait de nouveau alliance avec le Roy d'angleterre.

Je ne sçai si c'estoit vrai ou non, ou si on le disoit à l'envie dans l'entourage du Roy de France, mais je ne crois mies que de si vaillants gent, de noblesse et de si haute extraction vosissent le faire et penser trahison contre leur naturel seigneur

Il est bien vrai que les hauts barons de Normandie ne voulurent oncques consentir à ce que la gabelle du sel courust sur leurs terres s'opposant ainsi au Roy! et que le Roy de Navarre avait fait assassiné à l'Aigle le favori du Roy, ce benêt de Charles la Cerda, mais pour une dette d'honneur et pour insultes en présence du Roy de France, dette qui ne peut se laver que dans le sang.

Mais Navarre avait fait amende honorable et avait été pardonné par le roi devant la cour de ses pairs.

Le Roy Jean II qui estoit légiers d'esprit et dur à oster d'une opinion lorsqu'il s'y estoit arrestés !! entrant dans une colère dont il était coutumier, dit sa grande haine, et jura que jamais il n'aurait parfaite joie tant qu'ils fuissent en vie.






En ce temps estoit son aisné fils, Charles de Normandie dont il estoit Duc et qui tenoit hostel au Chastiel de Rouen. Charles ne savoit rien des rancunes et de la haine mortelle que le Roy son père avoit sur Charles de Navarre et sur le Comte d'Harcourt et son oncle, monseigneur Geoffroy d'Harcourt de Saint Sauveur le Vicomte.

Le Duc leur faisoit toute la bonne compagnie qu'il pouvoit pour l'amour de son Duché et le voisinage de ces gens de haute noblesse ayant leurs possessions sur son Apanage !

Et il advint que le Duc Charles les fist prier, par des chevaliers de sa maison, de venir dîner avec lui en son Chastiel de Rouen.

Le Roy de Navarre et le Comte d'Harcourt ne voulurent esconduire le Duc et donnèrent leur accord aux messagers de Charles, toutefois, s'ils eussent écoutés et crus les conseils avisés de Philippe de Navarre, frère du roy de Navarre et de Geoffroy d'Harcourt, oncle du Comte d'Harcourt ils ne fussent jamais entrés en ce chastiel de Rouen.

Mais il en va ainsi dans le déroulement du cours de la vie, ils n'écoutèrent ni les mises en garde, ni les conseils de prudence et vinrent à Rouen ils entrèrent par les camps au chastiel ou ils furent reçus à grande joie, et les portes se refermèrent sur eux comme les mâchoires d'un piège.







Le Roy Jean II qui se tenoit infourmé, savoit bien le quand le pourquoi et le comment de la venue du Roi de Navarre et du Comte d'harcourt à Rouen pour dîner avec son fils, il savoit fort bien que le samedi étoit la jour décidé.

Il départi donc le vendredi avec sa mesnie privée pour accomplir sa vengeance!! chevauchant tout le jour il entra au chastiel de Rouen au moment ou tous les seigneurs étoient attablés avec son fils le Duc.

Il monta les degrés jusqu'à la salle précédé de messire Arnould d'Audrehem, celui ci tirant son espée dit : que nul ne se meuve pour cause de ce qu'il voie, s'il ne voeult estre mort de cette espée !!!.

Vous devez savoir que le Duc de Normandie, le roy de Navarre, le Comte d'Harcourt et ceux qui siegeoient à la table du repas furent bien esmerveillet et esbahis, quand ils virent le roy de France entrer dans la salle du festin dans un tel état de rage qu'ils souhaitaient tous êstre ailleurs. Adonc se levèrent ils, tous cuidant faire la révérence, mais le roy n'avoit nul envie de recevoir hommage, s'avançant vers la table il lança son bras et saisi le roi de Navarre par la kevèce et le tira roid à lui, en disant, " Or sus traître ! tu n'est pas digne de siéger à la table de mon fils. Par l'âme de mon père, je ne penserait plus jamais à boire et manger tant que tu vive".







La se trouvait un escuier de la maison de Navarre qui s'appeloit Colinet de Bleville, qui fut si moult courouciés de voir son mestre ainsi malmené qu'il tira son baselaire le portant en la poitrine du roy de France disant qu'il l'occiroit, Jean II lacha Charles II roy de Navarre et dit à ses sergans "  prenez au corps ce garçon et son mestre aussi.

Les sergant d'armes s'avancent aussitôt et saisissent à la main le roy de navarre et l'escuier. La s'émeut grandement Navarre, disant à Jean II " Ha monseigneur, par Dieu grâce, qui vous a si  durement encoléré contre moi ?

Il ne fallait pas pourtant être grand Clerc pour comprendre que malgré la réconciliation publique de Jean II et de Charles II, pour la mort du connétable Charles d'Espagne, son favori !!, le roy de France n'avait rien pardonné.

Pour le Comte d'Harcourt, c'était le fait de plusieurs injurieuses et orgueilleuses paroles contre son roy lors de l'assemblée du chastiel de Val de Reuil, au sujet des aides que devaient apporter le duché de Normandie pour la guerre du roy. Mais pas seulement...le Comte d'Harcourt était parti prenante dans l'affaire de L'Aigle !!!







Et pour ces causes le roy de France fist mettre en prison dans diverses chambres du chastiel de Rouen les gens conviés par le Duc de Normandie, et tantôt ala diner du festin organisé pour les invités de son fils !!!

Quand il fut repu, lui, sa mesnie et ses cousins d'Artois, montèrent à cheval, pour se rendre en un champ derrière le Chastiel nommé " le champ du pardon ".

Ironie du sort puisqu'il allait être le lieu d'une meurtrerie inique !!!, la fut menez en deux charrettes, sur commandement du roy, le Comte d'Harcourt, le seigneur de Graville, monseigneur Maubué et Colin Doublet.

Ils eurent en ce lieu le chef tranché,sans jugement ni procès !!!, puis trainés jusqu'au gibet de Rouen pour être pendus par les pieds et leurs têtes posées sur le dit gibet.

Le lendemain le roy délivra les autres ne gardant prisonniers que le roy de Navarre, le dit Friquet et le dit Banthelu, ils furent menés à Paris et enfermés, Navarre au Louvres et les deux autres au Châstellet. Jean II ce roy brouillon, comme son père et son grand père avait obtenu vengeance !!

Il ne peut en être autrement, il vous faut savoir que ceux qui furent exécutés et ceux qui furent emprisonnés se trouvaient tous à l'auberge de la rue de la Truie qui file à L'aigle !!! pour l'exécution de cet insipide charles la Cerda  !!



PS: La question reste posée ? de Jean II dit le bon et de Charles II dit le mauvais, lequel des deux mérite vraiment le qualificatif de Mauvais ???  M de V

mardi 22 août 2017

La mort de Charles II dit le Mauvais 1387

Hormis l'année ( 1387 ), personne ne saurait dire aujourd'hui comment est mort ce Prince de France, Roi de Navarre et Comte d'Evreux.

Force est donc de constater, qu'il me reste comme seule solution, celle de retranscrire aussi fidèlement que possible les quatre versions connues de sa mort.

Elles sont malheureusement fort divergentes les unes des autres, il vous faudra, comme moi, trier le bon grain de l'ivraie, afin de vous forger votre opinion sur la mort de ce personnage haut en couleurs de ce XIV siècle.

Citons les auteurs ayant relatés l'événement: l'évêque de Dax, dans la chronique du religieux de Saint Denis, puis Froissart édition Kervyn de Lettenhove, en troisième position Favyn XVI siècle dans histoire de la Navarre et pour finir Mézeray XVII siècle dans son histoire de France.





L'évêque de Dax: Ma très redoutée dame, après m'être humblement recommandé à vous, je vous annonce, les larmes aux yeux et le cœur navré de tristesse et d'amertume, la mort cruelle du Roi notre sire; mais c'est aussi avec une véritable joie et une vive satisfaction que je vous parlerai de la sainte et digne fin qui lui a été accordée par une grâce spéciale de la providence. Ce fut la veille de la fête de la sainte Lucie, vierge et martyre, qu'il se coucha sur son lit de douleur vers minuit; depuis ce moment il ne cessa de confesser ses péchés, renouvelant sa confession jusqu'à six fois par jour.

Lorsqu'il se sentit un peu affaibli, et il l'était plus qu'on ne le pensait et qu'il ne le croyait lui même, il reçu chaque jour le corps de Jésus  Christ; il communia ainsi, dit on, dix sept fois en huit jours, après avoir maudit toutes ses erreurs.

Il reconnut un à un implicitement et explicitement, tous les articles de la foi, et en fit déclaration dans des actes publics; en un mot toutes les pratiques qui sont du devoir d'un bon prince et d'un bon catholique, il les a observées ponctuellement à la grande édification et admiration des fidèles, particulièrement de ceux qui l'ont vu et entendu à ses derniers moments, et qui se regardaient les uns les autres en s'écriant : " sainte mère de Dieu! qu'est ce que ceci ? "



Ils pensaient que c'était le saint esprit qui parlait en lui. Raconte qui pourra cette patience dont il a fait preuve, cette modestie qui ne s'est point démentie, cette humilité qu'il n'a cessé de montrer.

Pour moi, je ne saurais trouver des termes ou des pensées pour exprimer avec quelle religion il a réglé ses dernières volontés, avec quelle générosité il a récompensé les services des siens, avec quelle sollicitude il a songé à tout. On vous redira de vive voix en temps et en lieu tout ce qu'il a fait ou écrit durant sa maladie.

Il a gardé jusqu'à son dernier soupir une mémoire parfaite, une grande netteté dans les idées et toute l'ardeur d'une fervente dévotion. Tant qu'il a vécu, il a conservé l'usage de sa raison; tant qu'il a respiré, ses souvenirs ont été présents; tant qui lui est resté un souffle de vie, il a brûlé du feu de la charité.





J'ai dit qu'on eut cru voir en effet un homme bien portant plutôt qu'un malade. J'ai parlé de sa patience : il semblait plutôt calme qu'aigri par le mal. Pour ce qui est de sa mémoire, il paraissait plus occupé de ses travaux que de ses souffrances, et prouvait sa fervente charité  en tournant ses pensées vers les méditations religieuses plutôt que vers le maintien de son autorité.

Il ne désirait point sa guérison, il rejetait même les moyens de revenir à la vie et luttait énergiquement, comme un athlète courageux, contre le démon  et contre les délices du monde et de la chair. En un mot, il souffrait presque sans gémir et sans se plaindre, et il mourut enfin sans douleur et sans peine avec une véritable contrition. Aussi, je crois fermement qu'en quittant cette terre il est allé au ciel, ou je prie Dieu de nous réunir avec lui.

Nota voila terminée la prose de l'évêque de Dax que je qualifie: d'eau bénite de Cour...Ouf....M de V




Jehan de Froissart: Je cite dans le texte : Et me fut dit que ce Roy de Navarre avoit tousjours, tant qu'il vesquy aimé les Dames, et encore en ces jours derniers, il avoit une très belle damoiselle accorte avec laquelle il se déportoit; car de grand temps il avoit été veuf.

Une nuit il avoit couché avec elle, et s'en retournant tout frileux vers sa chambre, dit à un de ses varlets de maison: " appareillez moi un lit, car je me veuille un petit couchiez et reposer " ainsi il fut fait. Il se despoulla et se mist en ce lit.

Quand il fut couchié, il se mist à trembler et ne se pouvoit reschauffer, car il avoit grand âge, environ soixante ans, et l'on avoit comme usage pour le réchauffer et faire suer, de bouter une bassine d'airin qui lui souffloit un air bouillant et le réchauffoit.





Il fut adonc ainsi fait, mais la chose tourna sur le pire pour le roi, ainsi que dieu ou les diables le virent, car flamme ardente se bouta en ce lit entre les linceuls de tel manière que nul ne sut oncques venir à temps pour le secourir, qu'il ne fut tout ars jusqu'à la boudine; mais pour autant il ne mourut pas si tost.

Car il vécu encore quinze jours en grande peine et grande misère, tellement que oncques médecins le soignant ne sceurent y remédier, tant qu'à la fin il en morust. Telle fut la fin du Roy de navarre.

Nota : on constate que son texte commence par " il me fut dit " il est déjà bien difficile de transcrire Froissart, je n'ose imaginer la licence que prirent les différents copistes pour que ce texte parvienne jusqu'à nous M de V








André Favyn écrivain héraldiste et avocat au parlement: Et trois mois après à sçavoir, le mardi premier jour de janvier, audict an 1386, le Roy de Navarre mourut à Pampelonne, de son âge 55 ans, deux mois et 22 jours, regna 37ans deux mois et 25 jours. ( cette façon d'écrire sent l'avocat à plein nez!)

Son cœur fut porté à sainte marie d'Uxoa, ses entrailles à sainte marie de Roncevaux et son corps ensevely en la grande église de Pampelonne auprés du  cœur de la royne Jeanne de France sa femme.

Sa mort est diversement racontée. Les uns, et telle est la voix du vulgaire, qu'ayant les membres refroidis, pour les réchauffer les médecins ordonnèrent qu'il fut cousu dans un drap mouillé et trempé d'eau de vie, celui qui le cousoit ayant achevé voulut rompre le fil avec la flamme de la bougie qui l'éclairoit, une bluette de cette bougie tomba sur le linge et aussitôt l'enflamma et ensuite les draps le ciel et les rideaux du lit du roy malade, le brulèrent misérablement tout vif, il languy cruellement trois jours entiers avant de mourir.




Les plus relevez disent qu'étant alicté d'une longue maladie il fut prodigieusement bruslé par une étincelle sortie d'une  boule de cuivre pleine de charbons ardents avec laquelle on lui bassinoit son lit. Ains consommé par punition divine, pour avoir travaillé son peuple d'impôts et de subsides, troublé le repos des princes ses voisins et attenté sur leurs estats et vies par séditions, massacre et empoisonnements, qui lui donnèrent la titre de cruel et de mauvais.

Car les peuples sont les parrains de leurs princes, les baptisans des noms de leurs vices ou vertus ausquels ils sont addonnez, les rendants recommendables ou de mauvaise odeur. ( Notez la mauvaise foi de cet auteur, l'importance que se donne ce petit avocat, cette mauvaise humeur cuite de Robin surgissant au  bout de chaque phrase)

Mais poursuivons avec cet acrimonieux personnage : je cite L'opinion la plus véritable est, que ce prince ayant été tout le temps de sa vie fort adonné à la paillardise, il estoit tout mangé de vérole, récompense ordinaire de ceux qui suivent l'estendart de l'impudique Vénus, de sorte qu'il mourut tombant par pièces comme un ladre. Ce qui a donné lieu à ces comptes fabuleux, estoit que par ordonnance des médecins il usoit de fomentations et de bains ensoulphrez. ( nous en avons fini avec ce fumeux auteur, nul ne sait quand il mourut ni de quelle manière, pour moi je pense qu'il finit étouffé par sa propre bile!! )




François Eudes de Mézeray fut commissaire des guerres avant d'entrer à l'académie: je cite

La mort de ce roy est des plus estranges. Bien qu'il n'eust qu'environ cinquante cinq ans, ses voluptez excessives avoient tellement refroidy sa chaleur naturelle, ou quelque secrète et honteuse maladie avoit si fort altéré sa constitution, remplissant ses veines et tous les canaux par ou se porte le sang et les esprits d'une froide et visqueuse pituite, qu'il estoit tout glacé au dehors et ne pouvoit se réchauffer par quelque artifice que ce fut. ( on peut se demander s'il fut commissaire des guerres ou médecin non ?? )

Les médecins ordonnérent de l'envelopper dans un drap mouillé d'eau de vie, d'autres disent d'huile et de souphre. Or un des valets qui l'ensevelissoit, par faute de ciseaux voulut couper le fil avec la bougie, le feu  glissa prestement le long de ce fil et prit au drap, qui estant trempé de cette subtile matière s'enflamma et grilla ce malheureux.


Il n'en mourut pas sur l'heure mais vescut encore six ou sept jours durant lesquels aisi à demi bruslé et souffrant des douleurs enragées il ne cessa de hurler et de maudire sa vie jusqu'à ce qu'il eut poussé son âme dehors.



Ainsi après avoir bruslé tout le temps de sa vie du feu impudique de ses passions, ainsi après avoir excité sans cesse des incendies par toute l'Europe,

Ainsi après avoir fait mourir je ne sçay combien d'innocents par des poudres empoisonnées, dont il se servoit pour ses vengeances, qui en moins de quatre ou cinq heures brusloient horriblement les entrailles de ceux qui les prenoient.

Ce grand criminel vestit la chemise ardente, et fut ensevely dans les flammes. ( sa grandiloquence finale ne peut cacher qu'il ne fait que reprendre les théories fumeuses de son acariâtre prédécesseur Favyn )


PS: Je laisse à de plus doctes que moi le soin de trancher ! ou plus simplement de se faire une opinion sur la mort de ce prince de France dont on a noirci à l'envie le personnage M de V