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mercredi 14 juillet 2021

N° 400) Les Fabliaux 2/2

Le fabliau correspond donc à une façon de voir les choses de la vie quotidienne, avec des dispositions critiques assez semblables à celles de nos commères de villages. Il y a cependant une nuance fondamentale. C'est que l'auteur d'un fabliau garde sa bonne humeur et n'est inspiré ni par la jalousie ni par l'orgueil !!.

Il présente les faits sous un aspect serein, avec la curiosité d'esprit d'un observateur et non la morgue d'un censeur. Comme la fable avec laquelle il a beaucoup de parenté, le fabliau se conçoit sous la forme d'un petit drame, avec une exposition, un noeud et un dénouement

On y trouve déjà la verve de nos conteurs dans le roman de Renard, que l'on peut considérer comme une série de fabliaux  aux personnages non humains, ou de l'histoire du Fauvel de Gervais du Bus. 

Pour moi la classification s'avère impossible, et l'on ne peut réserver le nom de Fabliau qu'aux histoires licencieuses, ils sont bien plus que ça ces petits chefs d'oeuvre anonymes !!. A travers les générations de France c'est le même esprit qui circule, la littérature à l'échelle de l'homme et nous ouvrons de grands yeux sur ce " nous même ", si divers et étonnant !!





Le nain va donc vous conter un Fabliau, celui du Vilain qui conquit le paradis par plaid !!

Notre vilain mourut un vendredi matin, son âme fut fort embarrassée car elle ne trouvait ni anges ni diables pour l'emporter !!!

Elle s'en alla donc tout droit vers le ciel, et suivit au hasard l'Archange Saint Michel qui y portait une âme, elle le suivit si bien qu'elle arriva au paradis !!

Saint Pierre reçut l'âme des mains de l'Archange, puis il aperçoit l'âme du vilain toute seule et lui demande : Qui vous a amenée ?, personne n'a ici sa demeure si elle ne lui est donnée par jugement, d'ailleurs par Saint Alain, nous n'avons cure des vilains qui n'entrent pas dans le paradis !!

Je ne peux être plus vilain que vous dit l'âme, beau sire Pierre, Dieu eut tort de faire de vous son apôtre. Vous avez renié trois fois notre-seigneur, votre foi était fort petite pour le renier ainsi trois fois. Allons sortez du paradis traitre !. Moi qui suis franc et loyal, il est juste que j'y reste !!







Saint Pierre eut une étrange honte. Il s'en va donc conter à Saint Thomas son dépit et son ennui. Saint Thomas lui dit : J'irai de ce pas trouver le vilain et il partira !. Il s'en vint au vilain " c'est ici notre demeure, dit il, celle des martyres et des confesseurs. Quel bien a tu donc fait pour vouloir y entrer ???

Thomas, Thomas, n'avez vous pas honte de répondre ainsi ??. Vous n'avez pas voulu croire les apôtres, qui avaient rencontré Jésus après la résurrection. Vous fites même serment de ne pas croire avant d'avoir touché les plaies du sauveur; vous fûtes faux et mécréant !!!

Saint Thomas n'eut plus envie de parler; il s'en vint à Saint Paul et lui conta son affaire. Saint Paul dit " j'irai le trouver et verrai bien ce qu'il voudra discuter ". il se porte vers l'entrée et dit " vilain qui t'amène ?Par qui la porte fut elle ouverte ? Quitte le Paradis !!

Quoi !!, dit le vilain. Avez vous oublié que vous fûtes un horrible bourreau ?? Il n'y en aura jamais de si cruel, Saint Etienne l'apprit bien, lui que vous avez fait lapider. Je connais bien votre vie : par vous mourut ce saint homme. Croyez vous que je l'ignore ??







Saint Paul eut grande angoisse; il retourne vers saint Pierre et saint Thomas et vont se plaindre au Seigneur Dieu tous les trois !!!. Il lui fit conté comment le vilain leur avait fait honte. J'irai dit le Seigneur, il vint à l'âme et lui demande comment il est entré au paradis sans permission car " jamais ici âme d'homme ou de femme n'entre sans jugement ", tu a blâmé mes apôtres et tu pense rester ici !!!

Sire dit le vilain, j'ai bien le droit d'y être comme eux. Jamais je ne vous ai renié !, je n'ai jamais fait mourir quelqu'un !, j n'ai jamais cessé de croire en vous; ils ont jadis fait tout cela  et sont à présent en paradis

Tant que j'ai vécu, j'ai donné mon pain aux pauvres, les ai logés quand je pouvais, chauffés à mon feu et soignés, je les ai portés à l'église; je me suis sincèrement et pieusement confessé. On nous enseigne que les péchés de celui qui meurt après avoir ainsi vécu, sont pardonnés

Je suis ici, pourquoi en partir ??? Ce serait manquer à votre parole, et vous ne mentirez pas pour moi !. Vilain dit le Seigneur, je te l'accorde. Tu as conquis ton paradis en plaidant !


PS: tout le monde trouve provende dans un tel fabliau M de V

vendredi 9 juillet 2021

1/2 Les Fabliaux c'est Bô !!!!

Pendant tout le Moyen âge, le Latin dispute, comme langue Littéraire, la première place à la langue Vernaculaire ( ou dite vulgaire ). Les oeuvres en Français des XII et XIII siècles, que les savants des XIX et XX siècles ont découverts dans les archives des grandes bibliothéques, sont très nombreuses ! 

Nous possédons de cette période une centaine de Chansons de Geste formant environ 150 Fabliaux. Ne séparons pas ces deux inspirations, si différentes l'une de l'autre, car on les considère justement comme les deux manifestations les plus caractéristiques de la civilisation du Moyen âge 

Le texte, par exemple, de notre plus ancienne épopée " la chanson de Roland " forme déjà plusieurs morceaux d'héroïsme que les Menestrels chantaient en s'accompagnant de la vielle sous les lourdes voûtes des salles Seigneuriales, ou bien en plein air au coin d'une des places d'une cité

On peut en dire autant des Fabliaux qui appartiennent eux aussi à la littérature orale. Le manuscrit du plus ancien Fabliau " Richert ", est daté 1170, mais il y avait longtemps sans aucun doute, que jongleurs et acrobates récitaient devant une foule qu'ils mettaient en joie des histoires que nous nommerions " gauloises " aujourd'hui !!! 






Le Fabliau est une manifestation spontanée du génie Français, ou la culture n'était pas uniquement l'apanage d'une minorité, la littérature de cette période devait imiter les nourrices qui contaient de belles légendes aux enfants. La littérature dès XII et XIII siècles fut donc narrative, les Fabliaux étaient donc des contes imaginés pour êtres récités à ces grands enfants qu'étaient nos ancêtres du Moyen âge !!

Nous pouvons faire remonter la vogue des Fabliaux bien au-delà du XII siècle et supposer avec vraisemblance que le Fabliau, tout comme la Chanson de Geste, avait déjà la faveur des Français dès le IX siècle !!

On peut lire dans certains manuscrits en Latin des directives, destinées à ces empêcheurs de tourner en rond qu'étaient les Confesseurs de l'époque...!!; ou il leur était conseillé de réprimander sévèrement les pénitents qui s'accusaient en confession, de prendre plaisir à raconter ou écouter ces histoires légères !!!

Quels pourraient donc en être les auteurs ????. Un grand nombre de ces petits chefs-d'oeuvre sont restés anonymes, comme beaucoup de Chansons de Geste d'ailleurs. les auteurs appartenaient à cette élite intellectuelle que l'on appelait au Moyen âge les Clercs






Ceux ci pouvaient être Moines, Prêtres séculiers, ou bien des Laïcs, qui après avoir bénéficié de la culture donnée par l'église n'avaient pas été jusqu'à porter tonsure et robe de bure, ou entrer en prêtrise. Il nous faut aussi mentionner quelques Seigneur lettrés, bien que beaucoup de gens de noblesse mettaient un point d'honneur à ne pas ressembler aux Clercs

Enfin le mouvement communal (pour ne pas dire la révolution communale) avait créé une bourgeoisie puissante et cultivée. C'est donc dans cet ensemble mi-ecclésiastique, mi-Laïc, mi-Seigneurial et mi-bourgeois qu'il nous faut chercher les auteurs de nos fameux Fabliaux !!

On ne connaîtra jamais le nom de la plupart d'entre eux, car beaucoup avaient comme auteur de Fabliau, le même motif, ou la même raison, qui leur faisait garder l'anonymat !!!

Si l'Auteur était un ecclésiastique il aimait mieux par prudence ou par pudeur rester dans l'ombre, pour les autres qu'ils soient personnes respectables, nobles, ou occupant des fonctions et des postes en vue ils ne voulaient pas que l'on sût qu'ils s'amusaient à écrire des contes licencieux !!!

On peu comprendre ma foi, qu'à cette époque, ils désirent conserver l'anonymat mordious !






Cependant pour quelques-uns de ces auteurs de Fabliaux nous savons à qui attribuer les textes, ils portent des noms Bourgeois comme Guillaume le Normand, un certain Courtebarbe, un nommé Bernier, ou un Jean le Galois et un Huon le Roy...puis quelques Seignerrs lettrés tel Philippe de Beaumanoir ou Jacques de Baisieux

Chaque genre avait son public que ce soit pour la chanson de geste ou le fabliau. On a quelquefois voulu brutalement opposer le fabliau à l'épopée. Cette opposition serait née d'une réaction de l'âme populaire contre la mystique de la chevalerie !

Le Fabliau serait en quelques sorte la revanche du peuple Franchouillard qui ne pouvant lutter à armes égales avec la Féodalité toute puissante, se rattrapait en opposant à un attitude gourmée la verve narquoise des Vilains !!

Mais si nous examinons  qu'elles sont les victimes de cet esprit moqueur nous remarquons que toutes les classes de la société médiévale sont mises à mal !!!!...tout le monde y reçoit son paquet, que ce soit la Noblesse, les Moines, les Prêtres séculiers, les Bourgeois et les Vilains !!!




PS: si vous pouvez vous trouver le bouquin sur les fabliaux du Moyen âge de Maurice Tessier et Henri Nicolas vous ne perdrez pas votre temps...le moins que l'on puisse dire c'est que c'est croustillant M de V