Membres

mercredi 26 avril 2017

Tandem militaire Charles V et Du Gesclin

Au fil des siècles bon nombre de romanciers et d'historiens ont brossés des portrait de Bertrand Dugesclin, pour certains, c'est un preux, un capitaine courageux, pour d'autres, un fieffé brigand, un ambitieux avide d'honneurs et d'argent, ou encore un être sans foi ni loi, capable de n'importe quel forfait pour arriver à ses fins.Il fait au moins l'unanimité sur un point " il est très laid "

On sait peu de choses sur lui au début de la guerre de cent ans, son meilleur biographe Siméon de Luce, le cite au tournoi de Rennes en 1337, Froissart au siège de Rennes en 1342, je ne cite pas Cuvelier, car dans son poème tout est flou, de plus il ne le connut point, il est fort probable que ce poème fut commandé après la mort du Connétable.









Qu' il soit ambitieux, avide d'honneurs et de richesses soit ! Mais qui ne l'était pas parmi cette noblesse qui gravitait autour du pouvoir ? Il entre de plein pied à la cour de son Suzerain, mais celle ci ne l'accepte pas, bien sur ce n'est pas un chevalier féru de romans Arthuriens, nous pourrions dire qu'il n'est pas à la mode. Mais dans cette période troublée ou les trahisons sont permanentes, il sera indéfectiblement attaché à son roi!

Bien sur on le disait plus bouvier que chevalier, parce qu'il était proche de ses hommes et qu'il vivait comme eux. Mais c'est surtout parce qu'il réussissait la ou nos rutilants guerriers avaient échoués que l'on ne l'aimait pas.

Charles V n'est pas un doux rêveur non plus, il ne s'y trompe pas lui ! ayant étudié longuement Végèce, il voit tout le potentiel que représente Bertrand. Il veut en faire le chef de ses armées, Charles V, n'est pas un roi qui se bat, c'est un monarque qui dirige son pays depuis son trône, laissant à des plus professionnels que lui la réalisation de ses commandements








Il faut aussi concéder à nos rutilants chevaliers et à ces grands du royaume, que Bertrand leur renvoyait en pleine figure comme une insulte leur humiliante défaite contre les routiers à Brignais.

Car notre dogue de Brocéliande se bat et emploi les mêmes techniques, d'utilisation du terrain et du combat que les combattants des grandes compagnies, la coupe est amer, et la bile leur gâte le palais !!!!

La bataille de Cocherel va opposer deux grands guerriers Jean III de Grailly Captal de Bush et Bertrand Dugesclin .




A quelques temps de la, je vous conterai par le menu
cette bataille, ayant arpenté en long en large et en travers les lieux de ce combat M de V.

mardi 25 avril 2017

La mort du roi Jean II en Angleterre


Pourquoi est il mort la bas ,, me direz vous, alors même qu'il fut libéré dés le premier versement de sa rançon !. Lui oui, mais pas les quatre princes de sang royal; les Ducs de Berry, de Bourbon, d'Anjou et d'Orléans. 

Le roi Edouard III va profiter de l'envie qu'ont ces princes de  rentrer dans leur pays. Il leur permet de rentrer en France, en échange de certains châteaux du Berry qui devaient être remis entre ses mains, les princes furent donc envoyés à Calais, jusqu'à temps que ces places fortes lui soient livrées.

Mais voila, les états généraux rassemblés à Amiens, en octobre 1363, vont refuser la libération de ces princes aux conditions du roi d'Angleterre. La déception est grande !, l'un des prince, le Duc d'Anjou, va se sauver profitant de l'aubaine d'être sur le continent.

Il retrouve sa liberté au détriment de la parole donnée. Si je voulais citer Du Haillan, notre quinteux historien du XVI siècle, quand il parle de liberté: " ce nom de liberté est un breuvage empoisonnant les entendements des mérangeoises humaines "



Sommé de venir reprendre ses fers, il refusera catégoriquement de quitter sa patrie. C'est la que l'esprit chevaleresque de Jean II le bon prend toute sa mesure, le roi décide de réparer la faute de son fils, en se constituant prisonnier. Le sujet est très débattu, certains pensent qu'il retournait en Albion pour exhorter Edouard à partir en croisade pour la délivrance de l'Isle de Chypre, d'autres que c'était par l'ennui que lui procurait les affaires et les misères de la France. Mais si l'on en croit notre persifleur historien, Du Haillan, qui nous dit " c'est plus pour la belle Comtesse de Salisbury, que pour sauver l'honneur de son fils ".


Je laisse à de plus doctes que moi, le soin de trancher sur les raisons de ce roi. Toujours est il que Jean II sera à Londres le 2 janvier 1364, laissant Charles reprendre le titre de régent. Jean fut reçu avec tous les honneurs dus à son rang, et pour cause !, Edouard perdait un prince, pour récupérer un roi!! Le roi d'Angleterre lui donna pour résidence le palais de Savoie, ou après un hiver au milieu des fêtes et des plaisirs il mourut le 8 avril 1364 à l'age de 45 ans. Il mourut regretté des Anglais, pleins d'admiration pour sa loyauté chevaleresque, ses funérailles furent royales, dans l'église Saint Paul de Londres. Le corps fut renvoyé en France et enterré près du grand autel de Saint Denis.




                                         Jean II le bon, portant le collier de l'ordre de l'étoile





Avis de Chroniqueurs et Médiévistes: Le Duc de Normandie Jean, depuis roi de France sous le nom de Jean II le Bon, prince frivole, vaniteux, sans esprit, brutal, qui n'eut de la chevalerie que le vernis et qui ne sut s'entourer que de flatteurs, comme Arnould d'Audrehem, car il n'était guidé que par le caprice aveugle et le besoin du moment.M de V

lundi 24 avril 2017

N° 25) Les Grandes Compagnies ou les meilleurs guerriers d'Europe


La paix de Brétigny fut reçue avec joie par tout un peuple, tant la misère était grande, mais d'un bienfait peu découler un mal, comme d'une plaie guérissante exsude quelques mauvaises humeurs. Les soldats de tous poils qu'Edouard III avait attiré en France sont remerciés, les compagnies de mercenaires dissoutes, il en va de même pour la France. Ces soldats de métier se retrouvaient sans pain et bien sur perdaient le produit des pillages.

Ceux qui avaient la garde d'un Château refusèrent de le rendre, ils vont se mettre à piller les campagnes et rançonner les villes, ces routiers seront la nouvelle calamité de la France.

En 1361 on essaye de traiter avec les différentes bandes, ce sera un fiasco qui aura pour conséquence la fédération des routes, formant ainsi la grande Compagnie.

Personne n'exerçait l'autorité suprême, et chaque route conservait son autonomie, son organisation et la hiérarchie de son choix. Dans la chronique Anglaise du moine de Saint Alban, elle est appelée la " Gent " (société sans tête ), le Pape Innocent VI ira jusqu'à entreprendre la construction de remparts, pour protéger sa ville. Il lancera même une croisade contre les routiers de la Grande Compagnie.

Au début de 1362 le roi Jean II décide d'éradiquer du territoire, les routiers de la grande compagnie. Pour ce faire, le roi envoi par messager un Blanc seing à son cousin Jacques de Bourbon, afin qu'il puisse réunir autant de Chevaliers et de gens d'armes qu'il le peut, le faisant de ce fait Capitaine de ces troupes, et de détruire par le fer toute cette ribaudaille.


Ce sera le 6 avril 1362 la bataille de Brignais, nous allons maintenant planter le décor et vous conter comment l'affaire fut menée. Sans chef suprême la grande compagnie manoeuvrait comme un seul homme (chose tout à fait impossible pour nos chevaliers). 

Les routiers s'étaient formés en deux corps, le premier composé des troupes les plus légèrement armées, fut placé à l'aplomb d'une colline proche de Brignais, ils disposaient d'un grand nombre de charrettes ou sont entreposées, pierres et quartiers de roches à profusion.

Pour vous le devinez ( n'étant empruntés des mérangeoises!!!), écrabouiller les assaillants. Quand au second corps, composé des routiers les plus adurés et les plus lourdement armés, ils se trouvaient proche de cette colline, bien visibles, en ordre de bataille, mais avec un fort parti de cavaliers cachés et placé en embuscade.

Il faut à ce moment préciser qui sont ces hommes que le roi nomme ribaudaille. En bref, les meilleurs soldats d'Europe, ayant servis sur tous les champs de bataille, en Angleterre, en Ecosse, en Flandres, et en France, sur terre comme sur mer.

Ils sont au fait de leur art, maîtrisant à fond les techniques de combat, par l'utilisation du relief et des obstacles naturels du terrain, de plus contrairement aux nobles ils savent s'adapter et être réactifs face aux situations, anticipant à merveille les mouvements de l'adversaire " vous me direz qu'avec la stratégie de l'Ost Français ce n'est pas un grand exploit !!! " Mais surtout ils refusent toutes batailles de front face à des chevaliers,en un mot comme en cent ils étaient d'instinct de fabuleux combattants.  


L'ost de jacques de Bourbon se compose de 12000 hommes, avec des chefs qui malgré leurs défaites successives n'ont toujours rien appris. 

Une fois de plus ils vont sous estimer l'adversaire, quand à étudier le terrain avant le combat, on en parle même pas!! Malgré les conseils de Arnaud de Cervolles, ami de Jean II,"mais routier lui même", ils tomberont dans le piège. 

On ne l'écoutera pas, car nos mangeurs de charrettes ferrées sont persuadés qu'ils vont laminer cette engeance de brigands, et voilà une nouvelle défaite qui s'annonce.

Brigands ils le sont soit!!! Mais quand à les écraser c'est une autre histoire, car cette merdaille comme nos chevaliers les nomment, va ériger dans la plaine des Aiguiers un mausolée sanglant, de pierres et de corps à la mémoire des sots.

Ecrasés sous des avalanches de pierres et de rocs, qui broyaient, heaumes, armures et destriers, nos chevaliers chargeront tout de même deux fois ( rendons hommage à leur courage), mais c'est un véritable massacre et pendant qu'il pleut des pierres, la troupe embusquée composée de l'élite des mercenaires va louvoyer et contourner la colline, puis s'élançant sur la pente, attaquer à revers.

La retraite aura un air de déroute, car les routiers tuent méthodiquement, il n'y a pas d'idéal chevaleresque dans leurs actions, le routier est un outil façonné par la noblesse, et qui abandonné après leurs guerres c'est retourné contre eux. Jacques de Bourbon et son fils seront gravement blessés, le père mourra peu de temps après à Lyon. 

Pour Arnaud de Cervolles c'est différent, il sera fait prisonnier car on ne se tue pas entre routiers, du moins si on peut l'éviter!! 

               Après la bataille de Brignais les mercenaires sont les maîtres du royaume des routiers, 
                                         c'est ainsi qu'ils nomment la terre de France!!


                                                    ( voir article Seguin de Badefol )




PS:parmi ceux qui furent nommés dogs of war, nous trouvons deux Anglais réputés pour leurs faits d'armes, sir Robert Knolles ou Kannole 1325-1407, et sir Hugh de Calvelay ou Calverlay 1315/1320-1393. A prendre avec prudence, il est possible que Hugh soit le demi frère de Robert ?


Sir Hugh Calveley

Sir Robert Knolles

dimanche 23 avril 2017

La difficile période du Traité de Brétigny


Après la bataille de Poitiers des négociations seront entamées entre Paris, Bordeaux et Londres, pour aboutir à la trêve de Bordeaux du 23 mars 1357. Celle ci va durer deux ans, afin de permettre aux Ambassadeurs et aux Clercs de rédiger et conclure un Traité définitif.

Edouard III en tant que vainqueur demandera beaucoup! Son fils le Prince noir désirant éponger ses dettes colossales n'en demandait pas moins. Le roi d'Angleterre en fin politique va amadouer son royal prisonnier, en émaillant la rédaction de ce Traité par de nombreuse fêtes, banquets et tournois.

Ce ne fut pas trop difficile, notre monarque Jean II le Bon, "que ce terme de le bon ne saurait réhabiliter" va souscrire à tous ces préliminaires, plaçant son fils le Dauphin dans une situation des plus précaire.

Les travaux d'écriture des Clercs avaient aboutis, au début de 1358, une Ambassade fut envoyée à Paris pour signifier au Dauphin les conditions de paix, imposées par Edouard III à la France.






En 1359 l'Ambassade envoyée vers le régent est composée de proches du roi de France, dans ces rangs nous trouvons ce brouillon bouffi d'orgueil d'Arnould d'Audrehem. Elle sera rejetée avec dédain par Charles et les états généraux




Ceux ci vont considérer qu'un tel accord n'est ni passable ni faisable, devant ce nouveau refus Edouard III entre dans une colère dont il a le secret, fini les cajoleries politiques, il fait mettre le roi de France dans la prison d'un sordide château (Sommerston)de la riante campagne Anglaise, puis à la Tour de Londres

Le roi d'Angleterre plus furieux que jamais reprend le titre de roi de France qu'il avait abandonné, et lance au départ de Calais une de ses terrible chevauchée en guise de répression. 

Il se lance vers Reims dans l'espoir de se faire sacrer, mais la ville est fort bien défendue, il sait qu'il n'a pas les moyens de la prendre de force. De plus il est parti fort tard dans la saison, et le temps n'est pas propice à un tel raid ( la colère n'est pas bonne conseillère), il lui faut rapidement un abri pour hiverner. Il choisi la bourgogne, sachant que le jeune Duc Philippe de Rouvres, n'est pas en mesure de s'opposer par la force à son installation.





Le pauvre Duc sera même obligé de verser une forte somme pour qu'à la fin de l'hiver ils partent sans tout saccager (il acheta une trêve de trois ans pour 200 000 écus), ce qui ne l’empêchera pas de ravager la région de Beaulieu et Flavigny. Il marche sur Paris, comme pour Reims il ne peut que regarder les murailles, le régent avait donné pour consignes de déserter les campagnes et d'enfermer gens et provisions dans les villes et surtout de ne pas venir au contact des Anglais. Charles avait retenu la leçon de Crécy et Poitiers. Les troupes Anglaises ne trouvent plus rien à glaner sur leur chemin, les fourrageurs rentrent les mains vides et la faim se fait sentir.

C'est alors que va survenir un effroyable orage qui va détruire tout le train d'équipage de l'armée d'Edouard III, massacrant par la foudre et les averses de grêles, hommes, chevaux, chariots et tentes. Cette catastrophe fera sensation et ce lundi 13 avril de l'an 1360 restera dans les mémoires, sous le nom de Black Monday. Le roi d'Angleterre est fortement impressionné, par l'orage bien sur ( que l'on pourrait croire d'intervention divine, Dies irae, dies illa, saluet saecum in favilla) mais pas seulement, il sent la résistance de tout un peuple, ses troupes sont mal nourries, il ne peut livrer aucune bataille, ne rencontrant que du vide. Il comprend qu'il a en face de lui une intelligence vive, un jeune homme brillant (son précepteur Nicolas Oresme a fait de l'excellent travail), tout le contraire de son père.

Edouard rentre ses griffes, il va adoucir ses exigences, des négociations vont s'ouvrir à Brétigny, puis à Chartres, ou un traité sera signé le 8 mai 1360 et ratifié quelques mois plus tard à Calais. Ce traité nous fera perdre beaucoup de territoires du sud, sans compter l'énorme rançon de trois millions en or pour la libération de Jean II .



PS: Sir John Chandos, chevalier de l'ordre de la Jarretière, sera le négociateur, désigné, du roi  Edouard III. M de V

Quelques Laboratores des cités du XIV siècle

Ils sont avant tout des paysans et des artisans qui pratiquaient ce que l'on nomme à l'époque les arts mécaniques, qui font opposition aux hommes de sciences ayant bénéficié de l'enseignement des arts libéraux, Notaires, Juristes, Médecins etc..., formant des groupes puissants dans les villes, tandis que le Forgeron, le Meunier, le Potier et le Tonnelier restent des artisans ruraux. Quelques exemples.

Les artisans du textile, Tisserands de la toile, du lin et du chanvre. Les drapiers pour le drap de laine, avec les évolutions du XIV siècle qui voit l'apparition des tissus mixtes. La futaine, mélange de coton et de lin, La saye mélange de laine et de lin et le feutre, mélange de laine et de poils d'animaux ( lapins castors).

Les tissus sont confiés à toute une série d'artisans répondant aux besoins du marché de l'habillement, tailleurs de robes, les merciers qui sont surtout revendeurs sur les marchés et les foires, et les chapeliers. Chez ces derniers on fait la distinction entre le chapelier de plumes et le chapelier de fleurs, auxquels il faut ajouter les fourreurs de chapels.





Puis on trouve les fripiers, rachetant les vieilles hardes pour les revendre aux pauvres, eux aussi sont des itinérants fréquentant les marchés et les foires. Puis on trouve les brodeurs et les brodeuses qui pratiquaient ce que l'on nommait " la peinture à l'aiguille ", ils forment l'aristocratie de ces métiers du textile, sommet de l'art qu'ils partagent avec les tapissiers produisant de superbes tentures de laine, ornant le plus souvent les demeures seigneuriales ou les maisons de la grande bourgeoisie.

Les artisans du pain,monopole de plusieurs métiers, le blatier faisant la farine pour le boulanger, ceux ci pétrissent la pâte dans leurs pétrins de bois, et les fourniers cuisent le pain. Les boulangers sont soumis à un officier royal qui veille à l'application des statuts de 1305 (notamment ordonne aux boulangers de cuire le pain tous les jours, même le dimanche jour chômé pour les autres).

Nos boulangers n'ont pas le droit de produire de gâteaux et de pâtisseries, c'est le domaine réservé d'autres professions comme les oublieurs, fabricants dés le XIII siècle des oublis, des casses museaux, des petits fours ou les tallemousses (gâteaux au fromage), les bridaveaux (sorte de gaufres). Ils ont aussi le monopole de la confection des pâtés en croûtes ou de tourtes, farcies au saumon, à l'anguille, au porc, à la tourterelle, ou à la bécasse, de alouette et de la caille, ainsi que d'autres aux raisins secs. Ils sont vendus dans la rue aux ouvriers se rendant au travail, aux voyageurs, aux joyeux fêtards rentrant tôt le matin chez eux et même à bon nombre de citadins qui ne dédaignent pas de quitter le logis de bon matin pour acheter et manger ses oublis tout frais. Si l'oublieur est surtout un marchand des rues, les pâtissiers eux tiennent boutiques, vendant leurs produits à leurs étals, mais surtout dans les tavernes, auberges et cabarets.






Contrairement à une idée reçue qui a la vie dure, au moyen âge on mange de la viande du moins au XIV siècle!! Je vous l'accorde plus dans les villes que dans les campagnes, le citadin en est friand ce qui fait la richesse de la corporation des bouchers. S'ils sont prospères néanmoins ils sont peu aimés et critiqués pour leurs abus, le fait qu'ils abattent les animaux dans la rue, laissant du même coup viscères et boyaux empuantir la ville et jetant les carcasses en rivière.


C'est de plus une corporation de gens au sang chaud, ayant souvent en main de grands couteaux  ou hachoirs du fait de leur métier, mais ils sont aussi souvent à l'origine de bien des troubles dans les cités.Nos bouchers ne se contentent pas d'abattre ou de découper les viandes, ils pratiquent l'élevage à proximité de la cité, et font aussi commerce de sous produits, le suif, la laine,le cuir.









Tandis que les agneliers proposent des viandes moins chères, agneaux, chevreaux, lièvres et lapins, il nous reste à citer les galiniers qui proposent vendent, oies, canards, poules et poulets.

Il nous reste dans le domaine des aliments carnés, les rotisseurs ou cuiseniers (dans d'autres régions), qui vendent les viandes rôties d'oies de canards de poules et de poulets, on peut trouver des galiniers qui sont aussi rotisseurs.

La profession d'espicier se développe au XIV siècle répondant à l'essor de la consommation d'épices afin d'agrémenter des viandes trop fades, les vendeurs de sauces à la canelle ou à la moutarde se multiplient. La vente de fromage se fait par les regrattiers, métier de peu de profit  souvent laissé aux femmes, elles proposent aux passant les herbes, légumes, fruits et fromages.






Aubergistes et Hosteliers, un proverbe disait au moyen âge, que lorsque l'on se mettait en voyage par les chemins, il fallait se méfier des brigands....et des Hosteliers!!, maintes Auberges avaient mauvais renom, et l'on contait même le soir à la veillée de sanglantes histoires, toutes aux dépend des voyageurs.

Le plus souvent c'était des légendes, cependant d'un autre côté, Aubergistes et Hosteliers ne se gênaient pas pour rançonner le voyageur, par des prix prohibitifs, profitant du fait que le voyageur était soit surpris par la météo, ou par la nuit tombante, ou par le simple fait qu'il n'y avait pas d'autre endroit ou se loger.





Au temps de Louis IX, ( saint Louis ), on était logé pour la nuit et nourri,pour la somme de 2 liards, mais au siècle suivant les prix avaient pris du ventre !!! au moins autant que celui de l'aubergiste.

A tel point que Jean II le bon, trouvant que ceux ci abusaient, rendit une ordonnance qui stipulait, qu'une journée plus une nuit repas compris  ne devait pas excéder la somme de 3 sols. Il s'agit la du sol ou ( sou ) Parisis, pièce en argent.





PS: La Taverne ou l'Auberge est le lieu composite et trouble par excellence, lieu aimable et permissif, ou l'on peut à sa guise boire, manger, se quereller, jouer aux dès et converser avec les dames de petites vertu, ou certaines serveuses embauchées à cet effet. C'est également l'endroit ou l'argent glisse entre les doigts !!!! La taverne est le lieu ou l'on s'oublie au risque de se perdre, le seul qui ne se perd pas c'est le maître du lieu " le tavernier ", qui saura toujours coûte que coûte se faire payer !!! On sort toujours de ces lieux plus pauvre que l'on y est entré, voir même pour certains joueurs impénitents, sans leurs habits !!!!!  M de V


samedi 22 avril 2017

Jean III de Grailly, Captal de Bush



Tout bien considéré, la victoire de Poitiers n'est pas due aux seuls talents guerriers du Prince de Galles, en effet une partie de son armée était composée de Gascons et de Poitevins, pour la Gascogne ils étaient commandés par un des leurs, Jean III de Grailly Captal de Bush.

Ce personnage dut naître aux alentours de l'année 1331, car il parait être du même age que son cousin germain le fameux Gaston Phébus, Jean fut d'ailleurs élevé à la cour des Comtes de Foix

Il se distingue plusieurs fois lors des chevauchées du prince noir (dont il est l'ami), la prise de Plaisance, le siège de Cahors, celui d'Agen. Mais c'est à Poitiers qu'il fera des prouesses, car c'est lui qui fut envoyé par son prince pour effectuer ce fameux mouvement tournant qui dispersa la bataille du Dauphin lui permettant de combattre face à face contre le roi de France. 

Il sera d'ailleurs à la place d'honneur à côté de son Prince lors de son entrée triomphale dans Londres le 24 mai 1357 lorsqu'il ramène son illustre prisonnier Jean II le Bon.

Pendant la longue trêve et les tractations politiques inhérentes au traité de Brétigny, Jean et son cousin Gaston Phébus vont partir en croisade, en pays de Prusse faire la guerre aux côtés des chevaliers Teutoniques. Sur le chemin du retour en 1358 nos deux compagnons d'armes se trouvent en île de France, et viennent visiter de nobles dames ainsi que la Duchesse de Normandie ( épouse du Dauphin Charles) en la ville de Meaux.

C'est la qu'ils vont se trouver assiégés par un parti de Jacques et de Bourgeois Parisiens en révolte (voir Etienne Marcel). Les pauvres bougres auraient mieux fait de trouver un autre endroit ou commettre leurs méfaits, car nos deux compagnons n'étant pas avares de coups de tailles et d'estocs, vont à la tête de leurs hommes faire une sortie, et tailler en pièces ces pauvres gens que la misère des temps avait placés sur leur chemin

Il rentre en Gascogne pour revenir en terre de France en 1359, il débarque à Cherbourg, la forteresse du Roi de Navarre et Comte d'Evreux, avec 100 lances à ses gages ( une lance est composée de 12 personnes environ) pour rejoindre Charles II à Evreux. Il va exécuter un coup de main de nuit sur Clermont en Beauvaisis, en faisant escalader les murs d'une des tours par quelques uns de ses hommes qui lui ouvrirons les portes, il va rapidement se rendre maître de la place pour y établir son nid hivernal le 18 novembre.

Cependant un mois plus tôt en octobre le roi Edouard III avait débarqué à Calais en vue d'une nouvelle chevauchée, il n'eut que de piètres succès, car le Dauphin avait donné comme consignes de vider les campagnes, pour que la population se protège derrière les murailles des villes, ils avaient également l'ordre de laisser passer les Anglais, de ne pas sortir de leurs villes, pour éviter toutes pertes inutiles.

Le Captal de Bush fut mandé auprès d'Edouard III en tant que vassal de la couronne, il le rejoignit non loin de paris à Bourg la Reine, le roi d'Angleterre se replie ne pouvant avec ses troupes ni investir, ni faire le siège d'une ville comme paris. Malheureusement les parisiens n'écoutant pas leur Dauphin, vont tenter de tailler des croupières aux troupes d'Edouard, mal leur en pris, car ils vont tomber dans une fort belle embuscade tendue proche de Montlhéry, par Jean de Grailly, le soir même il libérera ses prisonniers contre promesse rançon.

En 1360 après le traité de Brétigny, il sera lieutenant du roi de Navarre en Normandie, il faut préciser qu'ils se connaissaient bien, son cousin Gaston Phébus est marié avec la soeur du Roi de Navarre.

Lorsque Edouard de Woodstock, Prince de Galles, est nommé Duc d'Aquitaine, par son père suite à son mariage en cachette qui avait tant courroucé le Monarque ( et pour cause, étant lui même amoureux de Joan de kent), Jean de Grailly rejoindra son prince qui tient à Bordeaux une cour fastueuse, ou le Captal aime à jouter devant de belles dames. Un rude combattant comme Chandos, dira de Jean qu'il était un redoutable jouteur.

En 1364 il débarque une nouvelle fois à Cherbourg, engagé avec ses troupes par le roi de Navarre, contre le roi de france qui vient de lui prendre sous le nez le Duché de Bourgogne, il faut savoir que par droits de succession ils avaient tous deux les mêmes droits sur ce Duché. Bien sur le Captal est la pour l'argent, il faut bien vivre, il a de toute façon l'accord d'Edouard Duc d'Aquitaine pour faire cette campagne en dehors des intérêts de L'Angleterre. IL s'installe à Evreux, il dispose des pleins pouvoirs.

Il va peu à peu constituer son armée, puis sera rejoint par Jean Jouel et ses troupes de mercenaires, à ce moment il est fort de 700 lances, 300 archers et 400 soudoyers, puis il fera jonction avec les troupes Navarraises. Et ce sera la bataille de Cocherel, sa première défaite, Jean III de Grailly se rendra à Bertrand Dugesclin. Prisonnier il sera remis au roi Charles V le sage qui vient tout juste d'être sacré à Reims. Il sera enfermé dans le château de Meaux, la ou il avait sauvé la Duchesse de Normandie, désormais Reine de France !! Il y reste jusqu'en septembre 1364 d'ou il se rendra avec l'accord du roi de France en Angleterre. Jean va à Londres pour plaider lui même son échange pour libération contre le Duc de Berry.

Grande est la déception pour le Captal de Bush, Edouard III y est hostile, le vieillissant monarque à ses idées fixes et la sénilité le guette, mais pour Jean c'est une grande injustice, surtout si l'on tient compte des services rendus par cet homme à la couronne d'Angleterre!!! Charles V, notre retors politicien, désire s'attacher cet homme de valeur, il le délivre donc de sa rançon, et lui offre le fief de Nemours avec ses dépendances en échange de l'hommage lige. Jean de Grailly va accepter, plus pour se venger d'Edouard III, que par envie de servir la France.

Mais le Prince Noir son ami va lui reprocher son changement d'allégeance, Jean rendra au roi de France les biens qui lui furent offerts, qui grand seigneur le laissera partir sans rien demander en échange. Le Captal restera désormais indéfectiblement attaché à son Prince. Il sera avec lui à Najera en avril 1367, ou lui sera confié la garde de Dugesclin, juste retour des choses!!!

En 1368 on retrouve Jean en Normandie ou il défend les possessions du roi de Navarre contre les grandes compagnies, les hordes de routiers sont de retour, car contrairement aux espérances de Charles V au lieu de se disperser après l'Espagne elles étaient revenues comme un nuage de sauterelles se jeter sur la France.

En 1369 Jean III de Grailly est nommé Comte de Bigorre par le prince de Galles Duc d'Aquitaine, l'année suivant il sera fait Connétable d'Aquitaine. On pense que sciemment le prince lui donne ce titre, juste avant de rentrer en Angleterre finir ses jours, afin d'aider son frère Jean de Gand Duc de Lancastre, venu remplacer le prince noir que la maladie fait tant souffrir.

En 1371 aprés la prise de Moncontour, Lancastre rentre en Angleterre, c'est Pembroke qui le remplace, il va charger Jean de défendre Bordeaux et les marches de Gascogne. Mais les renforts et l'argent que Pembroke attend seront coulés par une flotte Franco Espagnole le 23 juin 1372.

Appelé par la ville de Soubise à l'embouchure de la Charente, qui est assiégée par les Français, notre Connétable réunis prestement 200 lances et marche sur la ville. Mais il est tombé dans un piège savamment tendu, il se battra comme un forcené mais finira par se rendre, mené à Paris il sera enfermé au temple sous la garde du grand prieur de France.

Il va y rester pendant quatre ans, mais apprenant la mort de son ami le prince noir, il fut pris nous dit Froissart " d'une petite maladie frénésieuse, et ne voulant ni boire, ni manger, fut si durement affaibli de corps qu'il entra dans une langueur qui le mena à la mort.

Charles V qui avait été magnanime la première fois, refusa tout au long de sa seconde captivité, les échanges et les rançons, ne voulant pas libérer un adversaire de la taille de Jean de Grailly. Le Roi de France fait cela contre toutes les lois de la chevalerie, il n'en a cure, il gouverne en politique, à l'inverse de son père qui avait comme seul idéal la chevalerie. Néanmoins il lui fera des obsèques fastueuses, reconnaissant par cet acte de ROI les valeurs guerrières de:

                                                       Jean III de Grailly Captal de Bush

                                                                 Comte de Bigorre

                                                             Connétable d'Aquitaine



vendredi 21 avril 2017

Poitiers vu par Chateaubriand suite 3/3


Le soleil qui devait éclairer un jour si funeste à notre patrie se leva, et trouva les coeurs bercés de fausses espérances (19 septembre 1356).

Les Français se rangèrent dans le même ordre que le jour précédent ; les Anglais changèrent quelque chose à leur dispositions: instruits on ne sait comment, de la manière dont ils seraient attaqués, ils placèrent au front de leur ligne un certain nombre de cavaliers pour soutenir le choc des maréchaux; ils cachèrent en outre, trois cent hommes d'armes et trois cent archers à cheval derrière une petite colline, au revers de laquelle s'étendait le corps commandé par le Dauphin et ses deux frères. 

Ces six cent hommes avaient ordre, aussitôt qu'ils verraient l'action engagée de tourner le mamelon et de prendre en flanc les troupes du Dauphin.

Les Français élèvent le cri d'armes: à ce signal les deux maréchaux entrent dans le défilé à la tête de trois cent cavaliers commandés pour frayer le chemin. A peine sont ils engagés entre les deux haies qui bordent le chemin que les archers retranchés derrière, font pleuvoir sur eux une grêle de ces flèches longues, barbelées et dentelées, qui lancées à bout portant par un ennemi invisible, frappent dans l'épais du bataillon. 

Les chevaux percés d'outre en outre, effrayés et rendus furieux par la douleur, hennissent et se cabrent refusent d'avancer, trébuchent et tombent sous leurs maîtres. Les derniers rangs essayent de passer sur les premiers, se renversent également, augmentant le péril et la confusion. Cependant les deux maréchaux et quelques chevaliers surmontent les obstacles et parviennent sur le front de l'armée Anglaise: la ils trouvent une autre ligne d'archers et sire James d'Audeley à la tête de ses hommes d'armes. Ils ne peuvent soutenir ce combat par trop inégal, Clermont meurt tué par Chandos et d'Audrehem se rend à d'Audeley.

Le bruit de la défaite se répand, et tous ces combattants arrêtés au milieu du défilé, entre ceux tombés devant, les hommes d'armes à pied qui les suivaient, ne pouvant ni avancer, ni reculer!! Ils restent immobiles, exposés aux flèches qui les transpercent ; des cris et des rugissements sortent de l'horrible mêlée. Ceux qui le peuvent se replient sur la bataille commandée par le Dauphin, c'est à ce moment précis que les six cent cavaliers cachés au revers de la colline viennent prendre à revers ce corps de bataille. La terreur s'empare des soudoyers, les hommes d'armes se dispersent, les seigneurs qui avaient la garde du Dauphin et de ses frères, jugent trop vite la bataille perdue, les forcent à s'éloigner, puis eux même avec Cervolles rejoignent pour se ranger auprès du Roi.

Les troupes du Dauphin s'étant débandées, celles du Duc d'Orléans prirent lâchement la fuite avec leur chef, il ne restait sur le champ de bataille que l'escadron de cavalerie Allemande et la division conduite par le roi, a laquelle se joignirent quelques chevaliers, qui n'avaient pu se résoudre à abandonner leur maître.

Le Prince Noir observant la déroute des deux premiers corps Français, ordonne à ses hommes de remonter à cheval, il crie aussitôt " bannières chevauchez avant ! " et il descend de son promontoire avec toute ses troupes. La cavalerie Allemande soutint bien le choc de la première charge, mais elle lâcha pied après avoir perdu les Comtes de Saarbruck, de Nidau et de Nassau, qui les commandaient.

Les chevaliers Français de diverses provinces, rangés avec leurs écuyers autour des bannières de leurs suzerains, combattaient tantôt par pelotons séparés, tantôt mêlés et confondus. Le prince de Galles avec Chandos attaqua la division du Connétable; et Jean III de Grailly Captal de Buch, avec les maréchaux d'Angleterre, se trouva en face du roi Jean. L'armée Anglaise toute à cheval se ruait sur l'armée Française toute à pied . Les flots des combattants étaient poussés vers Poitiers, et ce fut prés de cette ville que se fit le plus grand carnage. Les habitants craignant que les vainqueurs entrassent pêle mêle avec les vaincus refusèrent d'ouvrir les portes.

Déjà les plus braves avaient été tués; le bruit diminuait sur le champ de bataille, les rangs s'éclaircissaient à vue d'oeil, les chevaliers tombaient les uns après les autres, comme une forêt dont on coupe les grands arbres. Les cris avaient cessés, Charny, étendu au pied du roi serrait, dans ses bras roidis par la mort l'oriflamme qu'il n'avait pas abandonné. Jean tenant sa hache, défendait son fils, sa couronne et l'oriflamme, immolant quiconque osait l'approcher.

Mille ennemis essayent de saisir le roi, en disant " sire rendez vous " il se rendra à Denis de Morbec, un chevalier d'Artois qui avait fui son pays pour avoir tué un Homme, du moins le roi rendait ses armes à un Français!! Le soir dans la tente du Prince noir au banquet du vaincu, il fut traité avec générosité, des larmes s'échappèrent de ses yeux, le roi Jean put dire comme le Saint Roi: mes pleurs se sont mêlés au vin de ma coupe.

Au dessus de l'ancienne abbaye de Vouillé et du village de Beauvoir en Poitou, sur le haut d'une colline couverte de joncs marins, on croit trouver les vestiges d'un vieux camp, on remarque l'ouverture d'un puits comblé: c'est tout ce qui atteste du passage et du combat de ce roi. Le village de Maupertuis a disparu; personne dans le pays ne se souvient qu'il ait existé. Par une autre bizarrerie du sort, le lieu ou l'on voit des traces du camp Anglais s'appelle Carthage; comme si la fortune pour se jouer des hommes s'était plu à effacer un nom fameux par un nom plus fameux encore, une ruine par une ruine, une vanité par une vanité.












jeudi 20 avril 2017

N°20) Poitiers vu par Chateaubriand suite 2/3



Déjà les trois cent hommes d'armes avaient embrassé leurs targes, quand voici venir un cavalier qui demande à parler au roi: on reconnut le cardinal de Périgord. Le Pape ne cessait de travailler à la réconciliation de la France et de l'Angleterre: les deux cardinaux d'Urgel et de Périgord avaient été envoyés vers les deux armées pour les engager à la paix et traiter  de la liberté du roi de Navarre. 

Le Cardinal de Périgord ne s'était point rebuté du mauvais succès de ses premières tentatives, et s'attachant aux pas des Princes rivaux, il était arrivé à l'instant même ou ils allaient vider leurs querelles.

Il court vers le roi de France; aussitôt qu'il l'aperçoit, il descend de cheval, s'incline et s'écrie en joignant les mains " très cher sire, vous avez ici toute la fleur de la chevalerie de vôtre royaume, réunie contre un petit nombre d'ennemis. Si vous pouvez en obtenir ce que vous désirez sans combattre, vous épargnerez le sang chrétien et la vie de vos sujets. Je vous conjure au nom de ce Dieu et de la charité, de me permettre d'aller vers le Prince de Galles lui représenter son péril et l'avantage de la paix ". Le roi répondit " il nous plait que cela soit ainsi; mais retournez vite ".

Le Cardinal chevauche au camp Anglais: au nom de la religion, les barrières des deux armées se baissent et laissent passer son ministre. Il trouva le prince couvert de son armure noire, au milieu de ses chevaliers et portant la devise des princes de Galles, prise de l'écusson du vieux roi de Bohême; présage qui promettait à Poitiers le destin de Crécy. "Certes beau fils, lui dit l'envoyé du pape, si vous aviez examiné l'armée du roi de France , vous me permettriez  d'essayer de conclure avec lui un traité". Le prince répondit: "j'entendrai à tout, fors à la perte de mon honneur et de celui de mes Chevaliers" Le Cardinal répondit " beau fils vous dites bien " Et il retourna en toute hâte au camp Français.

Il supplia le roi de suspendre l'attaque jusqu'au lendemain. " Vos ennemis disait il ne peuvent s'échapper; accordez leur quelques instants pour apercevoir leur péril " Jean refusa d'abord, sur l'avis de la plus grande partie de son conseil; mais par respect pour le Saint Siège, il consentit enfin à ce délai qui donna aux Anglais de se retrancher, ralentit l'ardeur du soldat, et fut la principale cause de la perte de la bataille.

Le Cardinal retourné au camp Anglais puis revenu ensuite au camp Français pour rapporter au roi les propositions du Prince noir. Celui ci offrait de rendre les prisonniers qu'il avait fait, les châteaux qu'il avait pris depuis trois ans; il s'engageait pendant sept ans à ne pas porter les armes contre la France: Villani ajoute qu'il consentait à payer deux cent mille nobles ou écus d'or pour les dégâts causés par son armée. Le prince demandait en mariage une fille du roi et pour dot de cette princesse, le seul duché d'Angoulême; enfin , il réclamait la liberté de Charles II roi de Navarre et Comte d'Evreux, s'engageant à faire consentir à son père Edouard aux conditions du traité.

Jean que les historiens représentent comme un téméraire, n'avait déjà été que trop modéré en accordant aux Anglais une suspension d'armes; il allait donner une nouvelle preuve de son esprit conciliant en acceptant l'offre du prince noir, lorsque Renaud de Chauveau évêque de Châlons se leva est dit " Sire, s'il m'en souvient bien le roi D'Angleterre, son fils et son frère le Duc de lancastre, vous ont à plusieurs reprises insulté, et ont rempli votre royaume de meurtres et de ruines. Sur terre ils ont humilié votre père Philippe et massacré votre noblesse: sur mer ils ont assailli vos vaisseaux et bruslé vos ports comme des pirates. Quelle vengeance en avez vous tirée? Quoi pour prix de ces brigandages, vous donneriez votre fille à des mains teintées du sang Français ! Dieu vous livre votre principal ennemi, ces orgueilleux Anglois, ces gascons infidèles, ces lâches qui viennent d'égorger les pastres et les laboureurs, ces incendiaires qui ont portés la flamme dans les hameaux qui fument encore, et vous les laisseriez eschapper !! .

Et croyez vous qu'ils soient de bonne foi dans ce qu'ils vous proposent? Ne connoissez vous pas leur perfidie? Sous le prétexte de faire ratifier les conditions par le monarque Anglois, ils gagneront du temps. Cependant le Duc de Lancastre qui ravage le Perche avec son armée aura rejoint le prince de Galles !! alors la victoire passera peut être à vos ennemis. Dieu nous préserve de plus grand malheur!! Ce discours dont le prélat soutint la vigueur la pique à la main, fit bouillonner dans le sein du roi l'ardeur guerrière. Allez dit le roi au Cardinal " dites au prince de galles qu'il ait à se rendre prisonnier lui et cent de ses principaux chevaliers: à cette condition, je laisserai passer son armée" .

Le prince au ouïr de ces paroles qui lui furent rapportées par le Cardinal répondit " Mes chevaliers ne seront pris que les armes à la main; quand à moi, quelque chose qu'il arrive, l'Angleterre n'aura nul besoin de payer ma rançon. Ces pourparlers occupèrent toute la journée du dimanche. La nuit était venue, les Français abondamment pourvus de vivres, se fiant à leur nombre et leur valeur, la passèrent à dormir. Les Anglais mirent ce temps précieux à profit, devant leurs archers ils creusèrent des fossés profonds, qu'ils revêtirent de palissades, dans la partie la plus faible de leur dispositif, ils se couvrirent avec leurs bagages et leurs chariots. Le Prince de Galles commanda d'apporter le butin de leur chevauchée; il en fit faire trois monceaux entre son camp et celui des Français, et y mirent le feu. Il ne restait plus rien à regretter aux Anglais, les flammes et la fumée qui s'en élevaient servi à masquer les travaux de l'ennemi tout en étonnant nos soldats.






Poitiers vu par Chateaubriand 1/3


Pour Chateaubriand, deux nations ainsi descendues dans la lice ne pouvaient pas plus refuser le combat, qu'un homme de coeur ne peut se dispenser de tirer l'épée quand il a reçu un affront.

                Or donc il fut résolu au conseil du Roi de France de marcher droit à l'ennemi. Aussitôt les ordres sont donnés; les cors de chasse et les trompettes sonnent haut et clair; les ménéstriers jouent de leurs instruments, les soldats s'apprêtent, les seigneurs déploient leurs bannières; les chevaliers montent à cheval et viennent se ranger à l'endroit ou l'étendard des lis et l'oriflamme flottaient au vent.

On voyait courir les chevaucheurs, les poursuivants, les héraults d'armes, les pages, les varlets, avec la casaque, le blason et la devise de leurs maîtres. Partout brillaient belles cuirasses, riches armoiries, lances, écus, heaumes et pennons; là se trouvait toute la fleur de la France, car nul chevalier ni écuyer n'avait osé demeurer au manoir. On entendait au milieu des fanfares, de la voix des chefs, du hennissement de chevaux, retentir les cris d'armes des différents seigneurs. Tous ces cris étaient dominés par le cri de France " Montjoie Saint Denis ", par des complaintes en l'honneur de la Vierge, et par la chanson de Roland. Des vassaux, tête nue, sous la bannière de leur paroisse, et portant des colobes et des tabards (espèce de chemise sans manche et de manteau court); des barons en chaperons, en robes longues et fourrées, marchant sous les couleurs de leurs dames; une infanterie en peliçon ou jaquette armés d'arcs, d'arbalètes, de bâtons ferrés et de fauchards; une cavalerie couverte de fer, portant le bassinet et la lance; des évêques en cottes de mailles et en mitre; des aumôniers, des confesseurs; des croix, des images de saints; de nouvelles et d'anciennes machines de guerre; toute cette armée, enfin, présentait aux feux du soleil un spectacle aussi extraordinaire que brillant et varié.

Les troupes réunies formaient plus de soixante mille combattants: on y voyait le frère et les quatre fils du roi, la plupart des seigneurs des fleurs de lis, d'illustres commandants étrangers, trois mille chevaliers portant bannières. Tous ces guerriers avaient à leur tête le roi, qui, s'il n'était pas le plus grand capitaine de son royaume, en était du moins le plus brave soldat et le premier chevalier.

L'armée fut divisée en trois batailles, par l'avis du connétable Jean de Brienne et des deux maréchaux d'Audeneham ( Arnould d'Audrehem)et de Clermont. Le Duc d'Orléans, frère du roi, ayant sous lui trente six bannières  et deux cent pennons, commandait la première bataille; la seconde avait pour chef le Dauphin Charles, Duc de Normandie (futur Charles V le sage); ses deux frères Louis et Jean marchaient avec lui: les trois Princes étaient sous la garde des sires de Saint Venant, de Landas, de Vondenay et de Cervolles, dit l'Archiprêtre (célèbre aventurier). Le roi menait la troisième bataille avec Philippe le plus jeune de ses fils, tige de la seconde maison de Bourgogne.

Ces trois corps qui auraient pu envelopper l'ennemi en tournant la position du Prince de Galles, furent disposés sur une ligne oblique, un peu en arrière les uns des autres. L'aile gauche, la plus proche de l'ennemi, et sous les ordres du Duc d'Orléans, n'était séparée des Anglais que par un monticule, dont on négligera de s'emparer; le Dauphin commandait au centre et le roi à l'aile droite constituant la réserve. On jugera de la science militaire de ce temps, quand on saura que ces dispositions se faisaient avant d'avoir reconnu le terrain occupé par le Prince de Galles.

Tandis que l'armée Française se mettait en place, le roi envoya trois chevaliers examiner le camp d'Edouard de Woodstock Prince de Galles. Au retour ils rendirent compte au roi de ce qu'ils avaient observés. L'ennemi s'était retranché au milieu d'une vigne, sur une petite hauteur, auprès d'un village appelé Maupertuis; pour aller vers lui il n'y avait qu'un chemin creux, bordé de deux haies épaisses, et si étroit qu'à peine trois cavaliers y pouvaient passer de front. Le prince avait embusqué des archers derrière ces haies. Parvenu au bout de ce défilé on trouvait l'armée Anglaise, composée au tout de deux mille hommes d'armes, quatre mille archers et de quinze cent aventuriers. Il n'y avait guère sur ces sept à huit mille hommes que trois mille Anglais: le reste était Français et Gascons.

Le Prince avait fait mettre à pied à terre à toute sa cavalerie, qui ne pouvait agir sur le terrain ou elle se trouvait: le tout formait sur la pente de la colline, un corps d'infanterie pesamment armé, retranché parmi des buissons et des vignes, couvert sur son front par des archers rangés en forme de herse. Cette disposition était l'ouvrage de James d'Audeley, chevalier d'une grande expérience.

Le Prince Noir avait pour compagnon les plus vaillants guerriers d'Angleterre et de Guyenne, on remarquait, Jean Lord Chandos, les Comtes de Warwick et de Suffolk, Richard Stanfort, James d'Audeley et Pierre son frère, sir basset, pour la Guyenne on comptait le Captal de Buch, Jean Chaumont, les sires de Lesparre, de Rozem, de Montferrand, de landuras, de Prumes, de Bourguenze, d'Aubrecicourt, et de Ghistelles.

Ribaumont ayant peint au roi la position des ennemis, Jean II lui demanda comment on les devait attaquer. " tous à pied, excepté trois cent armures de fer parmi les plus habiles et les plus chevalereuses: elles entreront  dans le chemin creux pour rompre les archers, elles seront suivie du reste des hommes d'armes à pied, pour donner sur les hommes d'armes Anglais qui sont en bataille sur la hauteur au bout du défilé, et pour les combattre de la main à la main.

Jean II suivit cet avis qui lui plaisait par sa hardiesse: mieux conseillé, il aurait fait attaquer les archers à dos, et les eut chassés des deux haies avant de s'engager dans le défilé. Les maréchaux d'après le plan adopté, désignèrent les trois cents cavaliers qui devaient ouvrir le chemin. Le reste des hommes d'armes fut démonté; on leur ordonna d'ôter leurs éperons de tailler leurs piques, et de les réduire à cinq pieds de long, pour s'en servir plus facilement dans la mêlée.

Un corps d'Allemands commandé par les Comte de Nidau, de Nassau et de Saarbruck, demeura à cheval afin de soutenir en cas de besoin, les hommes d'armes à l'attaque dans le défilé. Le roi accompagné de vingt chevaliers se mit au milieu de ces Allemands pour voir de plus près le commencement de l'action. Tout étant ainsi  disposé on pouvait donner le signal du combat.











mercredi 19 avril 2017

Bible des Pauvres (Biblia Pauperum)

La voix des Laïcs selon Guy Lobrichon, ne cesse de monter au long du Moyen âge, elle devient un cri, revendication aux XIV et XV siècles. La grande peste noire de 1348 ravage les populations des villes et des campagnes, mettant à nu toutes les inquiétudes. Les seigneuries ne sont point épargnées, l'église vacille torturée par le grand Schisme d'occident.

Mais de ce sombre tableau émerge une oeuvre paisible et modeste, que l'on appelle la bible des pauvres (Biblia pauperum). C'est un recueil d'images bibliques commentées, souvent en langue vernaculaire, populaire à la fin du Moyen âge. Un tel ouvrage est composé de 40 à 50 feuilles.

Chaque feuille est structurée de manière semblable; elle illustre une scène de la vie du Christ tirée du Nouveau Testament, mise en relation avec deux épisodes de l'Ancien Testament. Elle contient de plus les images de quatre Prophètes qui commentent la scène par des paroles qui leurs sont attachées par des banderoles.



Ces bibles s'adressent à un public de Clercs. Par leur structure claire et uniforme, les images édifiantes doivent faciliter aux Prêtres la préparation de leurs sermons.

Le terme de " pauvres " utilisé que tardivement renvoi probablement aux " pauvres selon les béatitudes " ( les pauperes spiritu), plutôt qu'aux économiquement pauvres, car son coup comme celui de tout livre restait relativement élevé.





Une bible des pauvres se distingue d'une bible moralisée par sa taille, sa forme et son public: elle est beaucoup plus courte et centrée sur l'image plutôt que sur le texte, alors que la bible moralisée par son raffinement et son coût s'adresse à la haute aristocratie.

Les biblia pauperum du XIV siècle sont des manuscrits enluminés, en général peint à la main sur velin.

A partir du XV siècle des gravures sur bois leur succèdent. Images et textes sont gravés sur un seul bloc de bois par page.

Ces bibles ont été populaires en Allemagne, dans les Pays Bas et en France. Quelque quatre vingt manuscrits XIV siècle et éditions imprimées XV siècle, plus ou moins complètes sont conservées et se trouvent dans différents musées ou bibliothèques.