Or donc, il faut bien avouer que la guerre de cent ans (1337-1453) avait tout dévasté, nombre de châteaux sont rasés, routiers, écorcheurs et soldats de tous bords ont pillé la Dordogne !. Autour des villes murées, le plat pays est désolé on n'y trouve plus que bêtes des bois
Vingt cinq ans après Castillon, qui sonnait le glas de l'armée de l'Anglois, la plupart des terres autour de Périgueux, ne sont que déserts de friches. A l'intérieur du rempart d'enceinte de la ville, bon nombre de murs sont lézardés, les charpentes disjointes et les toitures effondrées !
Si avant la guerre, la commune cloture renfermait plus de 1500 Bourgeois, à l'avénement de Louis XI on n'en compte plus que 366, je n'ose même pas vous parler du pauvre Manant de citadin, qui faute de moyens crevait la faim !
Lorsque prend fin cette période guerrière de 116 ans, entrecoupée de Trêves et de Traités, les contours de la cité de Périgueux montrent une haute muraille crénelée, dessinant un fer à cheval fermé par le cours de la rivière. A qui vient de l'extérieur, le Bourg montre fièrement ses douze portes et ses trente et une tours. Dans le corset bien serré de ses murs, quel dédale de ruelles, venelles et cafourches (carrefour) !!!
Quel fouillis de maisons et d'ateliers de commerçants, s'entassant sous le regard de la sentinelle du Guet qui veille au sommet du clocher de Saint Front. Si étroites sont les rues que notre guetteur ne voit que toits pentus et jardinets enclos de murs !
La Bourgeoisie y constitue le monde des marchands, dans cette couche de la société se recrute les Consuls (adjoints du Maire), quand au Maire, ce sera un Bourgeois ou un représentant de la petite Noblesse régionale. Un Forton de Saint Astier, Seigneur des Bories, sera élu plus de 10 fois au cours de sa vie
Les Consuls sont au nombre de neuf et pouvant aller jusqu'à douze, élus pour un an à l'Hostel de Ville, ils le sont par les Consuls sortants, ces notables éliront le nouveau Maire, pour une durée d'un an comme les Consuls
Dépendants de l'hostel de ville, on trouve les petits officiers de Police. Ils sont 4 Sergents, plus un Géolier et le Bourreau, vêtus de chausses violettes, et la cotte mi parti de Pers (bleu foncé), et de violet. Le maire dispose également d'une Milice municipale. En ce qui concerne la justice, Périgueux dispose d'un Juge et d'un Procureur
L'indépendance d'esprit de nos Bourgeois de Périgueux se retrouve jusque dans leurs vies professionnelles. Car on a beau consulter les archives, pas une seule fois on trouve la mention d'une quelconque Corporation ou Guilde de Métier ???
Tisserands, marchands Drapiers, Merciers, Teinturiers et Foulons, restent des artisans libres. Il en va de même pour les Savetiers, Bouchers, Chapeliers etc...Ils ne sont même pas, ormis les Bouchers, regroupés par rues, comme c'était le cas pour Sarlat par exemple, ou l'on trouvait métiers et guilde regroupés par secteurs
Les paysans qui venaient au marché hebdomadaire, vendre leurs produits pouvaient se procurer tout ce dont ils avaient besoin, outillage bêches, pelles, pioches, soc de charrue chez le Fèvre, puis vêtements, souliers, sabots et chapeaux sur l'étal des artisans
Ils trouvaient nombre de tavernes et auberges ou boire le clairet et l'hypocras, voir même s'ils avaient fait de bonnes ventes, entrer chez le pastissier, rue Eguillerie pour acheter des oublis ! ou encore faire une repue à l'auberge, mais c'était plus cher !
Il y avait trois foires annuelles, celle de la Saint Mémoire, de la Saint Front et de la Mi-Carême, peuplant ruelles, places et cafouches d'étals de marchands attirants à grand cris le chaland et le curieux, dans le même temps cela remplissait aussi la prison de malandrins, tire laine et vide goussets !!
Dans les archives est noté la présence de quelques Barbiers Chirurgiens et un ou deux médecins. En 1480, le Sénéchal donne chasse à ceux qui prétendent soigner les malades, sans être détenteur d'une licence ou d'un doctorat en médecine des Universités. Cela tombait bien, la plus réputée et la moins éloignée était celle de Montpellier, ou étudiera, à quelques années de la, François Rabelais
Il existait aussi, bien sûr des barbiers qui rasaient taillaient barbes et cheveux, ne s'occupant ni des saignées, des dents, des furoncles et kystes, et autres joyeusetés, réservées aux chirurgiens et médecins. Tout un chacun allant chez l'Apothicaire chercher remède sur ordonnance de ce dernier...mais c'était pas donné !
De ces citadins, quelles sont les conditions de vie, que gagnent ils ?. Le Sénéchal touche du Roy 300 livres par an (environ 3600 euros mensuel), Juge et Receveur Royal 100 livres par an ( environ 1220 euros mensuel).
Pour le manant, simple Manouvrier, il est payé à la journée par la ville et gagne deux Sols (ou sous) par jour, alors qu'un ouvrier qualifié, charpentier ou couvreur, touche deux Sols et demi par jours.
Si l'on tient compte des dimanches et des jours chomés pour les fêtes religieuses, il reste bon an mal an, 280 jours ouvrables. Ce qui fait que le manouvrier touche 28 Livres par an (environ 341,72 euros mensuel), et l'ouvrier qualifié 35 Livres par an (environ 427,15 euros mensuel)...c'est peu !!!
Le loyer annuel va de 4 à 30 Sols (ou sous) en fonction du logement, pour la cité la moyenne se situait autour des 14 Sols, soit environ 102,52 euros à l'année. Espérons que le Manouvrier trouvait à se loger pour 4 Sols !...sinon il ne lui restait pas grand chose pour manger, encore fallait il se chauffer et s'éclairer mordious !
Un repas dans une taverne ou une auberge se paie 8 Deniers (environ 4,88 euros), car peu de gens dans les cités mangeaient chez eux, faute de place ils n'avaient pas de cuisine, c'était soit le marchand d'oublis soit la taverne. Une charette de bois de chauffage coûte 8 deniers soit le prix d'un repas à la taverne !
Pour l'éclairage la bougie de cire, luxe des gros bourgeois vaut 3 Sols et 8 Deniers à la Livre, soit 26,85 euros le lot d'une livre de bougies, la Chandelle de Suif, qui vous empuantis la maison coûte en revanche moins cher, 12 Deniers la Livre soit 7,30 euros la livre de chandelles
PS: La ville est pauvre mais la bourgeoisie est riche à tel point que grace à leur Or ils passeront de la Bourgeoisie à la Noblesse, épousant des filles de Nobles du Périgord ruinés par la guerre de cent ans...on nommait cela la Savonnette à Vilains....M de V
Nota: ce n'est que 22 ans après Castillon, en 1475, au traité de Picquigny que Louis XI signa le seul document qui mettait fin à la guerre de cent ans !!!!