Nous avons déjà cité ce personnage dans un article précédent, concernant la corporation des Apothicaires.Il est indissolublement attaché à l'histoire du monde du travail et des corporations. Nous ne savons que peu de choses sur
Etienne Boileau ou
Boileaue, selon les manuscrits, né aux environs de l'an 1200, on sait qu'il est marié en 1225, qu'il suit Saint Louis lors de la croisade de 1248, qu'il sera fait prisonnier en 1250 et mis à rançon.
Sa vie politique ne débute qu'en 1258, lorsque
Louis IX le nomme à la Prévôté de Paris, fonction la plus élevée de la Capitale. Le
Prévôt Boileau est donc le premier magistrat de sa ville, représentant du Roi et de son autorité.
Il administre les finances, commande en chef le Guet Bourgeois, assurant de ce fait l'ordre et la sécurité publique, avec les prérogatives du pouvoir judiciaire et le droit de légiférer au Châtelet.
C'est de ce poste au Châtelet qu'il entreprend l'immense tâche de répertorier, codifier et réviser tous les statuts des corporations. Il va mettre de l'ordre dans ce chaos que sont les dispositions qui régissaient les corporations.
Il va leurs enseigner leurs obligations et leurs droits, prévenir les malfaçons, les déloyautés etc.., le tout dans un document appelé le Livre des métiers.
Joinville dans ses mémoires le cite comme quelqu'un d'intègre, que brigands et fraudeurs de tout poils craignaient comme la peste.
Le livre de Boileau devait rester à travers les âge, le bréviaire des corps de métiers parisiens. Pour le prévôt nous ignorons la date de sa mort, sachant qu'il occupait encore son poste en 1267, mais plus en 1270.
L'esprit des corporations du XIII et XIV siècles était le même partout, France, Allemagne, Angleterre, donnant naissance à des coutumes identiques. On cherche à empêcher que quelques uns s'enrichissent abusivement au détriment de la collectivité, afin d'assurer à chacun son pain quotidien.
Exemple on peut citer un conflit existant entre
Couteliers et
Gainiers Fourreliers, les premiers voulant fabriquer des étuis pour leurs couteaux, mais ce n'était possible, selon les ordonnances que dans le cas ou le fourrelier ne pouvait honorer sa commande à temps.
Une corporation à pour base la répartition des artisans en trois classes, apprentis, valets et maîtres c'est à dire ceux qui s'instruisent, ceux qui servent et ceux qui commandent, avec pour chacun d'entre eux des droits et des devoirs.
Mais tous ne deviennent pas maître, car si l'apprentissage fini nécessairement avec le temps, faisant passer l'apprenti au stade de valet, la maîtrise est une autre affaire.
La promotion à la maîtrise suppose des connaissances et un certain avoir que beaucoup ne posséderont jamais. De plus c'est au XIV siècle que le compagnonnage devient obligatoire, et l'on introduit dans le statut des corporations la réalisation et la présentation d'un chef d'œuvre en fin de parcours.
L'autorité supérieure dans une corporation est confiée à des prud'hommes jurés, élus parmi les maîtres de ce corps de métier. Leurs fonctions sot temporaires, ils surveillent la fabrication, les malfaçons, peuvent effectuer des saisies, ils ont aussi les protecteurs désignés des apprentis.
Aucune limite d'âge n'est fixée pour l'apprentissage, nous dirons entre 10 et 12 ans, et accepté par un maître. Cependant il ne suffisait pas toujours d'avoir la maîtrise pour enseigner, car les règlements des métiers ne permettait à celui ci d'avoir un apprenti que s'il offrait les garanties nécessaires dans l'intérêt de l'enfant dont il demandait la garde.
Exemple, on interdira à un maître qui vient de s'installer de prendre un apprenti pendant un an et un jour, afin qu'il soit libéré des embarras d'une entreprise à ses débuts, qui ne laissaient pas toujours à l'artisan le temps d'instruire.
Parlons d'une corporation dont on ne sait pratiquement rien quand à son organisation et pour cause!!
Les Bouchers, sont avec les porteurs d'eau la plus vieille corporation de Paris, l'organisation en était toute particulière. Quelques familles, les Bonnefille, les Thibert, les Amilly et surtout les Saint Yon exerçaient sur le métier un pouvoir oligarchique héréditaire
Jamais corps de métier ne fut plus jaloux de ses privilèges et les défendit avec tant d'ardeur et d'obstination. Propriétaires de leurs étaux et les seuls qu'il fut permis d'exploiter, les bouchers refusaient systématiquement de louer ou de céder ces emplacements à d'autres que des fils de bouchers, le métier était totalement verrouillé.
Tous établis derrière le Châtelet ils versaient une redevance annuelle aux religieuses de Montmartre (anciennes propriétaires ) de 50 livres. Leur monopole fut confirmé en 1297, ils ne subirent qu'une seule attaque contre leurs privilèges dans les années 1280, par le tout puissant ordre du temple, qui se prévalant de leur droit de seigneurie sur un faubourg de Paris avaient ouvert des boucheries.
Il y eut procès ! et le parlement autorisa le temple à ne conserver que deux boucheries, ce qui au vu du rapport de force vous laisse mesurer la puissance des bouchers parisiens. Personne à ce jour n'avait réussi à restreindre sur une terre seigneuriale, et contre le gré du seigneur l'exercice d'une profession.
Les bouchers cachaient soigneusement leurs titres et leurs archives, surement par crainte que le pouvoir royal n'entreprît de diminuer leurs franchises.
C'est aussi pour cette raison qu'ils ne firent pas enregistrer leurs règlements lors de la rédaction du livres des métiers d'Etienne Boileau. Il sera constaté quatre siècle plus tard la même détermination, la même méfiance et le même esprit de dissimulation. De plus ils joignaient au commerce de la viande abattue, celui du bétail sur pied et faisaient également l'élevage et l'engraissage.
C'étaient des gens au sang chaud qui filaient les miquettes à tout le monde, même pour l'époque!!, parlant fort, souvent couvert de sang, avec toujours un hachoir ou un grand couteau en main.
Du coté des
tailleurs la mode au XIV siècle abandonne la cotte hardie,ajustée à la ceinture et qui tombait jusqu'aux pieds, par dessus laquelle on revêtait une tunique appelée surcot, car l'homme porte désormais un vêtement court, d'étoffe riche et colorée nommé
Pourpoint.
Véritable révolution vestimentaire, le pourpoint crée deux nouveaux métiers (statut de 1323), les
pourpointiers et les
doubletiers, qui doublaient intérieurement d'étoffes les vêtements de nos tailleurs pourpointiers. Ce qui n'était pas du gout de tout le monde, mais bon la mode ne se discute pas!!!
Dans le domaine des vêtements Les
fripiers vendaient des affaires d'occasion, selon les ordonnances il leur était interdit d'acheter et à plus forte raison de vendre des habits mouillés ou sanglants, entendez par la des vêtements ayant appartenu à des noyés ou à des victimes de meurtres, nous ajouterons bien sur les affaires ayant été portés par des lépreux.
Le Serrurier: les mots serrure, serrurerie et serrurier, viennent du verbe serrer, qui dans bien des régions de France était équivalent de renfermer ou de clore.
Son travail était donc très varié allant des grilles de fenêtres, des portails, ferrures de portes, serrures, et même des "
Orloges ".
Au Moyen âge le serrurier ne se sert presque jamais de la lime pour terminer ses ouvrages d'art, il la connait bien sur mais ne s'en sert que pour de menus travaux,l'art consiste à n'utiliser que le fer les pinces et surtout le marteau
Le marteau, cet outil qui donne les reliefs mâles et puissants, ce martelage qui donne une fois le produit fini cette impression de robustesse.
Cet ouvrier, ou ce maître serrurier, aime son travail, son adresse est sans égal, le métal lui obéit au gré de ses inspirations ou de ses fantaisies
Le fer utilisé au moyen âge était fabriqué et façonné en le chauffant avec du charbon de bois, la houille ou charbon de terre est pour ainsi dire inconnue.
La houille ne s'exploitait que dans certaines régions comme le Boulonnais, le plus souvent sur des gisements considérés comme à fleurs de terre.
D'une part il était rare, et d'autre part il était mal considéré de pratiquement tous les forgerons, parce que difficile d'emploi et ne fournissant pas rapidement les températures voulues
Mais les forgerons considéraient surtout, que seul le charbon de bois donnait certaines propriétés au fer, une certaine souplesse, en le chauffant, que la houille ne pouvait fournir.
Au XIII siècle le charbon de bois valait un denier le sac, comme en témoigne le vieux cri parisien: "
Charbon le sac por un denier "
Dès le XIV siècle nous comptons parmi les serruriers d'habiles mécaniciens fabricants
d'Orloges à poids.
Tel était Gérard de Juvigny, Orlogeur au Louvres en 1328, ou Robert d'Origny, Fèvre et Orlogeur du Roi en 1380, on peut citer encore:
Henri de Vic qui à la même époque plaça une horloge dans l'une des tours du palais, ou un Jean de Loisel, maître de l'Orloge du Beffroi d'Amiens.
L'acier dont se servait le serrurier du XIII siècle était semble t'il de l'acier poitevin, nous trouvons, dans l'inépuisable source qu'est le livre des métiers de Etienne Boileau, une ordonnance concernant le péage pour les marchandises entrant dans la capitale:
Acier Poitevin, 4 deniers par charrette, puis 2 deniers à dos de cheval et 1 denier à dos d'âne
La fonte payait 2 deniers et le fer forgé 4 deniers, on achetait le fer sur le marché de foire, ou plus au détail chez le ferron
PS: Les corporations sous
Louis XI (1461-1483), le génie profondément politique de l'universelle araigne, comprit de suite toute la force que recelait en elle une organisation telle que celle des métiers, il résolut donc de placer les corporations sous sa tutelle immédiate et d'en faire les clientes et les protégées de la royauté. Son premier soin fut de réviser toute la législation des métiers, moins pour y introduire des modifications, que pour affirmer sa volonté de ne laisser périmer aucun des droits du pouvoir royal ....M de V.