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mercredi 17 décembre 2025

Boulazac une Paroisse, un Village et un Fief au moyen âge

En introduction ouvrons une porte et permettez moi une digression, car comme je le dis toujours, le moyen âge est une cathédrale dont le sol est pavé d'hypothèses plausibles ! Boulazac comme tant de communes dérive sans doute d'un grand domaine du Bas Empire Romain, un endroit ou la pioche découvre encore sans peine des fragments de marbre et des restes d'enduits recouverts de peinture à fresques

Boulazac vient de naître sous le nom d'un riche propriétaire, pourquoi ne se nommerait il pas Bullatius ? qui donne Bullatiacum, Bolazacum puis Boulazac. Le domaine va égrèner ses manses (habitation rurale) sur les coteaux là ou s'élèvent aujourd'hui les hameaux. Nous sommes vers 275 et pendant que l'on retire les meilleurs légions des frontières de l'empire, les hordes Alamanes, dans une chevauchée foudroyante, ravagent les provinces découvertes depuis le Rhin jusqu'en Aquitaine et Boulazac va subir sa première et terrifiante invasion !! 

Cette petite concentration d'humains dans leurs manses va grandir sous l'aile protectrice de Périgueux (voir article) la cité fortifiée avec ses trente tours sur son mur d'enceinte, la tutelle ne sera pas facile à vivre et la main qui dirige sera souvent bien lourde !. Passons donc en revue, en décortiquant la chronique de Boulazac, la population de cette bourgade les Bourgeois, les Damoiseaux et les paysans !




La noblesse à Boulazac, ne repose pas sur la concession d'un Fief de Chevalier et l'on n'y compte aucune Seigneurie titrée. Le voisinage de la puissante enceinte de Périgueux avec ses tours a rendu superflue la construction d'un Château fort destiné à servir de refuge aux paysans menacés par les Normands

D'autre part, Périgueux possède très tôt une milice suffisante pour limiter les conflits entre voisinage et lignages dont le plat pays ne souffrira qu'aasez peu

Sous les derniers Capétiens directs une grande prospérité règne sur le royaume que Jehan Froissart qualifie de " gras et dru ". Par le fait de nombreux Bourgeois enrichis par le négoce deviennent propriétaires en banlieue, ce sont gens avisés et âpres aux gains,

Exemple: en 1328, le Consul ( membre du conseil des villes sous l'autorité d'un Maire ) Rampnaulf possède une fort jolie terrasse dominant Boulazac, la vue est si plaisante que notre homme y fait bâtir une solide maison à laquelle va s'attacher le nom patronymique, la propriété de Rampnaulf devient de Rampnolf, puis de Ranolf, ensuite de Renolf  pour finir par la Renolphie ! 




La paroisse de Boulazac est administrée par son Seigneur, c'est à dire le Consulat de Périgueux et son juge. pour ce qui est du domaine religieux c'est géré par l'assemblée des habitants convoqués à l'église par le Curé et formant le conseil paroissial ( le général de la paroisse ). Celui-ci doit élire ou tirer au sort les Asséieurs, deux charges redoutées pour la collecte des Tailles ( voir article )

Parmi les anciens impôts un des plus lours et le " commun de la paix " établi pour l'entretien des troupes destinées à faire respecter la Trêve de Dieu. Il se levait chaque année, entre le 15 Août et le 8 Septembre de la façon suivante : Par habitant Mâle et adulte 12 deniers, pour son cheval 6 Deniers, pour un Boeuf, une vache ou un âne 6 Deniers, pour un Porc 1 Denier et pour chaque lot de 4 Moutons ou Chèvres 1 Denier

En 1339 la paroisse de Boulazac est imposée pour 4 Livres Tounois, 3 Sols et 9 Deniers en monnaie Royale ...ce qui donne avec mon convertisseur de monnaie 587,02 Euros !!!

Pour le pauvre Serf attaché à sa tenure Mainmortable ( voir article ), sauf in legs de 5 Sols pour le salut de son âme, il est Taillable et corvéable à merci, il sont les successeurs des esclaves chasés de l'époque Franque et ils mèneront une vie pitoyable au cours du Haut moyen âge




Mais au XIII siècle la multiplication des exploitations rurales entraine une grosse demande de main-d'oeuvre et provoque des affranchissements massifs. Déjà au XI siècle le départ pour les croisades avait poussé les Seigneurs Périgourdins à multiplier les affranchissements pour financer leurs expéditions

Désormais la Censive ( Terre concédée moyennant un Cens Annuel payé au Seigneur ) est la Tenure normale dans la condition des Terres. En dehors des Tailles municipales et des redevances, le Seigneur exige encore de ses tenanciers le Droit de Gîte de Prise et de Pourvoirie ( voir article ), ainsi que les Banalités  du Moulin, du Four et du Pressoir sans oublier la Dîme prélevée par l'Eglise ...le Roturier médiéval est écrasé d'impôts

Puis nous avons les Corvées Domaniales leur exécution se heurte à une mauvaise volonté de la part des paysans rebutés, hostiles et naturellement chicaneurs. Aussi à Boulazac ces corvées sont abandonnées et rachetées sous formes de taxes. Mais il n'en va pas de même pour la Corvée d'Intérêt Public que le Consulat de Périgueux exige de façon rigoureuse, sans aucune possibilité de rachat. Tout le monde participe à l'entretien des chemins, des fortifications citadines et des défenses extérieures sous peine de sanctions les plus sévères !




Parmi les privilèges attachés à Périgueux figure la dispense du Ban et de l'arrière-Ban (voir article ). Mais chacun doit le service militaire aux Consuls donc Boulazac aussi, les Vilains installés sur leurs terres ne servent qu'à titre subsidiaire pour le service du Guet

Toute la police locale est confiée aux 14 Sergents de Périgueux, volontiers brutaux ils molestent souvent les paysans de Boulazac qui jamais ne se permettront de les malmener à la différence de certaines femmes de Puy Saint Front. En 1328 Raymonde Chastanh est condamnée à 20 sols d'amende pour avoir battu un sergent et l'année suivante les dits sergents se plaignent de femmes qui les frappent jusqu'à effusion de sang 

L'habitation paysanne de Boulazac se présente dans une saisissante pauvreté. Comme les carrières abondent au pays elle est faite de murs trapus en pierres sèches adroitement assemblées et couvertes de tuiles du pontet, plus misérables encore, mais plus rares, les chaumières en torchis sur une charpente grossière

Maisons à pièce unique remplissant tous les offices, même celui de cellier elle communique avec l'étable placée sous le même toit




L'année s'écoule morne, au rythme des saisons dont la plus accueillante reste sans joie puisqu'ils faut consentir toujours un accablant tribut de travaux pénibles et de corvées

La grande distraction, la seule, c'est le marché de Périgueux, la grande foire de la mi-carême et surtout celles de la Saint Mémoire et de la Saint Front qui durent chacune 15 jours sans désemparer. Comme ces deux dernières sont aussi des Pélerinages ( voir article ) elles attirent des foules immenses au tour de la châsse du Saint Apôtre

Tout ce que Boulazac peur compter comme gens valides se ruent vers la Clautre et le Cordec ou les marchands ont installé leurs éventaires, tandis que les boutiquiers ouvrent leurs étals . Les femmes vont marchander les hommes trainent dans les tavernes pour ensuite échauffés par de multiples pots de vin se diriger clandestinement vers le quartier des ribaudes tellement malfamé que le guet y circule sans arrêt !!

PS : cet article est tiré des Chroniques de Boulazac transcrites par Jean Dumas et Michel Combet aux archives de Périgueux...à bientôt M de V


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