Que représente la folie dans le monde Médiéval? Une notion vaste et complexe, comme le prouve ce témoignage du passé, le livre de "Sydrac", texte qui fut écrit sous forme de dialogue dans la toute fin du XIII siècle, je cite:
Le Roy demande comment s'enfolissent les gens ? Sidrac répond: Les gens sont nés simples comme foux, les autres perdent le sens de la maladie, certains ont la faiblesse de la cervelle, d'autres ont de mauvaises humeurs, les autres de trop perdre de sang, ou encore de grandes chaleurs et de toutes ces manières de folies, chacune apporte dommages et peines et font mal à autrui. Mais il y a autre manière de folie qui est moult mauvaise, pour soi et pour les autres, c'est à savoir ceux qui mal vivent et qui volent autrui, qui tuent les gens et faussement jurent et péchent de moult manières, on s'en doit moult garder
De part ce texte on constate que l'homme médiéval distingue plusieurs types de folies, selon que l'autre est mis en cause ou non, on trouve la folie qui apporte sa propre peine, folie venant du corps, la folie maladie, la folie qui fait dommage aux autres, puis la folie qui vient de l'âme, mais aussi la folie péché, or donc l'éthique et la pathologie sont presque conjoints sous le même concept de folie !!!
Quant au mot Fol, qui est une métaphore étymologique, (follis) signifiant en latin " soufflet", ou "sac plein d'air", d'ou "tête vide" !!
L'homme médiéval donnera plusieurs sens au mot "fol"
I) Le fol " insensé déraisonnable", le fol dont les comportements ou jugements sont extravagants ou hors du bon sens, sans relever pour autant de la pathologie, c'est le cas de Perceval dans le conte du Graal de Chrétien de Troyes
II) Le fol " sot stupide ignorant" le fol que l'on défini simplement par défaut de savoir, tel encore une fois Perceval, qui ignore toit de la Chevalerie lorsque s'ouvre le conte du Graal. Le fol comme sot ou ignorant est une figure traditionnelle dans les proverbes et les sentences
III) Le fol "inconvenant malhonnête mauvais" à la différence des précédents, ce fol se teinte d'une valeur éthique marquée, il n'est plus celui qui agit hors du bon sens !! Il est également celui qui offense les règles morales ou un idéal, ce fol est alors fort souvent placé en conjonction avec "Vilain"
IV) Le fol dans le contexte religieux, ou la même valeur éthique peut donner au mot fol, le sens de coupable pécheur, révolté contre Dieu. Dans les chansons de geste, fol est souvent associé à "mescreant", pour désigner les infidéles !! En exemple "fol créance" signifie le "paganisme", et dans les fabliaux "fol fame" prend le sens de " courtisane "
V) enfin le fol désigne le fou professionnel, le bouffon de cour que l'on trouve chez le roi comme chez les grands feudataires ou encore dans les troupes de ménestrels
Mais la question se pose, à qui confier le fou qui n'est pas professionnel ???, au juge, au médecin ou au prêtre, c'est que la folie au moyen âge n'est pas englobée dans un discours psychiatrique, une spécialité qui n'existait pas. La médecine, le droit et la théologie ne connaissent le fou qu'en temps que personne, ils ont englobé les conflits de l'âme et du corps, de dieu et du diable, de l'innocence et de la culpabilité, de l'humain et de l'animalité !!
La conception médiévale de la folie c'est un être hors de tout espace civilisé ou socialisé, hors de soi et hors du sens, le fol se trouve pour eux dans une demeure introuvable !!!
Nota: Le livre de Sydrac ou Sydrach, le philosophe, se nomme " de la fontaine de toutes sciences", écrit entre 1270 et 1300, il est écrit sous forme de dialogue et forme une encyclopédie de la culture populaire du Bas Moyen âge
PS: documentation BNF, d'après le livre de JM Fritz, le discours du fou au moyen âge M de V
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