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mardi 4 décembre 2018

N°260) La décadence des Bénédictins de Cluny au XV siècle

L'église avait déjà traversé au X et au XI siècles des périodes de troubles ou de décadence presque générale (voir article), mais au moins la tête était restée saine, cet ordre monastique n'était pas parvenu à ce degré d'affaiblissement, qu'il atteignit au lendemain de la guerre de cent ans.

L'ordre Clunisien des bénédictins était tombé dans la plus complète décadence, de plus en France on ressentait un amoindrissement important du sentiment religieux. L'abbaye mère n'avait pas été épargnée, le chapitre général tenu en 1422 déclarait, que les guerres et les troubles avaient tellement appauvri et désolé le Monastère, que l'on devait renoncer à le rétablir dans son état ancien !!

Le nombre des moines qui avaient été de 460, était tombé successivement à 260, puis à 120 après la grande peste de 1347, ils n'étaient plus que 80 en 1426. Le jeûne, l'abstinence et la règle continuaient à être observés, l'obéissance et la pauvreté respectées par la plupart des moines, mais de nombreux bâtiments, tant dans le Monastère, que dans les dépendances tombaient en ruines et l'on avait dû aliéner une partie du patrimoine !

Mais les Abbayes et Prieurés dépendant de cet ordre Clunisien avaient en France encore plus souffert. Un grand nombre furent pillés et brûlés par la soldatesque et les routiers, les bâtiments tombaient en ruines









Leurs terres étaient en friche, de nombreux Prieurés avaient désormais des bâtiments inhabitables et avaient été abandonnés par amodiation (affermage), ou aliénation de tout ou partie de ses terres. L'on voyait des moines errer à l'aventure à la recherche d'un gîte, il n'était même pas rare dans certaines régions de voir un prieur ou un moine vivre seul dans leur couvent !

La condition de ces moines obligés sans cesse de lutter pour vivre et se défendre, isolés et sans chef spirituel le plus souvent, n'avaient pas tardé à ajouter à la détresse matérielle, une détresse morale plus grave encore !!

Presque partout dans ces lieux Clunisiens de prières, l'exercice du culte et l'observance de la règle avaient été compromis, la vie conventuelle avait disparue et une corruption profonde s'en était suivie

Nombreux étaient les Prieurés ou le service religieux était mal assuré, voir inexistant, les lampes devant l'autel n'étaient plus allumées, les messes n'étaient plus célébrées, les livres étaient en lambeaux. Quand aux vases sacrés, selon un rapport du chapitre général de 1454, ils étaient soit perdus ou volés, par suite de l'incurie et de la négligence de ceux qui en avaient la garde !!!









Les églises étaient mal tenues, voir profanées, soit que les animaux y entrassent librement, ou que le Prieur du lieu y entassait son grain. Cette décadence de la discipline avait contribué à accroître l'avilissement de ces moines Bénédictins

Les comptes rendu de visite de l'époque attestent que bon nombre d'entre eux étaient insolents, joueurs, blasphémateurs, rebelles et dissolus. Beaucoup dilapidaient les biens de leur Monastère, vivaient en concubinage, entourés même parfois de leurs enfants, d'autres erraient de jour comme de nuit, allant à la ville, fréquentant tavernes et ribaudes et pratiquant le commerce et l'usure !!!

Cette situation n'avait pas manqué d'inquiéter les membres restés sains de l'ordre des Bénédictins, il faut bien avouer qu'on le serait à moins !! Ils s'efforceront d'y remédier.

En l'an de grâce 1445 ils vont envoyer des courriers, porteurs de lettres au Roi, au Dauphin, au Duc de Bourgogne sur les terres duquel se trouvait la maison mère, au Duc de Savoie et au Duc de Bourbon. Le sujet en était la réforme et la restauration de l'ordre des bénédictins, afin d'empêcher sa ruine totale. Ils iront jusqu'à envoyer un émissaire à la cour du Pape à Rome. Mais dans cette toute fin du Moyen âge il semble que les Princes et Rome avaient d'autres chats à fouetter, car leurs efforts resteront vains.





PS: documentation BNF sur des textes de l'école des Chartes M de V