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vendredi 28 avril 2017

La bataille de Cocherel suite 2/2

Relatons cette bataille qui eut lieu si prés de notre cité, et qui sera la première victoire Française de cette guerre de cent ans. C'est grace à Pierre Naudin écrivain et archiviste hors pair et aux actes du colloque international de Cocherel, sans oublier André Plaisse grand spécialiste de Charles II roi de Navarre, que je pense pouvoir me permettre de donner ma version de cet engagement.

Jean de Grailly se sachant maître du terrain prend calmement ses dispositions. Comme aux échecs, les pièces sont en place, Crécy: Edouard III contre Philippe VI de Valois, Poitiers: le prince Noir contre Jean II le Bon, une fois de plus les Anglais ont les blancs.
On peut considérer qu'ils ont deux coups d'avance, ils tiennent la position haute, disposent des meilleurs archers du monde, ceux sont eux qui sont les réels gagnants des deux premiers engagements. Pour Jean le raisonnement est simple, "vous m'avez fixé!, je ne peux plus empêcher le sacre de Charles V !,venez me chercher...!!







Le breton en son particulier prédicament, réfléchi, il sait que le temps joue contre lui, que le Captal doit recevoir un renfort d'environ 300 Lances ( 900 hommes). Sa position est défavorable, ses troupes ont le dos à la rivière, ce qui lui pose un problème de ravitaillement et qui lui interdit toute possibilité de repli rapide en cas de débordement. L'attente est longue, les armées se font face et dans le silence de cette riante campagne normande, on n'entend que le claquement des bannières et le hennissement des chevaux. Il fait très chaud en ce mois de mai 1364, les hommes ont faim, ils sont nerveux et les chevaux aussi.

Dugesclin envoi un messager vers les Anglais, pour lui faire savoir qu'il l'attend sur la plaine pour le combattre, il faut bien le dire le stratagème est grossier, même si Bertrand n'était pas à Poitiers, il devait être au courant des prouesses du Gascon et du rôle qu'il joua aux côtés du Prince Noir.


On ne sait si Jean goutta la plaisanterie ? il se contente de congédier le messager avec un refus courtois, bien décidé à maintenir sa position. Il n'est plus pressé désormais, il a des vivres, il tient la meilleure position, un chemin de repli sécurisé, il peut attendre ses renforts sereinement.








Au soir du 15 mai, nous en sommes là: le Gascon ne veut pas descendre et le Breton loin d'être un sot ne veut pas monter !! Ils ont tous les deux raison, si l'un monte il se fait hacher par les archers, si l'autre descend il perd le bénéfice de ses archers qui ne lui seront plus d'aucune utilité en plaine, ou ils seront laminés par des hommes d'armes couverts d'acier.

La nuit va descendre enveloppant de son frais manteau hommes et chevaux, sur le tertre comme dans la plaine les feux de campements sont allumés, les hommes se délassent

Au matin du 16 mai une brume rasante se dissipe, il avait fait chaud hier, le soleil avait chauffé la terre, des deux côtés hommes et chevaux ressemblent à des fantômes. Bertrand tient conseil, le temps lui est compté petitement, de plus Arnaud de Cervolles quitte la place refusant de se battre contre le Gascon!









Cela ne dérange pas Bertrand qui n'avait aucune confiance dans l'Archiprêtre, le personnage fut fidèle a Jean II le bon, même au plus fort de la bataille à Poitiers, mais c'est un routier! les liens qu'il noue n'appartiennent qu'à lui. Bertrand tente une ruse, fait semblant de rompre et sonner la retraite, fait repasser l'eau à son train d'équipage, avec valets et pages, fait montrer croupières par ses batailles et prend la direction du gué. Pour donner quelques crédibilités à son action il fait également passer quelques chevaliers. Grailly observe et laisse faire, lui aussi connait son adversaire, il sait très bien que le Breton ne se retirera pas sans combattre, dans le monde des routiers si l'on doit se combattre entre gens du même monde, cela n'empêche pas le respect des qualités guerrières de l'autre. Le Captal n'en démordra pas, il commande de tenir la position, Jean Jouel est nerveux, il crie " ils fuient, ils fuient attaquez !!!" Jean réitère l'ordre de maintenir la position, hélas malgré son prestige, il n'est ni Edouard III, ni le Prince Noir, ses exhortations vont rester vaines, son ost est formé de troupes disparates de routiers de tous poils qui ont l'habitude d'obéir à leur capitaine!! Et la bataille s'ébranle, Jean jouel est bien décidé à tailler des croupières aux Français.









Dugesclin jubile, sa ruse bien que grossière a fonctionné, il espérait bien qu'une partie des troupes réagiraient, il ne lui reste plus qu'à effectuer une brusque volte face. Jean de Grailly n'a plus le choix!! C'est d'un coeur mal content qu'il se résout à descendre de son tertre avec ses deux autres batailles, comment pourrait il, même s'il maudit Jean Jouel, le laisser seul se faire massacrer par les troupes de bertrand. Nous y sommes, les deux troupes se font face, Jouel qui s'est aperçu de son erreur prend du champ et peu rejoindre les deux batailles bardées de fers du captal.

Imaginez vous avec ces deux armées, faites de chairs de sang et d'aciers, dans l'un des deux camps, mais seul dans votre armure! avec la peur qui vous tord les tripes, et la sueur qui dégouline de vos spalières dans vos canons de bras, pour finir par poisser vos mains dans vos gantelets, dites moi, est ce que la panique ne vous prendrait pas par le simple fait d'avoir un champ de vision réduit à la seule fente minime de votre protection de tête ???? réfléchissez bien avant de répondre......! Selon Delachenal, les forces semblent bien réparties, un millier de cavaliers de part et d'autres et l'équivalent en gens de pied, ce qui pour ma part me semble plausible si l'on tient compte du terrain, quand on est sur place. Le sort des armes sera dans un premier temps favorable au Captal de Bush, mais ses archers vont bien vite se débander, ils ne sont pas comme à Crécy ou Poitiers, protégés par des obstacles naturels, rapidement les arcs sont inutiles et la mêlée devient inextricable et particulièrement meurtrière pour ses archers, Jean Jouel est grièvement blessé. Cette masse de combattants acharnés, enchevêtrés, piétinants ceux qui sont tombés va lentement se déplacer, et les troupes Anglaises seront bientôt acculées à une vigne.









C'est alors qu'une forte réserve de cavalier ménagée par Bertrand, charge écartelant en un long sillon sanguinolent les combattants sur la plaine. Plusieurs ilots épars de fureur guerrière se sont formés, mais dans un coin, le regard vide fixant le ciel, meurt Jean Jouel tel un béjaune baignant dans son sang. Jean de Grailly se bat comme un forcené mais il sera enveloppé par un petit groupe de cavaliers, ceinturé et emporté loin du combat. la bannière d'or à la croix de sable chargée de cinq coquilles d'argent des Grailly vient de tomber, ce qui met fin aux combats.

Sur la plaine dans ce jour finissant qu'éclaire encore un soleil rouge, on pouvait voir cette terre de Cocherel tel un charnier recouverte de moribonds et de cadavres. Bertrand rentre à Rouen avec Jean de Grailly, prisonnier à rançon d'un certain Roland Bodin, il sera en fermé au Château de Meaux.


C'est à Reims que le Roi Charles V recevra la nouvelle de cette victoire, son règne débute sous de bons auspices pour ce roi élevé à l'école de l'adversité. M de V






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