Cette figure de légende, par sa ténacité et sa bravoure va maintenir sur le trône d'Angleterre son époux
Henri VI . Sans elle, il aurait disparu devant
Richard d'York, aussi facilement que le fils du Prince Noir (Richard II) devant les Lancastre.
Elle est l'héroïne de cette guerre civile qui dura
30 ans, faisant des milliers de morts dans le royaume d'Albion, sous le nom de la
Guerre des Deux Roses, une Blanche pour la maison d'York et une Rouge pour la maison des Lancastre, ces derniers occupent le Trône en la personne de Henri VI.
Cette guerre est une aubaine pour la France elle permet au royaume de Louis XI de se relever d'un conflit qui durait, si l'on tient compte des trêves et des traités, depuis 116 ans.
Mais prenons le personnage à ses débuts il le mérite bien, c'est donc le 24 mars 1430 que vint au monde Marguerite, fille de Isabelle de Lorraine et de René d'Anjou. Cette toute jeune fille fait partie de la troisième maison d'Anjou, celle qui commence quand
Jean II le Bon, donne en apanage à son fils Louis ce Comté, devenant de ce fait
Louis Comte d'Anjou, (passé peu glorieux quand on connait ce détestable personnage, voir Charles V, Louis était son frère),un de ces oncles rapaces de
Charles VI le fou.
Marguerite sera promise une première fois à l'age de deux ans au Comte de Saint Pol, frère de cet infâme
Jean de Luxembourg !!, resté tristement célèbre pour avoir vendu Jeanne D'Arc au Anglais pour la somme de 10 000 livres.
Marguerite part pour Angers vivre avec sa grand mère la
Reine Yolande, son père étant prisonnier et sa mère partie en guerre, pour conquérir en lieu et place de son époux, ce royaume de Naples hérité par droits de succession.
Pendant ce temps croissait en beauté et en savoir notre personnage, modelée sous la férule de sa grand mère et d'excellent Maîtres triés sur le volet. Elle tenait de son père une grande sensibilité artistique, et de sa mère la ténacité devant les obstacles et le courage dans l'adversité. De 1440 à 1443 nous verrons Marguerite ratifier divers paiements et certains règlements en lieu et place de sa grand mère, proche de sa fin la reine Yolande initiait ses petits enfants à la gestion de ses domaines.
Voila le destin qui à pas feutrés fait son approche, en la personne du
Comte de Suffolk, William de la Pole.
L'envoyé extraordinaire du roi d'Angleterre a pour mission de trouver les bases d'un accord afin de faire entrer dans les limbes cent années de guerres entre les deux pays, vaste programme s'il en est !!!
Depuis que Henri V était mort l'Angleterre se trouvait livrée aux passions ennemies entre les différents familles proches du Trône. Henri VI se maintenait sur ce siège inconfortable, avec l'aide de son
Régent, le Duc de Bedford, frère du roi décédé. Homme de sens rassis qui avait moins le sens de ses propres affaires que de celles de l'état, mais d'une santé fragile, et part sa mort il va priver ce roi d'un appui dont il avait tant besoin.
Par contre le régent avait un frère,
Humphrey de
Gloucester, benêt notoire, brouillon et ripailleur, qui semait l'or du royaume aux quatre vents. Il va s'aliéner toutes les personnes du conseil de régence, notamment les Ecclésiastiques.
Ces prélats ont pour chef,
Beaufort, Cardinal de Winchester, ce dignitaire de l'église haïssait cordialement Gloucester. C'est le Parlement, lassé de ces querelles internes, qui retire aux deux protagonistes le maniement des affaires, pour les mettre dans les seules mains du Régent. Malheureusement il mourut peu de temps après, il fallut en revenir à Gloucester et bien sur le Cardinal ne lui ménagera aucunes chausses trappes!!
Il nous reste donc
Suffolck, celui qui serra envoyé par le roi pour une mission diplomatique en France, ce guerrier auréolé de gloire aspirait à jouer un rôle dans l'état. Notre homme a l'esprit pratique, il souhaite aider ce tout jeune roi, et il comprend bien vite que pour ce faire, il doit s'allier au cardinal. Le but de ce petit groupe de personnes étant d'aider le roi,ils vont vite arriver à une évidence " il faut se débarrasser de brouillon de Gloucester!!! ". Ce ne sera pas compliqué car le personnage détient en lui les armes de sa propre destruction.
Sa vie dissolue, et le fait qu'il se servait à pleines mains dans le trésor royal, vont fournir à Winchester et Suffolck les arguments de sa chute devant le parlement.
Voila, le tableau est posé, les personnages principaux du moment sont figés, l'histoire de Marguerite d'Anjou peut commencer. A ce moment de notre récit Henri VI est un jeune homme de 21 ans, timide et cloîtré dans l'étude, la couronne a besoin d'un héritier pour asseoir le pouvoir de ce roi, et l'on parla donc en Albion de cette Marguerite fille d'un roi ruiné et sans couronne (le bon roi René)
Le jeune monarque voulut voir un portrait de sa cousine, c'est un chevalier Français, prisonnier à Londres ( Champchevrier) qui sera chargé d'en quérir un, au retour celui ci parlant de lui même le roi décida que nulle autre ne partagerait son trône. Le conseil fit donc des propositions à Charles VII de France, qui les accueillit avec beaucoup de courtoisie. Mais dures et longues furent les tractations,le chemin fut long et tortueux pour parvenir à un accord. Néanmoins Suffolck est à
Harfleur le 31 mars 1444 et début avril dans la résidence royale il demande officiellement la main de Marguerite. Les Français vont lui préciser que le roi René, du fait de ses campagnes de conquête de son royaume de Naples était ruiné, et donc la princesse était pauvre et sans dot.
Suffolck répondit que la nation anglaise toute entière tiendrait à honneur d'y pourvoir. De fait le conseil et Winchester en premier, pensait qu'il valait mieux une jeune fille bien née sans fortune, car on pouvait espérer que sa reconnaissance serait acquise aux artisans de son bonheur.
Marguerite embarque à Rouen pour se rendre en Albion, et le
Régent de France, Richard Plantagenêt Duc d'York vint s'incliner devant la future reine d'Angleterre. Un gros temps menaçait lorsqu'ils mirent à la voile, mais pendant la traversée les éléments vont se déchaîner, le
Cock of Charbourgh, commandé par
Maître Thomas Adams va affronter une véritable tempête!!!!.
Les voiles éclatent en lambeaux, et bientôt le mât sera rompu, ils vont être malmenés par les éléments, comme s'ils étaient embarqués sur une vulgaire coquille de noix et les passagers recommandèrent leurs âmes à Dieu.
Le 9 avril 1445 ce ne sont que les restes d'un vaisseau royal, que dis je ! une épave qui s"échouera sur la plage de
Porchester, assez loin de leur destination. Cependant le mauvais temps accompagnait toujours Marguerite, balayant les arbres et éventrant les cottages. Malade, trempée, les vêtements en loques elle se réfugie dans une misérable chaumière et s'endort recrue de fatigue sur une paillasse. L'aventure commençait sous de tristes cieux, les époux vont se rencontrer 15 jours plus tard à Southampton, le roi a 23 ans, un beau visage mélancolique avec des yeux doux et rêveurs, il semblait bien chétif au milieu de ses massifs et rudes Barons qui l'entouraient. Ce jeune homme semblait tellement bon, si rempli d'humanité! que Marguerite éprouvera rapidement un profond respect pour son mari, et ce sentiment ne devait plus jamais se démentir.
D'un autre côté à la cour les lords n'avaient pas le même raisonnement que notre petite princesse, ils contemplaient avec une certaine stupeur ce descendant chétif d'une des plus sauvage famille de conquérants. Pour mémoire, issu des Angevins, donc du trop célèbre Foulques Nerra d'une part, et des normands de Guillaume le conquérant d'autre part il faisait pâle figure au regard de ses ancêtres.
Le 22 avril les deux époux reçoivent la bénédiction nuptiale en l'Abbaye de
Titchefield ou ils passeront leur nuit de noces. De toute façon ils ne sont pas pressés d'entrer à Londres vu la mauvaise volonté du parlement pour voter les crédits nécessaires à l'ordonnance des festivités dans la cité !!!
Marguerite va observer avec curiosité cette ville orgueilleuse, fière de son opulence, qui renfermait dans ces murs une bourgeoisie puissante jalouse de ses droits, et une population chauvine à l'extrême, dangereuse et impulsive ( de ce côté du moins nous n'avions rien à leurs envier!!!!).
Le 30 mai le sacre eut lieu à Westminster, ou elle reçu l'hommage des princes du sang, des Lords et dignitaires du royaume, en ce jour sa grâce et sa majesté vont lui conquérir bien des coeurs, même
Lord Talbot ce vieux guerrier fut, ému et subjugué!
Une fois installée à Westminster ce qui choqua le plus notre jeune reine c'était l'exécution du pouvoir, car si le roi régnait comme en France, il ne gouvernait en fait que par la grâce des lords, du Clergé et du Parlement, celle ci était composée de deux chambres, celle des Lords et Pairs du royaume et celle des communes, ou siégeaient les simples chevaliers et chevaliers fieffés, les représentants des Comtés et les représentants des villes et des Bourgs du royaume.
Le parlement est jaloux de ses prérogatives, le vote de l'impôt, la désignation de l'héritier au trône, la possibilité de retarder ou refuser des crédits au roi, la mise en accusation des mauvais conseillers royaux. Mais surtout elle est gardienne de la loi, et celle ci ne peut être modifiée sans l'accord des deux chambres, ces privilèges conféraient au parlement la possibilité d'influer sur la politique de gestion du pays.
Il est important de noter que l'égalité devant la loi pour les lords et la bourgeoisie était une réalité en Angleterre, de ce fait il n'y avait aucun conflit possible entre les deux chambres. La reine s'aperçu très vite du peu d'intérêts que prenait son époux à gouverner!! De facto il était clair pour elle que cet homme savant, amoureux des belles lettres, et fondateur du Collège
d'Eton, n'était en aucune façon un politique. Mais Marguerite était lucide pour deux, elle voyait bien que l'héritier présomptif accusait une hostilité grandissante, notre benêt notoire de Gloucester n'avait pas digéré son éviction du pouvoir.
De plus il haïssait la France, donc par le fait sa propre reine elle même, il n'a d'ailleurs pas affaire à une ingrate, Marguerite abhorre ce déplorable personnage et ne rate aucune occasion de lui faire savoir tant en paroles qu'en actes!!!
Malheureusement il n'est pas le seul à lorgner sur le trône!! Richard ce fourbe de
Duc d'York régent de France, celui qui avait fait de si belles courbettes à sa future reine à Rouen, profite de la trêve pour faire de longs séjours en Albion, afin de fomenter mille intrigues avec la famille de Neuville. En fait la reine ne peut compter que sur deux personnes, Winchester qui l'initia aux arcanes de l'état anglais, et bien sur le fidèle Suffolck, le confident et l'ami. En 1447 au mois de février on fait arrêter et emprisonner Gloucester, la force de ce coup d'état frappe l'Angleterre et le parlement de stupeur, car tout le monde sait que ce n'est pas le roi Henri VI qui fait enfermer son benêt d'oncle!!, mais la reine et ses conseillers.
Malheureusement le Duc meurt dans sa cellule le 23 février et même si l'on sait qu'il était malade depuis longtemps, on ne put empêcher le peuple de crier à l'assassinat!! On ne sait pas s'il y a eut meurtre?, mais ils auront beau faire rien n'y fera la rumeur restera fort vivace.
C'était dans l'ordre des choses, mais cela tombait on ne peut plus mal, Winchester très âgé vient de mourir!, Suffolck est Duc depuis peu mais il se sent bien seul face à Richard d'York, que l'on considère déjà comme le remplaçant de Gloucester, de plus cet intrigant est marié à une Neuville, en entrant dans cette famille il possède un redoutable appui en la personne de Richard de Neuville, Comte de Warwick, jeune et bouillant, possédant des centaines de vassaux qu'il va mettre au service de la rose blanche des York et de Richard en particulier. De l'autre côté nous avons Somerset, chef de la famille à la rose rouge des Lancastre, et lui aussi n'est pas animé de bonnes intentions envers le roi en place, et la reine le sait bien.
Pour donner un peu d'espace à Suffolck, le dernier soutien du trône, menacé de toutes parts, la reine demande à Henri de nommer Richard d'York gouverneur d'Irlande, et Somerset comme nouveau régent de France, ils vont partir tous les deux en remâchant et ruminant leurs sinistres projets.
Pauvre Suffolck, sa situation va empirer, il a désormais contre lui les deux partis,et les deux roses ne manquent pas d'épines!! Il ne tardera pas à être convoqué à la barre de la chambre pour se justifier, mais la reine va réagir avec promptitude pour lui sauver la vie, la mort dans l'âme elle condamne cet ami de toujours du couple royal à l'exil avant que le parlement ne rende son arrêt.
Réfugié à Ipswich il apprend la défaite de Formigny, le pauvre homme décide de partir pour la France afin de pouvoir au moins mourir en soldat.
Mais Somerset ne lui en donnera pas l'occasion, il le fait arraisonner en mer et sur place instaure un tribunal fantoche ou après une parodie sinistre de procès le fait décapiter sur le pont de ce navire.
Somerset par son acte inqualifiable, mais aussi par son incapacité en tant que régent de France ouvre une voie royale à Richard d'York vers le pouvoir. Il ne tardera pas à être convoqué devant le parlement ou les partisans de la rose blanche des York dominent dans les deux chambres, la cause est entendue!! cela va être mené rondement, Somerset est condamné et emprisonné à la tour de Londres. On voit que Richard d'York et la puissante famille de Neuville tirent de plus en plus de ficelles de l'appareil politique Anglais.
Nouveau coup de théâtre de la Reine, elle réagit avec rapidité et violemment, est ce la peur de ce fourbe de Richard d'York, qui était un proche du détestable Gloucester, qui bien que mort semble encore si présent au travers de Richard ?? Toujours est il qu'elle fait élargir Somerset de sa prison (l'assassin de son ami Suffolck!!) et le fait nommer Connétable d'Angleterre.
De ce fait elle prend parti pour la rose rouge, par cette décision elle retire au roi son rôle d'arbitre du conflit, liant leur sort à tous deux à la famille de Lancastre
La guerre des deux roses pouvait commencer !!!!
C'est encore elle qui mènera la lutte des Lancastre jusqu'à la bataille finale de
Tewkesbury, elle sera emprisonnée à
Walllingford. Sept ans plus tard Louis XI versera 10 000 livres pour sa libération, Marguerite devait en contre partie renoncer à tous ces droits sur l'Angleterre, elle meurt à Saumur à l'âge de 53 ans.
PS: Henri VI fut le seul roi d'Angleterre à vraiment pouvoir porter le titre de roi de France et d'Angleterre, car il fut le seul à être sacré en France, pour faire barrage à Charles VII qui fut sacré à Reims avec l'aide de Jeanne d'Arc
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